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en soi, & que l’ame n’a pas besoin de lumiere de gloire pour voir Dieu & joüir de lui : que c’est être imparfait que de s’exercer à la pratique des vertus, l’ame parfaite les ayant exclues : qu’a l’élevation du corps de J. C. les parfaits ne doivent ni se lever ni lui rendre aucune marque de respect, parce que ce seroit une imperfection que de descendre de la pureté & de la hauteur de leur contemplation pour penser à l’eucharistie, à la passion ou à l’humanité de J. C.

Le pape Clément V. condamna ces fanatiques dans le concile général de Vienne tenu en 1311. Comme ils portoient l’habit religieux, sans garder ni le célibat ni aucune observance monastique, on les a quelquefois confondus avec ceux dont nous allons parler dans l’article suivant.

Begghards, Beguins, & Beguines, sont aussi les noms qu’on a donnés aux religieux du tiers ordre de S. François. On les appelle encore à présent dans les Pays-bas, Begghards, parce que long-tems avant qu’ils eussent reçû la regle du tiers ordre de S. François, & qu’ils fussent érigés en communauté réguliere, ils en formoient cependant dans plusieurs villes, vivans du travail de leurs mains, & ayant pris pour patrone sainte Begghe, fille de Pepin le vieux, & mere de Pepin de Herstal, laquelle fonda le monastere d’Andenne, s’y retira, & y mourut, selon Sigebert, en 692. A Toulouse on les nomma Béguins, parce qu’un nommé Barthelemi Bechin leur avoit donné sa maison pour les établir en cette ville. De cette conformité de nom le peuple ayant pris occasion de leur imputer les erreurs des Begghards & des Béguins, condamnés au concile de Vienne, les papes Clément V. & Benoit XII. déclarerent par des bulles expresses que ces religieux du tiers ordre n’étoient nullement l’objet des anathèmes lancés contre les Begghards & les Béguins répandus en Allemagne. Il y a encore aujourd’hui dans plusieurs villes de Flandre des communautés de filles qu’on nomme Béguines, & leurs maisons sont appellées béguinages. Voyez Beguines. (G)

* BEGIE ou BEGGIE, (Géog.) ville d’Afrique au royaume de Tunis, sur la pente d’une montagne. Long. 27. lat. 37.

BEGLERBEG, s. m. (Hist. mod.) nom qu’on donne en Turquie au gouverneur général d’une grande étendue de pays. Ce mot se trouve écrit diversement dans les auteurs : Beglerbeg, Beylery, & Begheler-Beghi ; il signifie seigneur des seigneurs.

Les Beglerbegs sont autant de vicerois qui commandent à tout un royaume ; leur autorité s’étend également sur la guerre, sur la justice, & sur la police : ils ont au-dessous d’eux d’autres gouverneurs particuliers, soit d’une province, soit d’une grosse ville, qu’on nomme sanjacs ou sanjiacs. Après le grand-visir, les Beglerbegs seuls ont le pouvoir de publier dans leurs départemens les ordonnances impériales, & d’y tenir la main. Par tout l’empire, hors de l’enceinte de Constantinople, ils peuvent faire décapiter, ou punir de tel autre genre de mort ou châtiment que bon leur semble, les coupables qu’on leur amene, sans que le bacha du lieu puisse s’y opposer ; il a seulement la liberté de se plaindre à la Porte s’ils abusent de leur autorité.

Autrefois il n’y avoit que deux Beglerbegs dans tout l’empire ; celui d’Europe ou de Romelie, & celui de Natolie en Asie : mais l’empire s’étant accru, le nombre des Beglerbegs s’est aussi augmenté en Asie ; celui de Romelie est resté seul en Europe, & semble représenter l’empereur Grec. Il est le plus éminent de tous les Beglerbegs ; car quoique tous les visirs à trois queues joüissent de ce titre, il sert cependant à caractériser plus particulierement le Beglerbeg de Romelie, gouverneur général de toutes les provinces Eu-

ropéennes dépendantes du grand-Seigneur ; le Beglerbeg

de Natolie & celui de Syrie, qui fait sa résidence à Damas. Le gouverneur de Bude & celui de l’Arabie Pétrée portoient autrefois ce titre ; & si quelques bachas le prennent aujourd’hui, c’est sans l’aveu de la cour qui ne les traite que de plénipotentiaires. Guer. mœur. & usag. des Turcs, tome II. (G)

