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simple changement de sentimens & de résolutions d’un personnage, pourroit être assez bien maniée pour devenir extrèmement belle, & même préférable à toute autre. Le dénouement du Cinna de Corneille, est à-peu-près dans ce genre. Auguste avoit toutes les raisons du monde de se vanger, il le pouvoit ; il pardonne, & c’est ce qu’on admire : mais cette facilité de dénoüer les pieces, favorable au poëte, ne plairoit pas toûjours au spectateur, qui veut être remué par des évenemens surprenans & inattendus.

Les auteurs qui ont traité de la poétique ont mis en question, si la catastrophe doit toûjours tourner à l’avantage de la vertu ou non ; c’est-à-dire, s’il est toûjours nécessaire qu’à la fin de la piece la vertu soit récompensée, & le vice ou le crime puni. La raison & l’intérêt des bonnes mœurs semblent demander qu’un auteur tâche de ne présenter aux spectateurs que la punition du vice & le triomphe de la vertu : cependant le sentiment contraire a ses défenseurs ; & Aristote préfere une catastrophe qui révolte à une catastrophe heureuse ; parce que l’une, selon lui, est plus propre que l’autre à exciter la terreur & la pitié, qui sont les deux fins de la tragédie. Voy. Passions & Tragédie.

Le P. le Bossu, dans son Traité du Poëme épique, divise la catastrophe (au moins dans l’épopée) en dénouement & fin, & fait résulter cette derniere partie de la premiere. Il la fait consister dans le passage du héros d’un état de trouble & d’agitation, en un état de tranquillité : cette révolution, selon lui, n’est qu’un point sans étendue ou durée, en quoi elle differe du dénouement, qui comprend tout ce qui se trouve après le nœud ou l’intrigue formée. Il ajoûte que dans un même poëme il y a plusieurs dénouemens, parce qu’il y a plusieurs nœuds qui naissent les uns des autres. Ce qu’il appelle fin est le point où se termine le dernier dénouement. Voyez Nœud, Intrigue, Fable. (G)

CATAY, CATHAY, ou KATAY ; voyez l’article Chine.

* CATÉ, (Hist. mod. Comm.) espece de gâteaux ou de tablettes, que les Indiens préparent avec le suc qu’ils savent tirer d’un arbre épineux qu’ils nomment hacchic, dont le bois est dur, compact & pesant. Il porte des feuilles qui ressemblent à celles de la bruyere. Lorsqu’on a tiré ce suc, on le mêle avec une graine réduite en farine, qu’on appelle nachani, qui a à-peu-près le même goût que l’orge, & dont on peut aussi faire de fort bon pain : on y joint encore d’un bois noir réduit en une poudre très-fine. On fait de ce mêlange des petits gâteaux ou tablettes que l’on seche au soleil ; ils sont amers & astringents : on les regarde comme un moyen sûr pour affermir les gencives ; on l’employe aussi dans la diarrhée, & pour sécher les humeurs.

CATEADERES, s. m. (Chimie.) c’est le nom qu’on donne, au Potosi, à ceux qui vont à la découverte des minéraux : ce sont des gens qui parcourent les terres d’un pays pour y trouver les indices des mines. (M)

CATEAU-CAMBRESIS, (Géog.) petite ville de France dans les Pays-Bas au Cambrésis.

CATECHESE, s. f. mot tiré du Grec κατήχησις, qui signifie instruction de vive voix : c’est une courte & méthodique instruction des mysteres de la religion, laquelle se fait de bouche ; car on n’enseignoit pas anciennement ces mysteres par écrit, de peur que ces écrits ne vinssent à tomber entre les mains des infideles, qui les auroient tournés en risée, faute de les bien entendre. C’est d’où est venu le nom de catéchiste, pour marquer celui qui enseigne ces mysteres ; & celui de catéchisme, pour signifier aussi cette ins-

