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l’ouvreau, un baquet plein d’eau propre. Ces sortes de baquets sont ordinairement cerclés en fer, & garnis de tôle légere autour de leur bord, pour empêcher qu’ils ne soient brûlés par le verre qui y tombe toujours pendant le curage. On démarge l’ouvreau à cuvette, c’est-à dire, qu’on ôte les torches qui garnissoient le tour de la tuile ; on se sert pour cela de la grand’mere, Planche XIX. fig. 1. C’est un instrument de fer assez mince, de la longueur d’environ trois piés, fait par le bout b comme le bout d’un ferret, & présentant à l’autre extrémité a, une petite dent d’environ un pouce. On insinue la dent de la grand’mere à quelques parties de la torche, & tirant à soi, on arrache les torches en entier tout-autour de la tuile. Lorsque l’ouvreau est démargé, on enleve le débris des torches avec le rabot, (fig. 5.) instrument de bois formé comme on le voit dans la figure. Après avoir raboté le dessous de l’ouvreau, on acheve de le nettoyer au moyen du balai, (fig. 6.) qu’on passe aussi sur le ceintre de l’ouvreau, pour en faire tomber les parties de torches qui y seroient encore attachées.

Lorsqu’on n’a bouché qu’avec une tuile, on ne peut balayer sous le ceintre de l’ouvreau qu’après avoir ouvert le four ; & alors on est en danger de faire tomber soi-même des saletés dans les cuvettes ; mais bouchez avec deux tuiles l’une devant l’autre, & margez sur la seconde. Après le démargement & le rabotage, on n’a qu’à ôter la seconde tuile, & on pourra balayer le haut de l’ouvreau & ses piés droits sans danger, à la faveur de la premiere. Après avoir balayé on débouche, c’est-à-dire, qu’on ôte la derniere tuile avec le cornard, & le four paroît ouvert. S’il y a quelque chose sur l’âtre de l’ouvreau, qui demande à être arraché, & qui fasse résistance, on le gratonne ; s’il pend quelque larme au ceintre de l’ouvreau, on l’enleve aussi avec le graton.

Il arrive quelquefois que le cul de la cuvette tient au siege, soit par le verre qui est tombé sur le siege, soit par la vitrification des deux surfaces. On détache la cuvette du siege, au moyen de la pince, (fig. vij.) ce qu’on appelle élocher la cuvette, d’où la figure 7, prend le nom de pince à élocher.

Lorsque la cuvette est élochée, on la prend avec le chariot à tenaille, que l’on voit en geométral & en profil. (fig. 8. & 9.) Cet instrument mérite bien que nous nous arrêtions un moment à sa description.

Le chariot à tenaille, ce sont deux branches de fer B G H I, C G K L qui se croisent en G où elles sont arrêtées comme les branches d’une paire de ciseaux, ayant la liberté de s’écarter ou se resserer. Les branches sont portées en G sur un essieu & des roues. Les branches sont contournées, de maniere que lorsqu’elles sont à l’endroit où elles font tenaille, elles prennent la forme quarrée KLIH d’une cuvette. La tenaille est un peu plus resserée de I en L, que de K en H.

Les proportions du chariot à tenaille, c’est-à-dire, l’ouverture de la tenaille, la longueur de l’instrument de G en I, ou en L, la longueur de l’essieu & le rayon des roues, tout cela est relatif à la mesure des cuvettes & au four, & la longueur GB l’est à celle qu’on a donnée à GI ou GL. On donne aux roues un peu moins d’un pié de rayon, pour pouvoir les faire passer sous les plaques des ouvreaux d’en haut. Les moyeux sont à environ vingt-quatre pouces l’un de l’autre. Quant à la distance de G au bout de la tenaille, il faut qu’elle soit suffisante pour aller prendre la cuvette du devant, & c’est sur cela qu’on se regle. Le point G ne peut approcher de l’ouvreau de plus près, que le rayon des roues = onze pouces : l’ouvreau a douze pouces d’épaisseur ; la premiere cuvette a seize pouces, comptons lui en dix-huit, pour sa distance, tant du ceintre de l’ouvreau, que de la

