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ammoniac, avec l’esprit de nitre, ou l’esprit de sel ; mais il ne peut dissoudre le sel qui résulte de la combinaison de ce sel volatil, avec l’huile de vitriol.

On dulcifie les esprits acides par l’esprit-de-vin, en mêlant ensemble ces liqueurs, qu’on prend très-pures, en les faisant digerer à froid pendant un jour ou deux, & en distillant à un feu doux, & avec précaution.

Le mélange des trois parties d’esprit-de-vin, avec une partie d’esprit de vitriol, est un astringent fort employé, qui porte le nom d’eau de Rabel ; si l’on fait digérer le mélange de l’acide vitriolique avec un esprit-de-vin qui ait été tenu long-tems en digestion sur des substances végétales aromatiques, on a l’élixir de vitriol de Mynsicht.

On sait que l’éther vitriolique est un des produits de la distillation du mélange de l’esprit-de-vin, & de l’acide vitriolique. Il semble que l’éther n’est autre chose que le principe huileux de l’esprit-de-vin séparé par l’intermede de l’acide vitriolique. Voyez Ether. D’autres chimistes pensent que l’éther est formé par la combinaison de l’acide vitriolique & de l’esprit-de-vin. M. Vogel (inst. chim. §. 486.), veut prouver ce dernier sentiment, parce que si l’on distille un mélange d’eau & d’éther, on en retire un phlegme acide, & qu’on diminue la quantité de l’éther à mesure qu’on répete cette opération, parce que le mélange d’éther avec l’huile de tartre par défaillance, donne un sel neutre ; enfin parce qu’on retire de l’éther, joint à l’eau de chaux, une très-petite quantité d’huile, & que le résidu présente une huile de vitriol très-âcre, & une substance qui a l’air gypseux ; mais ces phénomenes peuvent être produits par la décomposition du principe huileux de l’esprit-de-vin : on sait que-cette décomposition a lieu en partie, quand on déphlegme l’esprit-de-vin par la chaux, ou par les alkalis fixes.

Quand on a retiré tout l’éther par l’opération décrite à l’article Ether ; en continuant la distillation, on obtient un phlegme acide, & une huile beaucoup plus pesante que l’éther, qu’on appelle huile douce de vitriol. Cette huile résulte effectivement de la combinaison de l’acide vitriolique avec l’huile de l’esprit-de-vin, qui dulcifie cet acide, & qui acquiert de la pesanteur en s’y unissant : on voit que cette huile a beaucoup de rapport avec la teinture qu’Angesala a nommée extrait anodin de vitriol.

Il reste au fond de la cornue une liqueur bitumineuse épaisse, que M. Beaumé a analisée par une très-longue filtration, à travers une bouteille de grès moins cuit qu’il ne l’est ordinairement ; seul moyen par lequel il a pu séparer la matiere grasse de l’esprit-de-vin, tenue en dissolution par une surabondance d’acide vitriolique ; il en a retiré successivement diverses liqueurs, dont l’examen lui a fait voir qu’une partie de l’acide vitriolique est tellement altérée, qu’elle se rapproche beaucoup des acides végétaux, & qu’une autre partie de cet acide se rapproche de la nature de l’acide marin. Le résidu de l’éther après la filtration, étant mêlé avec des alkalis fixes, ou de la lessive de savonniers, donne toujours du bleu de Prusse, qui paroît aussi quand on fait du tartre vitriolé avec le sel de tartre, & avec ce même résidu pris avant la filtration. M. Beaumé a prouvé que cette fécule bleue n’est autre chose que la portion du fer que contient toujours l’acide vitriolique, convertie en bleu de Prusse. Voyez le mémoire de M. Beaumé, dans le troisieme tome des mémoires étrangers, approuvés par l’académie des Sciences.

