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sur ses biens par préférence aux créanciers de l’héritier, soit qu’ils fussent antérieurs ou postérieurs en date.

Mais en France les créanciers de l’héritier peuvent aussi demander la séparation des biens de leur débiteur d’avec ceux du défunt, pourvu que l’héritier n’ait pas encore reconnu la dette, ou que le titre n’ait pas été déclaré exécutoire contre lui.

Cette séparation chez les Romains devoit être demandée dans les cinq ans ; mais parmi nous l’action dure trente ans. Voyez au ff. le tit. de séparat. & Cujac. ibid. & leg. penult. cod. de heredit. act. Bouvot, le Prêtre, Boniface, Loysel, Bacquet, Henrys. (A)

Séparation, (Chimie.) Il est dit à l’article Chimie, p. 417, col. premiere, que la chimie s’occupe des séparations & des unions des principes constituans des corps ; que les deux grands changemens effectués par les opérations chimiques, sont la séparation & l’union des principes ; que la séparation chimique est encore connue dans l’art sous les noms d’analyse, de composition, corruption, solution, destruction, diacrese, ou plutôt diacrise ; que de ces noms les plus usités parmi les chimistes, les françois sont ceux d’analyse & de décomposition.

Quoique les affections des corps aggrégés n’appartiennent pas proprement à la chimie ; & qu’ainsi strictement parlant elle ne s’occupe que de celle des corps unis chimiquement ; cependant, comme plusieurs de ses opérations ont pour objet au-moins secondaire, préparatoire, intermédiaire, &c. la disgrégation ou séparation des corps aggrégés, la division méthodique des opérations chimiques qui appartiennent à la séparation, doit se faire en celles qui décomposent des corps unis chimiquement, & celles qui ne séparent que les parties des corps aggrégés. Aussi avons-nous admis cette division. Voyez l’article Opérations chimiques.

Les deux instrumens généraux de la séparation chimique proprement dite sont le feu & la précipitation. Voyez Feu, Chimie, & Précipitation, Chimie ; c’est pourquoi il est dit dans ce dernier art cle que toutes les opérations de l’analyse menstruelle (or, analyse est synonyme à séparation) sont des précipitations.

Les séparations disgrégatives s’operent, & par les instrumens chimiques proprement dits, savoir, le feu & les menstrues, & par divers instrumens méchaniques, des limes, des rapes, des mortiers, &c. Voyez l’article Opérations chimiques. (b)

Séparation ou départ par la voie seche, (Métallurgie, Chimie & Arts.) c’est une opération par laquelle on cherche à séparer une petite quantité d’or mélée dans un grand volume d’argent, de maniere que l’or se précipite au fond du creuset & se dégage par son propre poids de l’argent que l’on réduit en scories par l’action du feu.

On a vu dans l’article Départ la maniere dont l’or, qui est uni avec de l’argent, s’en séparoit à l’aide des dissolvans humides. V. Départ, Inquart, Quartation, &c. Nous allons faire voir dans cet article comment cette séparation s’opere par la voie seche, c’est-à-dire, à l’aide du feu.

Un grand nombre de livres sont remplis de méthodes & de recettes pour faire la séparation par la voie seche ; mais lorsqu’on vient à vérifier ces procédés, on trouve que la plûpart sont fautifs ou inintelligibles. Parmi ceux que l’on a eu occasion de connoître, on n’en a point trouvé de mieux décrits que celui que M. de Justi, célebre chimiste allemand, a inséré dans ses œuvres chimiques, publiées en allemand en 1760 : on a donc cru devoir le rapporter ici en entier, il servira à faire connoître le progrès que cette opération pénible a fait jusqu’à présent.

La matiere qui contribue le plus à la séparation de

l’argent d’avec l’or est le soufre ; cette substance s’unit avec l’argent qu’elle attaque, sans avoir la moindre action sur l’or, qui par-là se dégage de l’argent, & forme un régule à part au fond du creuset. Lorsque cette séparation se fait en grand, on n’obtient jamais un régule ou culot d’or pur, & l’on est très content lorsque la masse reguline est composée de trois parties d’argent contre une partie d’or. Cela vient, suivant M. de Justi, de ce que pour ménager les creusets, on en tire le métal fondu avec des cuilleres, ou bien on le vuide dans des cônes ou des creusets pointus, ce qui ne peut guere se faire assez promptement pour qu’une portion du métal ne se refroidisse pas, alors la matiere n’est point assez fluide, & l’or en coulant entraîne avec lui une portion considérable de l’argent. Voici un procédé par lequel M. de Justi assure avoir obtenu l’or en une masse réguline assez pure ; il prit un demi-marc d’argent qui contenoit de l’or, il le mit en grenaille, & après en avoir fait l’essai avec exactitude par la coupelle & par l’eau-forte, il trouva que la masse d’argent tenoit quatre grains d’or. Il mit cet argent en grenaille en cémentation avec du soufre dans un creuset couvert & bien lutté ; & lorsque l’argent eut été bien pénétré par le soufre, il en fit la précipitation, en y mettant du flux noir, du fiel de verre, de la limaille de fer & de la litharge. Après que le tout fut entré parfaitement en fusion, il laissa refroidir le creuset. Alors il cassa le creuset, & il trouva au fond de la masse d’argent, un petit bouton ou culot d’or, qui avoit la couleur de l’or qui est allié avec de l’argent ; sa petitesse empêchoit qu’on ne pût le séparer parfaitement de l’argent, néanmoins M. de Justi, en se donnant beaucoup de peine, en détacha 3 grains, il en étoit resté environ un demi-grain uni avec l’argent. A l’essai, il trouva que cet or étoit à 20 karats. Ayant réitéré cette expérience, il eut le même succès. Ce savant chimiste ne doute pas que cette expérience ne réussît encore mieux en grand, & il croit que ceux qui s’occupent du travail de la séparation ou du départ par la voie seche dans les monnoies, feroient mieux de ne point tant regarder à la dépense du creuset qu’il faudroit briser, qu’à ce qu’il en coute pour multiplier les séparations afin de faire ensorte que les régules contiennent trois parties d’argent contre une partie d’or, pour en faire ensuite le départ avec l’eau-forte. En effet, il paroît que l’on épargneroit beaucoup de charbon & les frais de l’eau-forte en suivant le procédé qui a été rapporté, ce qui seroit profitable, surtout si l’on peut se procurer des creusets à un prix raisonnable. D’ailleurs, on n’auroit qu’à purifier l’or ; qu’on a dit être à 20 karats, en le faisant fondre avec l’antimoine.

On suit deux routes principales pour opérer la précipitation dans la séparation par la voie seche. Les uns se servent du flux noir, & d’autres sels ou substances alkalines, telles que le fiel de verre, pour servir de précipitant ; d’autres rejettent cette méthode, & se servent du fer pour cette précipitation. Il y a à Leipsick deux familles qui depuis plusieurs années sont en possession du secret de faire la séparation ou le départ par la voie seche, elles se servent de deux méthodes différentes. La premiere de ces familles, qui est celle de Pfanenschmidt, se sert principalement du fer pour la précipitation, sans employer de fondans alkalins. La seconde famille, qui est celle de Stole, se sert de fondans alkalins pour la même opération. Ces deux méthodes sont connues en Allemagne sous le nom des deux familles qui les exercent.

M. de Justi examine laquelle de ces deux méthodes mérite d’être préférée. Pour cet effet, il faut faire attention à deux choses ; 1°. à ce qui rend l’opération plus facile ; 2°. à ce qui la rend moins couteuse. Il n’est pas douteux que les alkalis fixes, tels