cuvette du devant, & supposons qu’on pince celle-ci de sept pouces, c’est-à-dire, qu’on avance la tenaille de sept pouces dans la ceinture : pouces = 4 piés. On a donné quatre piés six pouces dans la figure à GM pour plus de facilité. Les extrémités L, I de la tenaille finissent en s’amincissant. On fixe les tenailles au degré d’ouverture qu’on veut, au moyen d’une clavette, qu’on met dans les divers trous d’un morceau de fer EF, que j’appelle clé & qui passe au-travers d’une des branches GC de la tenaille.

A l’extrémité des bras GB, GC du chariot, sont placés des poignées AB, CD = environ neuf pouces, pour placer les mains des deux ouvriers destinés à conduire le chariot. On fait GB = cinq piés deux pouces.

On voit dans la figure 9, que les branches des tenailles, en approchant des poignées, prennent une courbure, qui met lesdites poignées à une élévation plus considérable, & plus commode aux ouvriers.

Pour bien mener le chariot à tenaille, un des deux ouvriers, doit presser sur les poignées, pour enlever la cuvette de terre, & l’autre doit pousser ou tirer le chariot, suivant le lieu où il veut le mener.

Il est inutile de prendre les cuvettes bien avant dans la ceinture ; il est suffisant qu’on les tienne assez, pour que leur poids ne les fasse pas échapper. L’action de prendre la cuvette avec les tenailles du chariot, est dite embarrer la cuvette.

Lorsque la cuvette est suffisamment & assez surement embarrée, on la tire du four & on la pose sur une ferrasse, auprès d’un des baquets. Alors deux ouvriers s’approchent de la cuvette, avec un instrument tel que la fig. 3 montre (p. 19.) qu’on appelle grapin.

Le grapin a six piés de longueur ; il présente en d, une surface plate & tranchante, qui a deux pouces & demi de d en e ; on appelle de le foulon. A l’autre extrémité, est une patte, à-peu-près semblable à celle du graton, & ayant seulement environ un pouce de c en f, & environ deux pouces & demi de c en g. La patte du grapin est ordinairement de cuivre pour plus de propreté. Par-là on n’est pas sujet aux pailles, dont le fer est quelquefois taré, & auxquelles peut se prendre le verre.

On fouille avec la patte du grapin, dans le fond de la cuvette, on en enleve tout le verre, qu’on jette à chaque fois dans le baquet. Un des cureurs se trouvant, par la position, trop loin pour jetter dans le baquet, on lui présente une petite poche de cuivre, qu’on voit fig. 10, Pl. XIX. connue sous le nom de poche du gamin, du nom qu’on donne communément au petit ouvrier qui la présente. Le cureur remplit la poche du gamin, qui va ensuite la mettre dans le baquet. S’il y a beaucoup de verre dans la cuvette, on en ôte la plus grande partie, avec la poche du gamin, avant d’employer le grapin. S’il y a dans la cuvette quelque corps qui résiste, & qui soit collé au paroi de la cuvette, les deux cureurs placent leurs foulons de côtés opposés, & font effort l’un contre l’autre pour le détacher. Lorsque la cuvette est curée, les deux ouvriers qui étoient au chariot à tenailler, la replacent au four, comme ils l’en avoient ôtée, on rebouche & on remarge. Lorsqu’il y a deux cuvettes dans un ouvreau, tandis qu’on cure celle de la tuile, d’autres ouvriers tirent celle du devant, & on la cure au baquet de l’autre arche. Celle des deux cuvettes qui est achevée de curer la premiere, se place devant, & la seconde à la tuile.

On répete la même opération aux quatre ouvreaux, pour curer toutes les cuvettes.

La description que nous avons faite des divers outils propres au curage, a peut-être fait perdre un peu de vûe, la suite de l’opération. Remettons-la sous