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& réduite en poudre très-fine, jusqu’à ce qu’il ne paroisse aucune partie de chair de vipere, & que le tout soit exactement mêlé ; alors vous étant froté les mains de baume de la meque, formez des trochisques du poids d’un gros, que vous ferez sécher sur un tamis renversé, selon l’art.

De ces préparations celle qui mérite le plus de considération, est le bouillon de vipere ; c’est celle-là qu’on ordonne communément contre la lepre, les dartres rebelles, & les autres maladies de la peau ; contre les bouffissures, les obstructions commençantes, attribuées à une lymphe épaisse, & à une circulation languissante, &c. les pâles-couleurs dépendantes de cette derniere disposition, &c. & c’est aussi sur celle-la qu’il conviendroit de tenter les expériences dont nous avons parlé plus haut.

La gelée de vipere est fort peu usitée ; il est très vraissemblable qu’elle a les mêmes vertus que le bouillon.

L’usage ordinaire de la poudre de vipere est absolument puérile ; on la fait entrer à petite dose dans les potions cordiales ou sudorifiques, & l’on y imagine bonnement, d’après l’erreur que nous avons déjà relevée plus haut, qu’elle y produit le même effet, quoique véritablement un peu plus doux que l’alkali volatil de vipere.

Les trochisques de viperes ne sont point du tout d’usage dans les prescriptions magistrales ; on ne les prépare absolument que pour les employer à la composition de la thériaque.

Outre les remedes dont nous avons parlé jusqu’à présent, qui ne sont que la substance même de la vipere, ou qui en sont véritablement retirés sans avoir essuyé aucune altération ; on en retire par l’art chimique, par une décomposition manifeste, une substance qui est employée à titre de médicament, je veux dire de l’alkali volatil, tant sous forme fluide, que sous forme concrete. Mais ce sel qui est un des produits de la distillation analytique de la vipere, n’a absolument que les vertus communes des produits analogues des substances animales. Voyez Substance animale & Sel alkali volatil.

Les Apoticaires gardent ordinairement chez eux dans des cucurbites profondes de verre, des viperes en vie. Ils les prennent pour l’usage avec de longues pinces, par le cou. Il est vrai, ce qu’on dit communément, que si on les prend par la queue, & qu’on les laisse pendre la tête en bas, elles n’ont pas la force de se redresser & d’aller piquer la main à laquelle elles sont suspendues. Il est pourtant plus sûr de les prendre par le cou, parce que de l’autre maniere elles peuvent facilement atteindre la main libre de celui qui les tient, ou quelque assistant mal avisé. On doit encore observer que la morsure des têtes séparées du corps, est aussi à craindre, & aussi dangereuse que la morsure de la vipere entiere. Les Apothicaires ont coutume de jetter ces têtes dans de l’eau-de-vie à mesure qu’ils les séparent, elles y meurent bientôt ; dans plusieurs pays le peuple les achete pour faire des amulettes.

On trouve dans les pharmacopées, sous le nom de sirop de vipere roborant, une composition très-compliquée, & dont les viperes sont un ingrédient assez inutile. Au reste, ce sirop doit être très-cordial & sudorifique.

Les Pharmacologistes ont mis encore au rang des remedes, indépendamment des plus usuels dont nous venons de parler, le fiel de vipere, à titre d’ophtalmique ; la graisse, comme un puissant résolutif, sudorifique ; anodin, prise intérieurement à la dose d’un gros. Wedelius rapporte deux observations de phthisiques, traités avec succès par l’usage intérieur de cette graisse. Elle est encore célébrée pour l’usage extérieur, comme un excellent ophthalmique

adoucissant & cicatrisant ; comme excellente contre la gale, les tumeurs scrophuleuses, & contre les rides & les taches du visage ; comme utile dans l’accouchement laborieux si on en frotte le nombril, &c. & enfin ses arêtes séchées & réduites en poudre, comme un bon alexipharmaque.

La poudre de vipere est appellée par quelques auteurs besoard-animal : la poudre du cœur & du foie porte le même nom chez plusieurs autres. (b)

VIPÉRINE, s. f. (Hist. nat. Bot.) echium ; genre de plante à fleur monopétale, en forme d’entonnoir un peu courbé, dont le bord supérieur est plus long que l’inférieur. Le calice est ordinairement divisé jusqu’à sa base ; le pistil sort de ce calice ; il est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, & entouré de quatre embryons ; ils deviennent dans la suite autant de semences qui ressemblent à une tête de vipere ; elles murissent dans le calice même, qui s’agrandit. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

L’espece appellée par Tournefort, echium vulgare, I. R. H. a la racine bisannuelle ; elle pousse plusieurs tiges à la hauteur de deux à trois piés, velues, fermes, vertes, marquetées de points noirs ; ses feuilles sont oblongues, étroites, lanugineuses, rudes au toucher, placées sans ordre, d’un goût fade. Ses fleurs garnissent les tiges presque depuis le bas jusqu’en haut ; elles sont formées en entonnoir, courbé & découpé par les bords, en cinq segmens inégaux ; elles sont d’une belle couleur bleue, tirant quelquefois sur le purpurin ; quelquefois cendrées, ayant au centre cinq étamines purpurines, à sommets oblongs, & un pistil blanc ; le tout est soutenu par un calice fendu jusqu’à la base en cinq parties, longues, étroites, pointues, cannelées. Quand la fleur est tombée, il lui succede quatre semences jointes ensemble, ridées, semblables à la tête d’une vipere.

Elle croît dans les champs, dans les terres incultes, dans les blés, le long des chemins & sur les murs. Elle fleurit en Juin & Juillet, demeure verte tout l’hiver ; & périt la seconde année, après avoir poussé sa tige & mûri sa graine. (D. J.)

Vipérine, (Mat. méd.) Dioscoride & les anciens ont attribué à cette plante une vertu spécifique, contre la morsure de la vipere, & de quelques autres bêtes venimeuses ; & c’est peut-être de cette prétendue vertu que lui vient son nom. Il pourroit bien être aussi que son nom seroit plus ancien que cette opinion ; qu’il lui viendroit, par exemple, comme le pensent quelques botanistes, d’une grossiere ressemblance qu’a sa graine avec la tête d’une vipere, & que les Pharmacologistes lui auroient ensuite attribué, pour soutenir l’honneur du nom, la vertu de guérir la morsure de cet animal. Quoi qu’il en soit, cette prétendue propriété est absolument imaginaire, & démentie par l’expérience. La vipérine est une des plantes éminemment nitreuses ; d’ailleurs dépouillée de tout autre principe vraiement actif, & dont l’action doit par conséquent être estimée par les propriétés médicinales du nitre. Voyez Nitre.

Cette plante est très-analogue à la bourrache, à la buglose, à la pulmonaire, &c. & peut très-bien être substituée à ces plantes. Sa racine entre dans l’emplâtre diabotanum. (b)

Vipérine de Virginie, (Mat. méd.) voyez Serpentaire de Virginie.

VIPITENUM, (Géogr. anc.) nom d’une ville de la Germanie, selon l’itinéraire d’Antonin. On sait que c’est aujourd’hui Stertzingen dans le Tirol par une ancienne inscription qu’on y a déterrée.

VIR, (Géogr. anc.) fleuve de l’Espagne tarragonoise. Ptolomée, l. II. c. vj. marque son embouchure entre le promontoire où étoient les autels du soleil & un autre promontoire qu’il ne nomme point. On croit que c’est le fleuve Florius de Pline. (D. J.)