truction. L’origine des catecheses vient de Jesus-Christ

même, lorsqu’il envoya ses disciples pour enseigner & baptiser toutes les nations, joignant la doctrine au baptême, comme en effet elle l’a toûjours précédé dans la primitive Eglise : il nous a aussi donné l’exemple de cette sainte instruction, lorsqu’entre ses disciples il examina & instruisit Philippe ; entre ses auditeurs, Marthe & la Samaritaine ; entre les affligés, l’aveugle né ; entre les étrangers, le Samaritain ; entre les grands du monde, Nicodeme (pour faire connoître le progrès qu’ils avoient fait dans la foi, & les y instruire davantage). Les Apôtres ont suivi l’exemple de leur maître, comme on voit en divers endroits du livre des actes, S. Pierre ayant été envoyé à Corneille pour ce sujet, ch. x. & Philippe à l’eunuque de la reine de Candace, ch. xvij. L’Apôtre des Gentils, 1. cor. ch. xiv. parlant d’instruire les autres, se sert du mot de catéchiser, comme le porte l’original. Les Peres ont de même imité les Apôtres, comme Saint Cyrille de Jérusalem, dont nous avons un ouvrage intitulé catéchese. S. Augustin a écrit un traité de la maniere de catéchiser les ignorans ; S. Gregoire de Nysse a composé un discours catéchétique ; & plusieurs autres nous ont laissé de semblables instructions. Et afin qu’on ne s’imagine pas que quelque tems après la mort des apôtres & de leurs disciples, cette loüable coûtume de cathéchiser ait été négligée ou interrompue, Eusebe, liv. VI. ch. iij. témoigne que Demetrius, évêque d’Alexandrie, avoit commis Origene pour cette fonction, de laquelle Pantenus & Clement s’étoient acquités avant lui. Au reste la charge de catéchiste étoit une des plus importantes & des plus honorables dans l’Eglise. Jean Gerson, chancelier de l’université de Paris, faisoit gloire parmi ses grandes occupations, d’instruire les enfans, & de les catéchiser, répondant à ceux qui lui conseilloient de s’appliquer à des emplois plus considérables, qu’il ne croyoit pas qu’il y en eût de plus nécessaire & de plus glorieux que celui-là. Gerson, I. partie de ses œuvres.

CATÉCHISTE, κατηχιστὴς, officier ecclésiastique, dont la fonction étoit d’enseigner aux catéchumenes le symbole & les premiers élémens de la religion. Voyez Catéchese & Catéchumene.

On choisissoit quelquefois les catéchistes parmi les lecteurs ; on les appelloit quelquefois ναυτολόγοι, nautologi, par allusion à ceux qui dans les vaisseaux recevoient des passagers le prix du transport, & leur expliquoient les conditions du péage, parce que les catéchistes enseignoient aux catéchumenes les conditions nécessaires pour entrer dans l’Eglise, que les Peres & les Écrivains ecclésiastiques comparent souvent à une barque ou à un navire. Leur fonction étoit donc de préparer les catéchumenes au baptême par de fréquentes instructions qu’ils leur faisoient, non pas publiquement, ni dans les églises, du moins dans les premiers siecles à cause des persécutions, mais dans des écoles particulieres, qu’on bâtit ensuite à côté des églises. La plus célebre de ces écoles a été celle d’Alexandrie, & l’on y trouve une suite de catéchistes célebres dans l’antiquité ecclésiastique ; savoir, Pantene établi par l’apôtre S. Marc ; à Pantene succéda Clement d’Alexandrie ; à Clement, Origene ; à Origene, Heraclas ; à celui-ci Denys : quelques-uns ajoûtent Athenodore, Malchion, S. Athanase & Didyme : d’autres rapportent qu’Arius, avant que de tomber dans l’hérésie, étoit chef de cette école. Il y en avoit de semblables à Rome, à Cesarée, à Antioche, & dans toutes les grandes églises. Bingham, Orig. eccl. tom. II. liv. III. ch. xj.

On donne encore aujourd’hui le nom de catéchistes aux clercs & aux prêtres chargés dans chaque paroisse par le curé, de faire les instructions publiques aux enfans, pour leur enseigner les principaux points du