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Angleterre, la longueur de ces tigerons est si petite que par l’attraction l’huile qu’on met aux pivots, monte dans les pignons, ou s’extravase contre les roues. Parmi plusieurs habiles horlogers qui s’apperçurent de cet inconvénient, M. Gaudron fut un des premiers qui avança, que si on pouvoit mettre une bouteille d’huile à chaque pivot d’une montre, elle en conserveroit plus long-tems sa justesse. M. Suly qui saisit cette idée, imagina de petits reservoirs, (Voyez la regle artificielle du tems, pag. 280.) qui fournissoient de l’huile aux pivots à mesure qu’elle s’évaporoit. Cette méthode entraînant après elle une grande multiplication d’ouvrage, & plusieurs inconvéniens, M. le Roy eut recours à un autre expédient, dont la lecture de l’optique de M. Newton lui fournit l’idée. En refléchissant sur l’expérience que ce grand homme rapporte, pag. 576, du livre dont nous venons de parler : M. le Roy raisonna ainsi. « Les pivots sont placés aux extrémités des arbres ; ces arbres sont perpendiculaires aux platines qui les soutiennent, & concourent avec elles vers un même point, sommet de l’angle qu’ils font entre eux. Leur disposition étant semblable à celle des glaces dans l’expérience de Newton, ils sont comme elles susceptibles des mêmes causes d’attraction. Ainsi l’huile devroit se tenir à leur point de concours, par conséquent aux pivots. Si donc l’huile, dans les montres ordinaires, quitte les pivots pour monter dans les pignons, cet effet ne peut être produit que par la convergence de leurs aîles, au moyen de quoi ils attirent le fluide avec plus de force que les points de concours de la tige & des platines : donc pour entretenir une suffisante quantité d’huile à ce point & aux pivots, il faut en éloigner suffisamment les pignons ». L’expérience a parfaitement confirmé ce raisonnement ; car M. le Roy ayant placé dans les montres, des barettes aux endroits convenables, pour alonger ces tigerons, & éloigner les pignons & les roues des pivots ; & dans le cas où on ne pouvoit faire usage de ces barettes, y ayant suppléé par des creusures ou des noyons, il a eu la satisfaction de voir que l’huile restoit constamment aux pivots & aux portées, sans monter dans les pignons, ni s’extravaser comme ci-devant. Voyez Barette, Creusure, Noyon &c.

Comme il est d’une extrème conséquence que le balancier soit toujours parfaitement libre, & que ses pivots, au-lieu de s’appuyer sur leurs portées, frottent sur leurs extrémités ; il a fallu pour leur conserver aussi de l’huile, chercher une nouvelle configuration de parties. M. le Roy en a trouvé une des plus avantageuses & des plus simples.

Pour s’en procurer une idée juste, on prendra une montre, on mettra une goutte d’huile sur le milieu de son crystal ; on posera ensuite dessus un corps plan transparent, un morceau de glace par exemple, alors on verra la goutte se disposer circulairement au sommet du crystal ; on verra aussi qu’en élevant la glace, cette goutte se rétrecira, sans néanmoins quitter prise.

Afin de produire l’effet résultant de cette expérience, M. le Roy met sur le coq de ses montres, trois petites pieces fort aisées à faire ; l’inférieure qu’on nomme le petit coq de laiton, Voyez Petit coq, fait l’effet du crystal ; la supérieure, c’est-à-dire le petit coq d’acier, tient une petite agate, comme la main tient la glace dans l’expérience, & le bout du balancier venant s’appuyer au centre de l’agate, il est toujours abondamment pourvu d’huile. A l’égard de l’autre pivot, une seule piece qu’on nomme lardon, Voyez Lardon, suffit, la potence faisant l’office des deux autres. On peut consulter à ce sujet, un mémoire que M. le Roi a inséré à la suite de la re-

gle artificielle du tems ; il le conclut en disant : « que

mieux les Horlogers, & en général tous les Méchaniciens, sauront faire usage de l’attraction de cohésion, en configurant les parties de leurs ouvrages pour y fixer l’huile aux endroits nécessaires, plus en même tems ils approcheront de la perfection ».