A la fin de l’opération de l’éther, il se sublime aussi un corps concret analogue au soufre, mais qui peut n’être qu’un sel vitriolique sulphureux. M. Pott prétend, dis. chim. tom. I. pag. 445. que le caput mortuum, que donne l’opération de l’éther après qu’on

en a dégagé par l’eau un acide vitriolique, ressemble parfaitement au résidu de l’huile de vitriol, traitée avec les huiles. En effet il est très-vraissemblable qu’à la fin de l’operation de l’éther, les principes mêmes de l’acide vitriolique, & de l’huile de l’esprit-de-vin peuvent être décomposés, soit qu’il se sublime en véritable soufre, soit par la seule production de l’acide sulphureux.

On purifie l’éther en y versant un peu d’huile de tartre par défaillance, qui absorbe l’acide sulphureux contenu dans les liqueurs, qu’on retire avec l’éther. Lorsqu’on fait l’éther suivant le procédé de M. Hellot, avec l’intermede de la terre glaise ordinaire, on ne voit paroître ni le phlegme sulphureux, ni l’huile douce de vitriol, ni le résidu bitumineux. M. Pott croit avec beaucoup de vraissemblance, que dans le procédé de M. Hellot, la terre bolaire n’est attaquée par l’acide vitriolique, que parce qu’elle s’alkalise ; il a observé, que les lotions de cette terre, après qu’elle a servi à l’opération de l’éther, donnent des véritables crystaux d’alun. Voyez sa Lithologie, to. I. page 120.

Il me semble qu’on est d’autant plus fondé à penser que l’éther n’enleve l’or & le mercure de leurs dissolutions, que par son affinité avec l’acide nitreux, depuis que M. Beaumé a fait voir dans sa dissertation sur l’éther, page 143 & suivantes, que l’éther vitriolique se décompose par son mêlange avec l’acide nitreux, & forme une espece de faux éther nitreux. Voyez sur le véritable éther nitreux, l’article Ether ; sur l’éther marin, l’article Marin (sel) & sur l’éther acéteux, l’article Vinaigre.

Autres principes des vins. Nous nous sommes assez étendus sur l’acide tartareux, & sur l’esprit inflammable, qui sont les principaux produits de la fermentation vineuse ; mais pour connoître parfaitement la nature du vin, il est à-propos d’y considérer encore avec Hoffman, liv. I. obs. chim. 25. outre le phlegme, & le principe aérien, qui y est contenu, une substance sulphureuse, & comme visqueuse, qu’on observe sur-tout dans les vins de Frontignan, d’Espagne, & d’Hongrie ; ce principe huileux est d’autant plus abondant, que les vins sont d’une couleur plus foncée.

Les vins rouges reçoivent leur couleur des enveloppes des grains de raisins, dont l’acide du moût extrait & exalte la partie colorante. Ils doivent leurs qualités astringentes à ces enveloppes, & aux pepins du raisin sur lesquels ils séjournent longtems.

Les vins rouges distillés, & évaporés jusqu’à consistence d’extrait, acquierent une couleur très-chargée, & une saveur très-astringente, qu’ils peuvent communiquer à une grande quantité d’eau. Quand on verse une suffisante quantité d’huile de tartre par défaillance sur un vin rouge, ou sur son extrait obtenu par l’évaporation ; le mêlange se trouble, prend une couleur brune, & dépose un sédiment. Ce qui prouve, que la beauté de sa couleur rouge dépendoit en grande partie de l’acide, qui l’exaltoit. De plus, quand on mêle de l’huile de tartre par défaillance avec la partie acide du vin du Rhin qui reste après la distillation & l’évaporation, il se fait une effervescence violente & écumeuse, occasionnée ; parce que cet extrait renferme beaucoup de soufre & de principe visqueux, que les parties aériennes qui y sont contenues élevent en bulles pour se dégager.

L’air qu’on voit s’échapper en forme de bulles du vin que l’on transvase, est contenu en grande quantité dans les vins qui ont fermenté librement ; ils donnent à ceux-ci plus de finesse, plus de légéreté, & il les rend plus salubres que ceux dont on a arrêté à dessein la fermentation, en bouchant exacte-