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D’ailleurs cela est inutile quand le ricochet est bien placé & qu’il fait son devoir : ainsi toutes les autres batteries nécessaires doivent s’établir sur le haut du parapet du chemin couvert, & se doivent border ; elles sont toutes de même espece, mais elles ont différens usages.

Les premieres en ordre doivent être les deux d, d, (Planche XVII. de l’Art milit. fig. 1.) quatre pieces chacune destinées à l’ouverture de la demi-lune C ; on les place de part & d’autre de son angle, à peu près dans les endroits marqués d, d ; & quand la demi-lune est prise, on les peut changer de place, en les mettant un peu à droite & un peu à gauche, pour enfiler son fossé, afin de pouvoir battre en breche les épaules des bastions, comme on le voit en e, e.

Après que les breches sont faites, soit à la demi-lune, soit aux bastions, & bien éboulées, on tient ces batteries en leur premier état, toûjours prêtes à battre le haut jusqu’à ce qu’on en soit le maître ; on biaise même les embrasures pour aggrandir les breches, observant que pour faire breche avec le canon, il faut toûjours battre en salve, & le plus bas qu’on peut, mais jamais le plus haut, parce que cela attire des ruines au pié qui rompent l’effet du canon. Pour bien faire, il ne faut pas que la sape ait plus de six à sept piés de haut. On ne doit jamais quitter le trou qu’on bat, qu’on ne l’ait enfoncé de 8 à 10 piés au moins, après quoi on leur fait élargir la breche, comme on l’a dit ci-dessus, ce qui est une affaire de vingt-quatre heures au plus : on peut donc dire que les batteries des demi-lunes ont trois usages :

Le premier, est celui d’ouvrir la piece attaquée.

Le second, de battre le haut de la breche.

Et le troisieme, d’ouvrir le corps de la place par des orillons.

Les secondes batteries en ordre sont celles marquées h, h, (Planche XVII. de l’Art milit. fig. 1.), qui s’établissent sur le haut du chemin couvert, devant les faces des bastions AB qu’on veut ouvrir.

Les bombes peuvent aussi se tirer à ricochet. M M. les commandans de l’école d’artillerie de Strasbourg ont fait en 1723 des expériences à ce sujet, rapportées de cette maniere dans le Bombardier François. « Pour tirer les bombes à ricochet, on se sert de mortiers de huit pouces montés sur des affuts de canon. Les batteries que l’on fait pour cela, se placent sur le prolongement des branches du chemin couvert, ou de tout autre ouvrage, mais principalement du chemin couvert, parce que les bombes y font un si grand ravage, qu’il n’est presque pas possible de pouvoir y tenir. Elles rompent les pallissades, les tambours & réduits que l’on fait dans des places d’armes rentrantes, & causent bien plus de desordre que les boulets ; car non-seulement elles sont plus grosses & plus pesantes, mais après avoir fait plusieurs bonds, elles crevent à l’endroit où elles viennent se terminer & ne s’enterrent point. Leurs éclats sont toûjours meurtriers ; d’autre part ces mortiers peuvent être servis avec beaucoup plus de célérité que les canons ; car il n’est question que de mettre la poudre dans sa chambre, la bombe dessus, & tirer ; & comme cela peut se faire en 3 ou 4 minutes, une batterie de deux mortiers servie de cette façon, pourra jetter trente ou quarante bombes par heure. Je laisse à penser, ajoûte M. Belidor, si un chemin couvert étoit croisé par de semblables batteries, quelle est la garnison qui pourroit s’y maintenir, l’avantage qu’on auroit de l’attaquer de vive force, & combien on auroit de facilité pour avancer les travaux.

Comme il faut éviter que les bombes ne s’enterrent en tombant, parce qu’elles ne feroient point le ricochet, les mortiers ne doivent jamais être pointés au-dessus de 12 degrés : mais on peut se

servir de tous les angles que le mortier peut faire avec l’horison entre 8 & 12 degrés, & choisir le plus convenable à la charge dont on se servira, relativement à la distance dont on sera de l’endroit où les bombes doivent commencer à bondir. Les épreuves faites à Strasbourg peuvent servir de regle à ce sujet. Voici en quoi elles consistent.

On a construit une batterie à 70 toises de l’angle saillant du chemin couvert de la demi-lune du polygone de cette école : un mortier pointé à 9 degrés au-dessus de la ligne horisontale, & chargé de 13 quarterons de poudre, a jetté les bombes sur le glacis, à 2, 4, 6, 8 toises du parapet du chemin couvert, d’où elles se relevoient & alloient plonger dans la branche entre les deux traverses, & de-là dans la place d’armes rentrante contre un petit réduit qu’on y avoit fait.

L’on a pointé ensuite à 10 degrés avec la même charge, & après 5 ou 6 coups répétés de cette maniere, l’on a observé que les bombes tomboient dans la place d’armes saillante, d’où elles se relevoient & alloient plonger, comme les précédentes, dans la branche entre les deux traverses, & de-là dans la place d’armes rentrante. Enfin on a pointé le mortier à 11 degrés toûjours avec la même charge, & après 5 ou 6 coups réitérés, on a observé que les bombes tomboient encore dans la branche, entre les deux traverses ; d’où elles se relevoient & alloient passer par-dessus le reste du chemin couvert : ce qui a fait conclurre que la maniere la plus avantageuse & la plus convenable de faire agir ce ricochet, étoit de ménager la direction du mortier ; de sorte que les bombes pûssent tomber sur la crête du chemin couvert, ou dans la place d’armes saillante, moyennant quoi elles faisoient toûjours un grand effet.

On a éprouvé si la fusée ne s’éteindroit point, soit par la chûte des bombes, ou par le frottement du ricochet en roulant ; & pour cela on en a fait tirer plusieurs avec des fusées allumées, qui ont toutes réussi, ayant été entierement consumées. »

Batteries en rouage, sont celles qu’on destine à démonter les pieces de l’ennemi.

Batteries enterrées, sont celles dont les plattes-formes sont enfoncées dans le terrein de la campagne ; de maniere que ce terrein sert de parapet ou d’épaulement à la batterie, & qu’on peut y pratiquer des embrasures.

Batteries directes, sont celles qui battent à peu près perpendiculairement les côtes des ouvrages devant lesquels elles sont placées.

Batterie meurtriere. Voyez Batteries de revers.

Batteries de revers, sont celles qui battent le derriere d’un ouvrage, & qui voyent le dos de ceux qui le défendent. Elles sont aussi appellées batteries meurtrieres, à cause qu’elles sont les plus dangereuses, & qu’il est fort difficile de se parer ou mettre à couvert de leur canon.

Batteries en écharpe, sont celles dont les tirs font un angle au plus de 20 degrés avec les faces, ou les côtés des pieces qu’elles battent. On les appelle aussi quelquefois batteries de bricole ; parce que le boulet ne faisant, pour ainsi dire, qu’effleurer la partie sur laquelle il est tiré, se réfléchit dans les environs, à peu près comme le fait une balle de billard, qui a frappé la bande obliquement.

Batterie d’enfilade, est celle qui découvre toute la longueur de quelque partie d’un ouvrage de fortification ; ensorte que le boulet peut prendre par le flanc ou le côté, tous ceux qui sont placés sur ce côté, & qui font face au parapet.

Batteries en croix, ou Batteries croisées, ou encore en chapelet, sont dans l’Art mi-