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acide vitriolique, qui par la maturité du fruit, forme le sel essentiel, pour devenir ensuite successivement par la fermentation acide du vinaigre ; ou s’il est avant, comme après la maturité & la fermentation, la même espece d’acide, la découverte de sa nature seroit de la plus grande importance pour conduire à une théorie lumineuse de la fermentation inconnue jusqu’à present, & pour démontrer la transmutation des acides ; ce ne seroit point un travail long, fatiguant, ni compliqué. Former avec le verjus & les alkalis des sels neutres, les faire crystalliser, les reduire à leur ordre, feroit la plus grande partie de l’ouvrage : enfin le regne animal fournit dans les fourmis, suivant Juncker, dans tous les insectes à aiguillon, & suivant Pott, dans presque toutes les parties des animaux, un acide peu connu.

Les acides ont des proprietés médicinales qui leur sont communes ; étant concentrés, ils gangrenent & cautérisent les chairs & les os sur lesquels on les applique, ils procurent l’exfoliation de ces derniers, ce qui les rend des poisons pris intérieurement ; mais fondus dans une grande quantité d’eau, ils sont rafraîchissans, répercussifs, ils ont la vertu de ralentir le mouvement du sang, d’éteindre la soif, humecter les fluides, relâcher même tous les solides ; ils conviennent donc dans les cas où il faut moderer la fievre, & les efforts trop grands de la nature : aussi les médecins les emploient dans l’altération, lorsque la langue est seche, le pouls fort, lorsque quelque partie du corps, sans être affoiblie, est enflammée, ou bien entrainée dans des mouvemens convulsifs ; on les mêle dans les fievres malignes avec les cordiaux ; ils augmentent la transpiration, donnés dans les cas précédens, quand elle est supprimée par le défaut de secrétion que causent la contraction des solides, & le mouvement trop rapide du sang ; ils l’éteindroient au-contraire, & même avec la vie, s’ils étoient donnés dans les cas de foiblesse ; ils sont des diurétiques relâchans, indiqués dans les cas d’inflammation des reins, ou de la vessie, telle que la procurent souvent les mouches cantharides prises intérieurement, ou même appliquées extérieurement en trop grande quantité ; ils doivent être mis en usage comme legers astringens, & comme tempérans, dans les différentes hémorragies, si on excepte l’hæmophthisie, parce que éxcitant la toux, arrêtant la transpiration des bronches, la secrétion des crachats, ils pourroient augmenter l’engorgement ; c’est par ces raisons qu’ils sont contre-indiqués dans les inflammations de poitrine, & si on s’en sert, ce ne doit être que par les raisons les plus fortes, pour courir au mal le plus pressant : leur vertu d’arrêter la transpiration, & de ralentir le mouvement du sang, se manifeste à tout le monde, par l’usage qu’on en fait dans les grandes chaleurs ; ils arrêtent outre cela la digestion, & pris en trop grande quantité ou sans besoin, ils causent des rhumes, ou les aggravent ; dans les fievres bilieuses, caractérisées par la couleur des urines, des selles, de la langue, & par l’altération, ils sont du plus grand secours, eux seuls peuvent guérir, mêlés avec quelques évacuans, & nous les préférons de beaucoup dans ces cas à la saignée, parce qu’ils n’affoiblissent pas comme elle, que leur usage est plus long & moins accablant pour le moment ; tous les bilieux s’en servent utilement ; ils sont encore d’un usage fréquent contre les vers, on les mêle dans ce dessein avec les remedes doux, pour en rendre la boisson plus agréable, & la vertu anthelmintique plus sûre.

Leur usage économique, & celui qu’ils ont dans les arts, reviennent à tout moment ; mais si nous voulions entrer dans ces détails, ce seroit un ouvrage trop immense que nous entreprendrions.

Nous divisons les acides en deux ordres, le pre-

mier comprend les quatre acides simples, le second

ne renferme jusqu’à present, que l’eau régale, acide composé.

Ordre I. Les acides simples. Les acides, que nous appellons simples, ne sont le produit d’aucun mélange apparent ; il en est quatre genres, le vitriolique, le nitreux, le marin, & le végétal, dans le détail desquels nous allons entrer.

Genre I. L’acide vitriolique. Voyez sous l’article Vitriol, acide vitriolique.

Genre II. L’acide nitreux. Voyez Acide nitreux, sous le mot Nitre.

Genre III. L’acide marin. Voyez Acide marin, sous le mot Sel marin.

Genre IV. L’acide végétal. Voyez Végétal, acide.

Ordre II. Les acides composés. Nous nommons ainsi les acides qui ne sont point composés de parties tout-à-fait semblables, mais qui sont le résultat du mêlange de plusieurs acides. Il est possible d’en former plusieurs especes, quoique nous doutions que tous les acides pussent assez bien se mêler, pour devenir des menstrues nouveaux, nous n’en trouvons qu’un connu, c’est l’eau régale. L’acide sulphureux ne nous a point paru différer assez de l’acide vitriolique, pour qu’il en fût fait mention séparément. Voyez Régale (eau).

Classe II. Les alkalis. Les alkalis ont des propriétés bien différentes des substances que nous venons de quitter, quoique leur nature approche fort l’une de l’autre ; au sentiment des chimistes modernes, qui pensent que les acides entrent pour beaucoup dans la composition des alkalis.

On divise ceux-ci en fixes & en volatils ; les fixes sont ceux qui exposés au feu le plus violent, se fondent sans se dissoudre dans l’air, tandis que les volatils s’évaporent, quelque foible qu’en soit la température. Il ne paroît cependant pas qu’ils different beaucoup entre eux ; un peu de phlogistique nous paroît en faire toute la différence. Trouver le moyen de le donner à l’alkali fixe, c’est trouver celui de le rendre volatil. Il est hors de doute que par la fermentation putride, la nature opere ce changement évident dans la putréfaction de l’urine. L’art en composant le foie de soufre, volatilise également les alkalis fixes ; puisque ces deux substances chacune séparément sans odeur, étant unies, en donnent une fort desagréable & tout-à-fait volatile, qu’il seroit possible & avantageux de rassembler dans un chapiteau.

Les principales propriétés des alkalis sont de faire une vive effervescence en se mêlant avec les acides, de composer avec eux des sels neutres, de décomposer les autres sels, de verdir le sirop violat & toutes les couleurs bleues des végétaux ; ils ont une saveur âcre & piquante ; les anciens chimistes prenoient pour un combat & une antipathie l’effervescence qui résulte du mélange des acides & des alkalis. Actuellement l’opinion contraire a prévalu, & cette effervescence est reconnue pour un effet de la ressemblance, de l’accord qui semble être entre deux substances qui s’unissent avec vivacité : c’est ce qu’on nomme affinité ou rapport. Voyez Rapport, Chimie.

Nous rappellerons que les alkalis ont plus d’affinité avec l’acide vitriolique qu’avec le nitreux, le marin, & le végétal ; avec ceux-ci qu’avec le soufre & les huiles : mêlés à cette derniere espece de substance, ils forment les savons les plus aisés à faire, les plus connus, & les seuls en usage.

Les alkalis sont, comme nous l’avons dit, fixes, ou volatils ; on ne connoît pas plusieurs genres de volatils, mais il y en a trois de fixes, dont les propriétés sont comme nous le verrons différentes. Le premier est l’alkali terreux, le natrum ; le second est l’alkali marin, la soude ; le troisieme est l’alkali du