On a sujet de craindre une rechute lorsque l’urine est troublée, & qu’il y a en même tems des sueurs, ou qu’elle a une inégale densité. (ibid. n°. 23 & 39.) Dans ces maladies aiguës, le malade est menacé de délire ou phrénésie. Lorsque les urines sont blanches sans couleur, ἄχροα, qu’elles renferment un énéoreme noir, & qu’il est extrémement agité, & ne peut dormir, lorsqu’elles sont ténues, aqueuses au commencement de la maladie, & qu’il y a veille, agitation, hémorragie du nez, rémission, & ensuite redoublement, pour l’ordinaire il survient à ces malades une évacuation copieuse de sang par le nez, qui termine heureusement la maladie. (ibid. & cap. ij. n°. 6 & 12.) Le même symptome est annoncé par des douleurs aux jambes avec des urines qui renferment des nuages très-élevés, par des urines rougeâtres, qui ont un énéoreme, mais qui ne déposent point, lorsqu’elles se rencontrent avec la surdité par ces mêmes urines qui viennent après qu’une douleur à la cuisse a été dissipée. (prorrhet. lib. I. sect. I. & II.) Lorsque les urines sont troubles, comme celles des jumens, on peut assurer qu’il y a douleur de tête, ou qu’elle sera bientôt. (aphor. 10. lib. IV.) Et si par le repos, elles ne déposent point ces matieres qui les troublent, on peut s’attendre à des convulsions, & ensuite à la mort, suivant les observations d’Hippocrate sur la femme de Philinus, sur celle de Dromedaus, & sur Hermocrate. (épidem. lib. III.) Si avec ces urines troubles, il y a douleur de tête, veille opiniâtre, Baglivi croit qu’il y aura délire & léthargie : si le malade est assoupi, a la tête pesante, & le pouls petit, l’urine qui a un sédiment louable, & qui en est tout-à-coup dépourvue, indique un changement dans la maladie, qui se sera avec peine & douleur. (coac. prænot. cap. xxvij. n°. 29.) L’interception de l’urine à la suite de fréquentes & légeres horripilations au dos avec sueur, signifie des douleurs vagues. (ibid. cap. j. n°. 47.) L’urine épaisse avec un sédiment tenu, annonce des douleurs ou une tumeur aux articulations ; on trouve dans les personnes qui ont ces douleurs ou tumeurs, & dans qui elles disparoissent & reviennent de tems-en-tems, sans qu’il y ait rien d’arthritique, les visceres grands, & l’urine chargée d’un sédiment blanc ; si l’urine ne renferme pas ce sédiment, ou s’il ne vient pas des sueurs, l’articulation s’affoiblira, & il s’y formera une espece d’abscès, dont la matiere aura la consistance du miel, un méliceris, μελικηρὶς, favus. Ces malades sujets à des douleurs vagues dans les hyppochondres, sur-tout dans le droit, rendent, après que la douleur est cessée, une urine épaisse & verte. (prorrhet. lib. II.) Si l’urine reste long-tems crue, & qu’on observe les autres signes salutaires, on doit s’attendre à voir terminer la maladie par des douleurs & un abscès communément dans les parties au-dessous du diaphragme ; il se fera une métastase salutaire à la cuisse, si le malade sent courir des douleurs dans la région des lombes. (coac. præn. cap. xxvij. n°. 21.) Il peut aussi se faire que des urines aqueuses avec un énéoreme blanc, diversement blanchâtres & fétides, déterminent l’abscès aux oreilles. (prorrhet. lib. I. sect. III. n°. 71.) Dans les fievres longues, légeres, erratiques, la ténuité des urines est un signe que la ratte est attaquée. (coac. prænot. cap. xxvij. n°. 40.) Les urines brunâtres semblables à de la lessive, jointes avec difficulté de respirer, indiquent la leucophlegmatie. (ibid. n°. 24.) La suppression d’urines, ou la difficulté d’uriner, donne lieu à l’hydropisie, lorsqu’elle survient à des personnes d’un tempérament bilieux, qui ayant le dévoiement, rendent des matieres muqueuses, semblables à de la semence, & ont des douleurs à la région du pubis. (ibid. cap. xjx. n°. 4.)
