Aller au contenu

Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 17.djvu/368

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

élevées dont la pointe étoit dorée ; il portoit dans sa main gauche une rondache sur laquelle étoient cinq pommes de pin & quatre fleches que les Mexicains croyoient avoir été envoyées du ciel. Dans la main droite il tenoit un serpent bleu. Les premiers espagnols appelloient ce dieu Huchilobos, faute de pouvoir prononcer son nom. Les Mexicains appelloient son temple teutcalli : ce qui signifie la maison de Dieu. Ce temple étoit d’une richesse extraordinaire ; on y montoit par cent quatorze degrés, qui conduisoient à une plate-forme, au-dessus de laquelle étoient deux chapelles : l’une dédiée à Vitziliputzll, & l’autre au dieu Tlaloch, qui partageoit avec lui les hommages & les sacrifices. Devant ces chapelles étoit une pierre verte haute de cinq piés, taillée en dos-d’âne, sur laquelle on plaçoit les victimes humaines, pour leur fendre l’estomac & leur arracher le cœur, que l’on offroit tout fumant à ces dieux sanguinaires ; cette pierre s’appelloit quatixicali. On célébroit plusieurs fêtes en l’honneur de ce dieu, dont la plus singuliere est décrite à l’article Ypaïna.

VIVACE, plante, (Botan.) on appelle en botanique plantes vivaces les plantes qui portent des fleurs plusieurs années de suite sur les mêmes tiges, & sans être transplantées. Les botanistes distinguent les plantes vivaces de celles qui meurent après avoir donné de la semence. Les plantes vivaces sont encore de deux sortes : les unes qui sont toujours vertes comme le giroflier, & les autres qui perdent leurs feuilles pendant l’hiver, comme la fougere. (D. J.)

VIVACITÉ, PROMPTITUDE, (Synonym.) la vivacité tient beaucoup de la sensibilité & de l’esprit ; les moindres choses piquent un homme vif ; il sent d’abord ce qu’on lui dit, & réfléchit moins qu’un autre dans ses réponses. La promptitude tient davantage de l’humeur & de l’action ; un homme prompt est plus sujet aux emportemens qu’un autre ; il a la main légere, & il est expéditif au travail. L’indolence est l’opposé de la vivacité, & la lenteur l’est de la promptitude. (D. J.)

VIVANDIER, s. m. (Art milit.) c’est un particulier à la suite d’un régiment ou d’une troupe, qui se charge de provisions pour vendre & distribuer à la troupe. Les vivandiers doivent camper à la queue des troupes auxquelles ils sont attachés, & immédiatement avant les officiers. (Q)

VIVANT, (Jurisprud.) homme vivant & mourant. Voyez l’article Homme. Voyez aussi l’article Vie.

VIVARAIS, le, (Géog. mod.) ou le Vivarez ; petite province de France, dans le gouvernement du Languedoc ; elle est bornée au nord par le Lyonnois, au midi par le diocèse d’Uzès, au levant par le Rhône, qui la sépare du Dauphiné, & au couchant par le Vélay & le Gévaudan.

Le Vivarais a pris son nom de la ville de Viviers. Les peuples de ce pays s’appelloient autrefois Helvii, & appartenoient à la province romaine du tems de Jules César. Après la nouvelle division des provinces sous Constantin & ses successeurs, les Helviens furent attribués à la premiere Viennoise. Leur capitale s’appelloit Albe, & même Albe-Auguste, aujourd’hui Alps ; mais ce n’est plus qu’un bourg, qui a succédé à l’ancienne ville ruinée par les Barbares.

Lorsque l’empire romain s’écroula dans le cinquieme siecle, les peuples helviens tomberent sous l’empire des Bourguignons, & ensuite sous celui des François ; tout le pays est nommé dans Pline, Helvicus Pagus ; cet historien en fait mention, ainsi que du vin de son territoire, helvicum vinum.

Le Vivarais est divisé en haut & bas Vivarais par la riviere d’Erieu. Le haut Vivarais est couvert de montagnes qui nourrissent quantité de bestiaux. Le bas Vivarais est encore plus cultivé par l’industrie des habitans.

Argoux (Gabriel) avocat du parlement de Paris, mort au commencement de ce siecle, étoit né dans le Vivarais ; son institution au droit françois est un ouvrage estimé.

La Fare (Charles-Auguste de) né en 1644 au château de Valgorge en Vivarais, mourut à Paris en 1712. Il est connu par ses mémoires & par des vers agréables où regne le bon goût & la finesse du sentiment. Il la l’amitié la plus étroite avec l’abbé de Chaulieu, & tous deux faisoient les délices de la bonne compagnie. Inspirés par leur esprit, par la déesse de Cythere & par le dieu du vin, ils chantoient délicatement dans les soupers du Temple les éloges de ces deux divinités. Mais ce qu’il y a de singulier, c’est que le talent du marquis de la Fare pour la poésie ne se développa que dans la maturité de l’âge.

« Ce fut, dit M. de Voltaire, madame de Cailus, l’une des plus aimables personnes de son siecle par sa beauté & par son esprit, pour laquelle il fit ses premiers vers, & peut-être les plus délicats qu’on ait de lui ».

M’abandonnant un jour à la tristesse,
Sans espérance, & même sans desirs,
Je regrettai les sensibles plaisirs
Dont la douceur enchanta ma jeunesse.
Sont-ils perdus, disois-je, sans retour ?
Et n’es-tu pas cruel, Amour,
Toi que j’ai fait dès mon enfance
Le maître de mes plus beaux jours,
D’en laisser terminer le cours
A l’ennuyeuse indifférence ?
Alors j’apperçus dans les airs
L’enfant maître de l’univers,
Qui plein d’une joie inhumaine,
Me dit en souriant, Tircis, ne te plains plus,
Je vais mettre fin à ta peine ;
Je te promets un regard de
Cailus.

Quoique M. de la Fare vécût dans le grand monde, il en connoissoit aussi bien que personne la frivolité & les erreurs. Voyez comme il en parle dans son ode sur la campagne. Elle est pleine de réflexions d’un philosophe qui nous enchante par sa morale judicieuse.

Je vois sur des côteaux fertiles
Des troupeaux riches & nombreux,
Ceux qui les gardent, sont heureux,
Et ceux qui les ont, sont tranquilles.
S’ils ont à redouter les loups,
Et si l’hiver vient les contraindre,
Ce sont-là tous les maux à craindre ;
Il en est d’autres parmi nous.


Nous ne savons plus nous connoître,
Nous contenir encore moins.
Heureux, nous faisons par nos soins,
Tout ce qu’il faut pour ne pas l’être.
Notre cœur soumet notre esprit
Aux caprices de notre vie ;
En vain la raison se récrie,
L’abus parle, tout y souscrit.


Ici je rêve à quoi nos peres
Se bornoient dans les premiers tems :
Sages, modestes & contens,
Ils se refusoient aux chimeres.
Leurs besoins étoient leurs objets ;
Leur travail étoit leur ressource,
Et la vertu toujours la source
De leurs mœurs & de leurs projets.


Ils savoient à quoi la nature
A condamné tous les humains.
Ils ne devoient tous qu’à leurs mains,
Leur vêtement, leur nourriture.
Ils ignoroient la volupté,