TIGETTE, s. f. (Archit.) c’est dans le chapiteau corinthien, une espece de tige ou cornet, ordinairement cannelé, & orné de feuilles, d’où naissent les volutes & les hélices. (D. J.)

TIGIS, (Géog. anc.) ville de Mauritanie césariense, selon Ptolomée, l. IV. c. ij. L’itinéraire d’Antonin la marque sur la route de Rasuceurum à Badil, à douze milles du premier de ces lieux, & à vingt-sept du second. Peut-être est-ce cette ville dont le siege épiscopal est appellé Tigisitanus, dans la conférence de Carthage.

TIGNIUM, (Géog. anc.) ville d’Italie dans le Picenum, selon César, de bell. civil. l. I. c. xij. Ciacconius a fait voir qu’il falloit lire Iguvium, au lieu de Tignium. On croit que c’est aujourd’hui S. Maria in Georgio. (D. J.)

TIGNOLLE, s. f. terme de Pêche, petit bateau fait de trois planches seulement.

TIGRANOCERTE, (Géog. anc.) ville de la grande Arménie, bâtie par le roi Tigrane, du tems de la guerre de Mithridate ; ce qui fait qu’Appien en décrivant cette guerre, appelle Tigranocerte une ville toute nouvelle.

Elle étoit située au-delà des sources du Tigre, en tirant vers le mont Taurus ; & selon Pline, l. VI. c. ix. sur une haute montagne dans la partie méridionale de l’Arménie. Tacite, Ann. l. XV. c. v. la met à 37 milles de Nisibis. Tigranocerta dans la langue du pays, veut dire la ville de Tigrane. Elle étoit fortifiée & défendue par une bonne garnison ; Plutarque ajoute que c’étoit une belle ville, & puissament riche.

Le mot Tigranocerta est du genre neutre, selon Etienne le géographe ; Appien cependant le fait du genre féminin, & Tacite l’emploie aux deux genres : ce n’est pas là le plus important.

Tigranocerte étoit une ville sur l’Euphrate, que Tigrane avoit eu la fantaisie de peupler aux dépens de douze autres villes, dont bon gré malgré il avoit transféré les habitans dans celle-là. Tous les grands de son royaume, pour lui plaire, y avoient bâti des palais. Tigrane en vouloit faire une ville comparable à Babylone, & cela étoit bien avancé ; mais Lucullus ne lui donna pas le tems de s’achever : car après avoir pris & saccagé Tigranocerte, il en fit une solitude, renvoyant les habitans dans leur ancienne demeure, ce qui convenoit à tous ces divers peuples, qui soupiroient après leur patrie.

Cette grande ville étoit peuplée de grecs & de barbares. La division se mit parmi eux ; Lucullus en sut profiter, il fit donner l’assaut, prit la ville, & après s’être emparé des trésors du roi, il abandonna Tigranocerte à ses soldats, qui avec plusieurs autres richesses, y trouverent huit mille talens d’argent monnoyé, c’est-à-dire vingt-quatre millions ; & outre le pillage, il donna encore à chaque soldat quatre cent drachmes sur le butin qui y fut fait. (D. J.)

TIGRE, s. m. (Hist. nat. Zoolog.) tigris, Pl. III. fig. 1. animal quadrupede, un peu plus petit que le lion ; il a les oreilles courtes & arrondies, & la queue longue comme celle du lion. Son poil est court & de couleur jaune, avec des taches noires & longues. Le tigre se trouve en Asie & en Afrique ; il est très féroce.

Il y a plusieurs especes d’animaux auxquels on a donné le nom de tigre. Celui qui ressemble le plus au vrai tigre, est l’animal nommé tigre royal. L’animal