Les différentes variétés que nous avons observées
dans l’urine ne dépendent souvent que d’un vice local dans les reins ou la vessie, alors elles ne sauroient nous instruire des affections du reste du corps, elles ne peuvent que nous faire connoître le vice de ces parties ; c’est pourquoi Hippocrate, dans l’examen des urines, recommande beaucoup d’y faire attention afin d’éviter des erreurs désavantageuses pour les médecins, & funestes au malade. Prognost. l. II. n°. 33. On peut s’assurer que la vessie ou les reins sont affectés par les causes qui ont précédé, & par les symptomes présens, sur-tout par les douleurs que le malade rapporte à la région de ces parties. Ainsi, lorsque les urines renferment du sang liquide, ou des grumeaux, qu’elles coulent goutte-à-goutte, & que l’hyppogastre & le périnée sont douloureux, il n’est pas douteux que la vessie, ou les parties qui l’environnent soient attaquées ; le pissement de sang, de pus & d’écailles extrémement fétide désigne l’ulcération de cette partie. L’on a lieu de croire que la vessie est attaquée d’une espece de gale, lorsque les urines sont épaisses & charient beaucoup de matiere, comme du son : le calcul se manifeste par la strangurie & les urines sablonneuses, &c. une douleur subite aux reins avec suppression d’urine, présage l’excrétion d’urines épaisses, ou de petits graviers ; elle indique leur passage par les ureteres. Lorsque l’urine étant épaisse se trouve chargée de caroncules, & d’especes de poils, c’est une marque que l’affection est dans les reins. Le pissement de sang spontané dénote aussi le vice dans la même partie ; savoir, la rupture d’une veine, l. IV. aphor. 75. 81.
Quelques auteurs ont prétendu que les urines brillantes, limpides, qui laissoient des crystaux tartareux aux parois des vaisseaux, étoient un signe d’affection scorbutique & hyppochondriaco-spasmodicoarthritique ; que les urines pourprées, ténues, limpides & écumeuses étoient un indice de pleurésie ; que lorsque dans l’écume il y avoit de petits grains, c’étoit une marque de paralysie d’autant plus certaine, que les grains étoient plus petits ; que l’urine épaisse comme de la saumure, couverte d’une pellicule muqueuse & grasse, indiquoit sûrement la vérole, quand il n’y avoit point de toux : que l’urine dont les nuages étoient comme autant de petits flocons, & dont l’écume étoit long-tems à se dissiper, dénotoit la phthisie ; que l’urine citrine, comme du vin, claire, avec un sédiment couleur de rose, peu abondant & floconeux, annonçoit des mouvemens hémorroïdaux aux personnes bien portantes âgées de 26 ou de 30 ans ; on a été jusqu’à ranger parmi les signes de grossesse l’urine claire & remplie de petits atomes, courant de côté & d’autre ; enfin on a prétendu tirer des urines beaucoup d’autres signes encore moins certains ; Nenter en fait un détail assez long, mais qui est encore bien loin d’être complet. Théor. méd. part. III. cap. viij. Je ne parle pas de ces charlatans effrontés qui prétendent connoître toutes les maladies par la seule inspection des urines, & qu’on voit courir les foires, monter sur des tréteaux, & s’afficher sous le titre important de médecins des urines ; les gens éclairés, parfaitement instruits de l’ignorance & des fourberies de ces imposteurs, ne peuvent que s’en mocquer : ils les honoreroient trop, ou s’abaisseroient trop eux-mêmes, s’ils prennoient la peine de les critiquer : le peuple, pour qui le singulier est une amorce toujours sûre de le frapper & de l’attirer, court en foule porter à ces prétendus guérisseurs son urine & son argent ; il ne s’apperçoit pas qu’il raconte lui-même sa maladie, & il est tout ébahi de se l’entendre détailler en d’autres termes sur le seul examen de son urine ; pénétré d’admiration, il achete la drogue du charlatan, & la prend avec cette aveugle confiance, qui dans les maladies légeres suffit seule pour la guérison ; mais dans les cas graves, il ne