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du crâne, quand il commence à acquérir une certaine épaisseur, les sutures y doivent paroître moins considérables qu’à sa surface externe.

Voilà donc déja les dents moins longues, & les échancrures moins profondes à la table interne qu’à l’externe ; mais il faut encore quelque chose de plus, car avec l’âge les échancrures se remplissent entierement à la table interne, & les dents y disparoissent entierement.

Lorsque les os de la calote du crâne commencent à se presser réciproquement, par l’augmentation de leur étendue, la partie de la pointe des dents, qui appartient à la table interne, pressée contre les échancrures de l’os opposé, trouve moins de résistance vers la substance spongieuse du diploë, que contre la table interne des échancrures où ces dents sont engagées ; cette partie de la pointe des dents qui appartient à la table interne, se dirigera donc vers le diploë : le peu d’épaisseur de la table interne rend cette détermination facile ; la table interne de la dent, en se portant ainsi vers le diploë, forme un talus, & perd le niveau du dedans du crâne ; mais la table interne du fond de l’échancrure, en profite bientôt, en s’avançant sur le talus de la dent opposée, & elle s’y avance d’autant plus, que les os faisant plus d’effort les uns contre les autres vers leur surface concave qu’ailleurs, y sont plus disposés à s’étendre vers les endroits où il se trouve une diminution de résistance.

Voilà donc en même tems deux nouvelles causes qui contribuent à effacer les sutures du dedans de la calote du crâne. 1°. Toute la pointe des dents qui se releve vers le diploë, cesse de paroître en dedans du crâne. 2°. La table interne qui s’avance du fond de chaque échancrure, diminue la longueur des dents du côté de leur racine, ainsi par ce double moyen, peu-à-peu & avec le tems, les dents se trouvent effacées au-dedans du crâne, il n’y paroit plus de figure, & l’union des os ne se fait appercevoir que par des lignes.

Les dents qui composent les sutures, ne sont pas toutes de la même longueur : les petites dents qui ne sont séparées que par de petites échancrures, disparoissent les premieres ; plusieurs dents d’une longueur inégale, placées à côté les unes des autres, se confondent, & n’en font plus qu’une d’une largeur considérable, lorsque les interstices qui les séparent, sont remplis. Il se trouve encore des dents beaucoup plus longues que les autres : celles-ci disparoissent plus tard, ou ne disparoissent même jamais entierement. Toutes ces inégalités donnent à l’union des os en dedans du crâne, la figure de lignes irrégulieres.

Lors donc qu’il ne paroît point de dents à la surface concave du crâne, cela ne se fait pas, pour empêcher, comme on le dit ordinairement, que la dure-mere ne soit blessée dans les cas de fracture, ou d’enfoncement à l’endroit des sutures ; mais c’est par une suite nécessaire de la conformation des os du crâne, & de sa figure.

C’en est assez pour ce qui concerne les sutures vraies ou dentelées : la différence qui se trouve entre elles, & les sutures fausses ou écailleuses, montre que leurs usages doivent être différens. Dans l’une, les os s’unissent par le moyen des avances & des enfoncemens qui sont à leurs bords : dans l’autre le bord d’un os est appliqué sur le bord d’un autre os, & pour s’ajuster ainsi, ils sont tous les deux taillés en bizeau. Presque tous les anatomistes ont ou proposé des raisons de cette différence, ou ont adopté quelques-unes des raisons qu’on avoit proposées avant eux ; cependant en les examinant toutes, il paroît qu’on n’en a point encore trouvé de suffisantes, à l’exception de celle que propose M. Hunauld, dans les mêmes

mémoires de l’acad. des Sciences, an. 1730. (D. J.)

Suture, terme de Chirurgie, couture que l’on fait aux plaies, pour en tenir les levres approchées, afin que le suc nourricier puisse les réunir. Voyez Plaies.

Les sutures ne sont pas le seul moyen que la chirurgie emploie pour maintenir les bords d’une plaie dans le contact mutuel qui est nécessaire pour leur consolidation. Voyez Réunion. on a beaucoup abusé en chirurgie de l’opération de la suture, comme M. Pibrac l’a démontré dans une excellente dissertation, insérée au troisieme tome des mémoires de l’académie royale de Chirurgie.

Les scholastiques distinguent plusieurs especes de sutures, qui se réduisent à l’entrecoupée dont nous allons parler dans cet article ; à l’enchevillée qui convient aux plaies pénétrantes du bas ventre, voyez Gastroraphie ; à l’entortillée qui sert aux plaies des levres, voyez Bec de lievre ; & à la suture du pelletier, dont on prescrit l’usage pour les plaies des intestins : Voyez Plaies des intestins. Les trois premieres ont été appellées sutures incarnatives, & elles se font à points séparés ; la derniere se nomme restrinctive, parce qu’elle s’oppose à l’issue des matieres contenues dans le canal intestinal ; cette suture se fait à points continus, en surjettant le fil, comme les pelletiers font en cousant les peaux.

Quoique la réunion soit l’indication générale que donne la cure des plaies, il y a des cas où il ne faut point mettre en usage les moyens de la procurer. Telles sont 1°. les plaies soupçonnées d’être venimeuses, parce qu’il est à propos de donner issue au venin, & de faire pénétrer les remedes dans l’intérieur des parties où il s’est insinué. 2°. Les plaies accompagnées de grandes inflammations, ne permettent pas l’usage des sutures, parce que les points d’aiguilles augmenteroient les accidens ; mais on peut se servir des autres moyens unissans, s’ils peuvent avoir lieu. 3°. Les plaies contuses devant nécessairement suppurer, ne peuvent point être réunies, non plus que celles où il y a une déperdition de substance, qui empêche l’approximation des bords de la plaie. 4°. on ne réunit point les plaies qui pénétrent dans l’intérieur de la poitrine. Voyez Plaies de poitrine. 5°. Les plaies où il y a des gros vaisseaux ouverts, n’indiquent point la réunion : car il faut faire des ligatures, & comprimer l’orifice des vaisseaux ouverts ; ces cas, loin de permettre la réunion, exigent au-contraire fort souvent qu’on fasse des incisions pour découvrir le vaisseau blessé. Voyez Anevrisme faux.

Dionis, après plusieurs auteurs plus anciens, a cru que l’on ne devoit point réunir les plaies où les os sont découverts, à cause des exfoliations qu’il en faut attendre. Ce précepte ne doit pas être pris à la rigueur : on ne doit le suivre que quand les os découverts sont alterés : car s’ils sont simplement découverts, ou même divisés par un instrument tranchant, en approchant les parties nouvellement divisées, on les préservera de l’impression de l’air qui est nuisible aux os découverts ; & les sucs nourriciers des parties divisées & rapprochées, fournira le baume le plus convenable pour leur réunion. On pourroit appuyer la pratique de réunir les plaies avec division des parties osseuses, sur un grand nombre de faits ; nous avons entre autres une observation communiquée à l’académie royale de Chirurgie, par feu M. de la Peyronie, son président, qui est très-concluante sur ce point de l’art. Un homme reçut obliquement un coup d’instrument tranchant sur la partie extérieure & moyenne du bras ; l’os en fut coupé net avec les muscles & les tégumens qui le couvroient, ensorte que ce bras ne tenoit qu’à une bande de peau de la largeur d’un pouce, sous laquelle étoit le cordon des vaisseaux. M. de la Peyronie tenta la réunion, bien per-