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y les réflexions suivantes du chancelier Bacon.

L’examen des causes finales est, dit-il, plus dans l’ordre de la Morale que de la Physique, qui s’appauvrira toutes les fois qu’elle voudra étudier les faits dans les motifs, & qu’au lieu de s’informer comment la nature opere, elle demandera pourquoi. Cette curiosité, qui vient d’une inquiétude naturelle de l’esprit, & de son penchant secret à franchir les limites, peut avoir sa place, mais à la suite de toutes les autres questions. La Providence nous permet de suivre ses voies pour les adorer, mais non pas d’approfondir ses vues. Elle se plaît à faire sortir du cours de la nature des événemens inopinés, où tous nos jugemens vont échouer ; & par ces routes secretes qui la dérobent à nos yeux, elle devient plus respectable encore sous le voile du mystere, que si elle avoit marqué dans tous ses pas les desseins de sa sagesse.

C’est à son exemple que les maîtres de la terre ont besoin de se rendre quelquefois invisibles pour conserver leur majesté ; plus admirables, quand ils font naître le bonheur & la tranquillité publique de l’orage des brigues & des passions, que s’ils faisoient ouvertement tout plier sous le poids de leur autorité. Aussi les matérialistes qui n’ont point apperçu les traces d’une intelligence supérieure dans le gouvernement de l’univers, d’ailleurs connoissoient mieux la nature que la plûpart des autres philosophes, qui voulant suivre la marche de la Providence, lui prêtoient des contradictions indignes.

Comme l’homme est porté à se croire le plus parfait de tous les êtres, il se croit aussi la cause finale de toute création. Les philosophes, réputés orthodoxes dans tous les siecles, ont enseigné que le monde a été fait pour l’homme, la terre pour son habitation, & tous les corps lumineux pour lui servir de spectacle. Les rois n’en font pas tant, lorsqu’ils s’imaginent être la cause finale pour laquelle toutes les sociétés ont été formées, & les gouvernemens institués. (D. J.)

TELEPHIEN, adj. terme de Chirurgie ; ulcere dont la guérison est difficile. Voyez Ulcere.

Ce mot vient de Teléphe, qui avoit été blessé par Achille, & dont la plaie dégénera en un mauvais ulcere. (Y)

TELEPHIOIDES, s. s. (Hist. nat. Botan.) genre de plante à fleur en rose composée de plusieurs pétales disposés en rond. Le pistil sort du calice, & devient dans la suite un fruit arrondi & divisé en six loges, qui renferment chacune une semence de la même forme que le fruit. Tournefort, inst. rei herb. corol. Voyez Plante.

Miller en compte cinq especes, savoir le telephioides græcum, humi fusum, flore albo. Tour. Cor.

Elle a été découverte en Grece par Tournefort, qui constitua ce genre, lui donnant un nom tiré de sa ressemblance avec le véritable orpin d’imperatus. Cette plante est extrèmement rampante, & subsiste rarement plus de deux années.

La seconde espece, telephioides americanum, erectum, folio olivali, subtùs glauco, flore herbaceo, Houston, croît aux Barbades, dans la Jamaïque, & dans plusieurs autres endroits de l’Amérique.

La troisieme espece, telephioides americanum, arborescens, fructu parvo, foliis acuminatis, Houst. fut découverte à la Vera-Cruz par le docteur Houstoun, qui envoya de ses semences en Angleterre. Elle pousse une tige ligneuse à la hauteur de huit ou dix piés. Ses feuilles sont divisées en plusieurs lobes ; ses fleurs, qui sont petites & d’un verd blanchâtre, naissent sur le revers des feuilles, & sont suivies d’un petit fruit qui n’a pu mûrir jusqu’à présent en Angleterre.

La quatrieme espece, est le telephioides americanum, arborescens, foliis latis, subrotundis, subtùs incanis, fructu maximo. Houst.

La cinquieme espece, est le telephioides americanum, arborescens, foliis latioribus, subrotundis, fructu majore ex longo pediculo pendulo. Houst.

Ces deux dernieres especes furent découvertes par le même docteur Houstoun à Campêche, où elles croissent à la hauteur de douze à quatorze piés : leurs feuilles sont larges, & disposées alternativement. Le fruit de la cinquieme est gros à-peu-près comme une petite noix ; il croît sur le revers des feuilles, & est attaché à un pédicule fort long. Celui de la quatrieme est aussi gros qu’une châtaigne, & est couvert d’une coque fort dure. (D. J.)

TELEPHIUM, s. m. (Hist. nat. Bot.) genre de plante à fleur en rose composée de plusieurs pétales disposés en rond ; le calice est formé de plusieurs feuilles ; le pistil sort du calice, & devient dans la suite un fruit à trois pointes & divisé en trois capsules : ce fruit renferme des semences qui sont le plus souvent arrondies. Ajoutez aux caracteres de ce genre que les feuilles sont alternes le long des tiges. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

Tournefort compte quatre especes de telephium ou d’orpin, dont la plus commune, telephium Dioscoridis, Imperati, est nommée par les Anglois the wild-orpine. Cette plante pousse des tiges grosses, rondes, unies, souvent rougeâtres en bas : ses feuilles sont semblables à celles du pourpier, mais plus petites, blanchâtres, rangées alternativement le long des tiges, épaisses, charnues, remplies de suc, la plûpart incisées légerement en leurs bords : ses fleurs naissent au sommet des tiges en gros bouquets, ou en ombelles ; chacune d’elles est composée de plusieurs pétales disposés en rose, de couleur blanche & verdâtre : quand cette fleur est passée, il lui succede un fruit triangulaire, qui renferme des semences presque rondes : la racine du telephium ordinaire est divisée en plusieurs branches oblongues, blanches, entremêlées de fibres. Cette plante croît aux lieux rudes & pierreux. (D. J.)

TÉLESCOPE, s. m. (Optiq. & Astr.) télescope, ce mot composé des mots grecs τῆλε, loin, & σκοπεῖν, regarder, signifioit uniquement dans son origine, un instrument formé de différens verres ou lentilles ajustés dans un tube, au-travers desquels on voyoit les objets fort distans. Mais aujourd’hui, il se dit en général de tout instrument d’optique, qui sert à découvrir & voir des objets très-éloignés, soit que ce soit directement à-travers de plusieurs verres, ou par réflexion au moyen de plusieurs miroirs.

L’invention du télescope est une des plus nobles & des plus utiles dont les derniers siecles puissent se vanter ; car c’est par son moyen que les merveilles du ciel nous ont été découvertes, & que l’Astronomie est montée à un degré de perfection dont les siecles passés n’ont pas pu seulement se former une idée. Voyez Astronomie.

Quelques savans ont avancé que les anciens Egyptiens avoient l’usage des télescopes, & que d’une tour fort élevée de la ville d’Alexandrie, ils découvroient les vaisseaux qui en étoient éloignés de 600 milles ; mais cela est impossible, à-moins que ces milles n’aient été fort courts, puisque la rondeur de la terre empêche de voir de dessus une tour, un objet situé sur l’horison à une plus grande distance que 12 ou 14 milles d’Hollande, & un vaisseau à la distance de 20 milles. On doit donc regarder comme fabuleux ce qu’on rapporte sur cela des Egyptiens.

Jean-Baptiste Porta, noble napolitain, si l’on en croit Wolfius, est le premier qui ait fait un télescope, comme il paroît par ce passage de sa magie naturelle, imprimée en 1549.

« Pourvu que vous sachiez la maniere de joindre ou de bien ajuster les deux verres, savoir le concave & le convexe, vous verrez également les ob-