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Oui, j’ai dit dans mes vers qu’un célebre assassin
Laissant de Galien la science infertile,
D’ignorant médecin devint maçon habile.
Mais de parler de vous je n’eus jamais dessein ;
Perrault, ma muse est trop correcte :
Vous êtes, je l’avoue, ignorant médecin,
Mais non pas habile architecte.

Il semble cependant que l’arrangement des mots dans ces deux exemples, dépend beaucoup plus de le pensée que des expressions. Mais dans cette partie, comme dans bien d’autres, l’art ne doit point espérer de séparer nettement ce que la nature a réuni. Princip. de littér. (D. J.)

REGRET, s. m. REGRETTER, v. act. (Gram.) le regret est un souvenir pénible d’avoir fait, dit ou perdu quelque chose. Il semble pourtant que le remors soit d’avoir commis un mal, & le regret d’avoir perdu un bien. Ainsi tout le monde est exposé à avoir des regrets ; mais il n’y a que les coupables qui soient tourmentés de remors. Les choses qu’on regrette le plus, sont celles auxquelles on attache le plus de valeur, l’innocence, la santé, la fortune, la réputation. Les remors sont quelquefois utiles, ils inclinent le méchant au repentir. Plus souvent encore les regrets sont superflus, ils ne réparent pas la perte qui les a occasionnés. Les regrets sont un hommage que les vivans rendent à la vertu des morts. A quoi sert le regret du tems perdu ? On regrette indistinctement une bonne & une mauvaise chose. Il y eut des hommes qui regretterent la perte de l’imbécille Claude. Les Israélites regrettoient dans le désert les oignons de l’Egypte. Il y a peu d’objets vraiment regrettables. Le regret marque toujours du malheur, ou de l’imprudence.

REGUINDER, v. n. (terme de Fauconnerie.) ce mot se dit de l’oiseau qui fait une nouvelle pointe au-dessus des nues. Trévoux. (D. J.)

RÉGULARITÉ, s. f. (Gramm.) qualité relative à un ordre naturel ou de convention, & à des regles établies. On dit la régularité de la conduite, d’un bâtiment, d’un poëme. La régularité des mouvemens célestes. Ces moines sont restés dans la régularité.

RÉGULATEUR, s. m. (Horlog.) les Horlogers entendent par ce mot, le balancier & le spiral dans les montres ; la verge & la lentille dans les pendules. Ils disent aussi force réglante, parce que c’est le moyen de regler ces machines. Mais pour définir le régulateur d’une maniere plus générale, je crois qu’il faut le considerer en horlogerie, comme le principe de la force d’inertie en Physique ; c’est par l’inertie qu’un corps persévere dans son état de repos ou de mouvement. C’est aussi par sa propriété de persévérance dans le mouvement, que le régulateur produit son effet. La force d’inertie sur le régulateur s’oppose à la force motrice qui l’anime ; c’est elle qui la modere, retarde & regle. Elle lui fait, en quelque sorte, équilibre.

Le régulateur peut être examiné sous trois points de vue : comme on peut voir, article Frottement, Horlogerie.

Puisque c’est du régulateur que dépend la mesure du tems, il faut qu’il ait en lui-même un principe, une cause constante du mouvement, tirée de sa nature même, & cependant distincte de la force motrice qui l’anime, ou qui l’entretient en action. C’est la pesanteur qui agit toujours par une loi constante, & qui imprime le mouvement à tout corps suspendu à l’extrémité d’une verge ou d’un fil oblique à l’horison, & abandonné à lui même. Ce corps, tiré de la verticale, par quelque cause que ce soit, tend à y revenir. La gravité l’y ramene & le chasse de l’autre côté de la ligne de repos à la même hauteur d’où il étoit descendu ; & cette cause agissant dans la se-

conde oscillation, comme elle a agi dans la premiere,

elle perpétuera sans fin les oscillations, si rien ne s’y oppose. Mais le milieu est résistant, & le point de suspension éprouve du frottement. Les oscillations doivent donc diminuer d’étendue, & à la longue, le corps s’arrêter. Voilà la raison qui contraint à recourir à quelque méchanisme capable de restituer à chaque oscillation, les petites quantités de mouvement perdues ; & c’est par ce méchanisme, qu’on appelle échappement, que la force motrice s’exerce sans cesse sur le régulateur, & l’entretient dans sa premiere énergie.

Les Géometres ont trouvé la loi selon laquelle la pesanteur agit, & déterminé la durée des oscillations des corps suspendus à des hauteurs quelconques, quels que soient d’ailleurs leurs figures. Vous y apprendrez aussi tous les moyens de varier à discrétion la figure & le mouvement d’un régulateur livré à l’action de la pesanteur. Après avoir fixé la durée des oscillations d’un corps qui parcourt des espaces égaux en des tems égaux, on a donné l’équation d’une courbe où en des tems égaux, un corps mû parcourt des espaces très-inégaux ; & celle où les espaces parcourus le sont, le plus vîte qu’il est possible. Voyez les articles Cycloïde & Brachistocrone.

Il suit de leurs recherches qu’un corps quelconque qui tombe par une chute libre en vertu de la pesanteur, emploie une seconde de tems à parcourir 15 piés, & que le même corps attaché à un fil de trois piés huit lignes & demie, emploie pareillement une seconde à achever une de ses oscillations. C’est delà qu’il faut partir pour trouver la durée des oscillations des pendules de différentes longueurs.

Si la pesanteur fournit le meilleur régulateur pour les pendules ; il n’en est pas de même pour les montres ; car la pesanteur exige que la machine soit fixe. Sans cette condition, l’agitation détruiroit une partie de l’effet, & altéreroit l’action du régulateur. Cet inconvénient ne permet donc pas d’appliquer indistinctement la pesanteur à toutes les sortes de machines à mesurer le tems. On lui substitue dans les montres des balanciers ronds & placés en équilibre sur eux-mêmes. Dans les commencemens de l’art d’Horlogerie, le régulateur des montres n’étoit qu’un petit balancier leger, & dont la masse faisoit toute la puissance réglante. C’est sur la fin du dernier siecle que M. Huyghens appliqua le ressort spiral au balancier. Voilà l’époque de la perfection des montres. Sans entrer dans le détail des différentes manieres dont l’application s’en est faite ; il suffira de l’envisager d’une maniere générale & analogue au régulateur des pendules. L’élasticité n’est pas moins une loi constante de la nature que la pesanteur. C’est l’élasticité qui remplace cette derniere force dans les montres. & qui fait vibrer le balancier. Mais pour se former du balancier & de son spiral quelqu’idée distincte, on peut comparer leur mouvement à celui d’une corde élastique tendue. Tirez, par quelque moyen, cette corde de son état de repos, vous la ferez vibrer ; après s’être écartée de la ligne horisontale, elle y reviendra pour la passer encore ; & elle continueroit sans fin, si rien ne tendoit à diminuer l’étendue de chaque vibration. Mais le milieu résistant, qui finit par arrêter le pendule, animé par la gravité, à la ligne verticale ou de repos, finit aussi par arrêter la corde vibrante à la ligne horisontale ou de repos.

Les géometres qui ont déterminé les lois des corps oscillans, ont aussi déterminé celles des cordes vibrantes, & l’on sait que les vibrations des cordes tendues sont d’autant plus promptes, que ces cordes sont plus légeres & plus courtes, & que les forces ou poids qui les tendent sont plus grands ; & réciproquement que leurs vibrations sont d’autant plus lentes qu’elles ont plus de masse, de longueur, & que