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vaillerent avec tant de chaleur, que les citoyens étoient à la veille de prendre les armes les uns contre les autres, quand les patriciens pour éviter ce malheur, prirent le parti de céder au peuple une des places du consulat. Sextius fut le premier des plébéiens qui en fut pourvû l’an de Rome 380, & Licinius lui succéda peu de tems après.

Quoique les tribuns de Rome ayent souvent causé de grands troubles dans la ville par leur ambition, & par l’abus qu’ils firent de leur pouvoir, Cicéron n’a pû s’empêcher de reconnoître, que leur établissement fut le salut de la république ; car, dit-il, la force du peuple qui n’a point de chef, est plus terrible, & commet toujours des désordres extrèmes. Un chef sent que l’affaire roule sur lui, il y pense : mais le peuple dans son impétuosité, ne connoit point le péril où il se jette. D’ailleurs dans une république le peuple a besoin d’un magistrat pour le défendre contre les vexations des grands ; cependant la puissance des tribuns de Rome étoit vicieuse en ce point particulier, qu’elle arrêtoit non-seulement la législation, mais même l’éxécution ; or il ne faut pas dans un état modéré, que la puissance législative ait la faculté d’arrêter la puissance exécutrice, & réciproquement. (Le chevalier de Jaucourt.)

Tribun militaire, (Hist. milit. des Rom.) officier qui commandoit en chef à un grand corps de troupes ; c’étoit une magistrature romaine, qu’il ne faut pas confondre avec ce qu’on nommoit tribun des soldats.

Varron dit qu’on leur donna le nom de tribuns, parce qu’au commencement ils étoient trois, lorsque la légion étoit composée de trois mille hommes, des trois tribus qu’il y avoit alors ; à mesure que la légion crut, on augmenta le nombre des tribuns qui furent quatre, & ensuite six. D’abord c’étoit les généraux d’armée qui les choisissoient ; mais l’an de Rome 391, il fut réglé que le peuple en nommeroit une partie, & le général une autre ; ce fut Rutilius Rufus, qui porta cette loi ; ceux que le peuple choisissoit dans les comices, s’appelloient comitiati. Ils étoient également patriciens ou plébéiens, & avoit les mêmes marques d’honneur que les consuls ; voici leur histoire en peu de mots.

Les tribuns du peuple ayant fait tous les efforts imaginables, pour obtenir que les familles plébéiennes pourroient avoir part au consulat, & les patriciens, qui se voyoient hors d’état de résister plus long-tems, ne voulant pas que le peuple pût être admis au consulat, on fit l’an de Rome 309, un réglement ratifié par un decret du sénat, par une loi du peuple, qu’à la place des consuls, on choisiroit parmi les patriciens trois tribuns militaires, & autant parmi les plébéiens, & que ces nouveaux magistrats auroient toute l’autorité des consuls pour gouverner la république, & qu’au bout de l’année, il seroit fait un sénatus-consulte pour demander au peuple s’il aimoit mieux avoir des consuls que des tribuns militaires, & qu’on se conformeroit à ses intentions. Au reste on appella ces nouveaux magistrats tribuns militaires, parce que parmi les plébéiens, ceux qui avoient exercé l’emploi de tribun, étoient les plus distingués du peuple.

Cette premiere année, il n’y eut que trois personnes nommés pour remplir cette magistrature, & ce furent trois patriciens : mais bientôt après ils abdiquerent, sous prétexte que leur élection étoit vicieuse, & on leur substitua des consuls. Dans les années suivantes on créa, tantôt des consuls, tantôt des tribuns militaires, suivant que le sénat ou le peuple avoit le dessus. Cet usage dura jusqu’à l’an de Rome 387, qu’on choisit un plébéién pour consul, & ce fut Sextius. On créa d’abord trois tribuns militaires, ensuite quatre, puis six. Tite-Live pré-

tend que l’an de Rome 347, on en élut huit, ce

qui n’étoit pas encore arrivé, mais les autres historiens n’en marquent que six ; du reste le titre que ces magistrats portoient, tribuni militum consulari potestate, fait connoître qu’ils avoient les mêmes fonctions & les mêmes marques de dignité que les consuls. (D. J.)

Tribun des celeres, (Hist. milit. des Romains.) tribunus celerum ; c’étoit l’officier qui commandoit la troupe des chevaux légers des Romains. Il fut ainsi nommé de Fabius Celer, qui eut le premier cette charge. Le tribun des celeres étoit proprement le commandant de la cavalerie, & après le roi il avoit la principale autorité dans les armées. Dans la suite, le maître de la cavalerie eut le même rang sous les dictateurs, car après l’expulsion des rois la charge de tribun des celeres fut abolie, & Plutarque même prétend que du tems de Numa, la troupe nommée des celeres n’existoit plus. (D. J.)

Tribun de soldats, (Art milit. des Rom.) officier dans l’armée ; mais il ne faut pas confondre les tribuns de soldats avec les tribuns militaires, qui furent substitués aux consuls, & revêtus de toute leur autorité. Cependant les tribuns de soldats avoient un grade honorable dans le service ; il y en avoit de deux sortes, les uns choisis par le général, & on les nommoit rufuli, & les autres élus dans les comices, par les suffrages du peuple, & ils s’appelloient comitiati. Ceux-ci furent introduits par une loi que proposerent Lucius Attilius & Caïus Martius, tribuns du peuple, sous le consulat de Marcus Valerius & Publius Decius. La fonction des tribuns de soldats étoit de contenir les troupes dans le camp, de veiller à leurs exercices, de connoître leurs démêlés, d’entendre leurs plaintes, d’avoir inspection sur leurs habits, sur leurs armes & sur les hôpitaux ; d’avoir soin des vivres, de faire des rondes, de recevoir les ordres du consul, & de les donner ensuite aux autres officiers subalternes. (D. J.)

Tribun du trésor, (Antiq. rom.) tribunus ærarii ; espece de trésorier des fonds militaires. Les tribuns du trésor étoient des officiers tirés du peuple, qui gardoient les fonds d’argent destinés à la guerre, pour les distribuer dans le besoin aux questeurs des armées. On observoit de choisir ces tribuns les plus riches qu’on pouvoit, parce que c’étoit un emploi où il y avoit beaucoup d’argent à manier ; mais Clodius, du tems de Cicéron, trouva le moyen d’en corrompre plusieurs, qu’on lui avoit nommés pour juges. (D. J.)

TRIBUNAL, s. m. (Gramm. & Jurisprud.) est le siege d’un juge, le lieu où il rend la justice. Quelquefois aussi ce terme se prend pour le corps entier des juges qui composent une jurisdiction. Quelquefois il se prend pour la jurisdiction même qu’ils exercent.

Ce terme qui est aussi latin tire son origine du nom que l’on donnoit à un siege élevé où les tribuns rendoient la justice. Voyez Tribun.

Tribunal ecclésiastique, est celui qui connoît des matieres ecclésiastiques, comme les officialités. Voyez Tribunal séculier.

Tribunal incompétent, est une jurisdiction qui n’a pas le pouvoir de connoître d’une affaire soit par rapport à la qualité des personnes, ou à la qualité de la matiere. Voyez Compétence & Incompétence.

Tribunal inférieur est une jurisdiction qui ressortit à un autre.

Tribunal du recteur, c’est le titre consacré à la jurisdiction du recteur de l’université. Voyez Recteur & Université.

Tribunal séculier, est une jurisdiction établie pour connoître des affaires temporelles. Voyez Tribunal ecclésiastique.