BEGONE, s. f. begonia, (Hist. nat. bot.) genre de plante dont le nom a été dérivé de celui de M. Bégon, & qui a été observée par le pere Plumier. Les fleurs des plantes de ce genre sont de deux sortes : l’une est stérile, & composée de quatre pétales grands & étroits ; l’autre est en rose, composée de plusieurs pétales disposés en rond sur un calice garni de feuilles, qui devient dans la suite un fruit à trois angles, ailé, divisé en trois loges, & rempli de petites semences. Tournefort, Inst. rei herb. app. Voyez Plante. (I)

BEGUILL, (Hist. nat. bot.) fruit de la grosseur d’une pomme, & couvert d’une écorce rude & noüeuse, sous laquelle il y a une pulpe semblable au fruit de l’arbousier.

BEGUINES, s. f. (Hist. mod.) c’est le nom qu’on donne dans le Pays-bas à des filles ou veuves, qui sans faire de vœux se rassemblent pour mener une vie dévote & réglée. Pour être aggregée au nombre des béguines, il ne faut qu’apporter suffisamment de quoi vivre. Le lieu où vivent les béguines s’appelle béguinage ; celles qui l’habitent peuvent y tenir leur ménage en particulier, ou elles peuvent s’associer plusieurs ensemble. Elles portent un habillement noir, assez semblable à celui des autres religieuses. Elles suivent de certaines regles générales, & sont leurs prieres en commun aux heures marquées ; le reste du tems est employé à travailler à des ouvrages d’aiguille, à faire de la dentelle, de la broderie, &c. & à soigner les malades. Il leur est libre de se retirer du béguinage, & de se marier quand il leur plaît. C’est ordinairement un ecclésiastique qui leur est préposé, & qui remplit les fonctions de curé du béguinage. Elles ont aussi une supérieure, qui a droit de les commander, & à qui elles sont tenues d’obéir tant qu’elles demeurent dans l’état de béguines.

Il y a dans plusieurs villes des Pays-bas des béguinages si vastes & si grands, qu’on les prendroit pour de petites villes. A Gand en Flandre il y en a deux, le grand & le petit, dont le premier peut contenir jusqu’à 800 béguines.

Il ne faut pas confondre ces béguines avec certaines femmes qui étoient tombées dans les excès des Béguins & des Begguards, qui furent condamnés comme hérétiques par le pape Jean XII. & dont il ne reste plus aucun vestige. Voyez Begghards.

BEGU, adj. (Manege.) Un cheval begu est celui qui, depuis l’âge de cinq ans jusqu’à sa vieillesse, marque naturellement & sans artifice à toutes les dents de devant : il s’y conserve un petit creux & une marque noire, qu’on appelle germe de féve, qui aux autres chevaux s’efface vers les six ans. Les chevaux begus ont les dents plus dures que les autres chevaux, ce qui fait que quand ils ont une fois marqué, ils marquent toûjours également aux pinces, aux dents moyennes, & aux coins. Les jumens sont plus sujettes à être beguës que les chevaux ; & parmi les chevaux Polonois, Hongrois, & Cravates, on trouve force chevaux begus. Les maquignons nient qu’il y ait des chevaux begus. Pour distinguer les begus des jeunes chevaux, on examine s’ils ont les dents courtes, nettes, & blanches ; c’est alors un signe de jeunesse. S’ils ont les dents longues, jaunes, crasseuses & décharnées, quoiqu’ils marquent encore à toutes les dents de devant, c’est un signe que ces chevaux sont vieux & bégus. (V)

BEHEMOTH, s. m. ce mot signifie en général bête