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bien de roseaux de marais, dont l’intervalle des deux nœuds est un cartouche tout fait.

Les gens qui ont beaucoup de patience, les remplissent avec un gros fil-de-fer qui leur sert de baguette ; mais comme c’est un ouvrage trop long, on l’abrege en faisant des paquets de la grosseur du bras, semblables à ceux des allumettes, en sorte qu’on les puisse empoigner ; on en égalise bien les bouts, pour qu’un cartouche ne passe pas l’autre ; puis on les lie foiblement pour ne pas les resserrer, mais assez pour les contenir ensemble.

On met ensuite sur une table de la poudre écrasée dans laquelle on mêle, si l’on veut, un peu d’orpiment, pour donner à son feu une couleur jaunâtre, sur laquelle on appuie le paquet de petits cartouches pour faire entrer la composition dans leurs orifices ; & pour l’y faire tomber plus avant, on le renverse & l’on frappe de l’autre côté ; mais il faut observer que l’orpiment est un poison, & cause des maux de tête lorsqu’on en respire la vapeur : on les retourne pour les appliquer de nouveau sur la matiere, & y en faire entrer de nouvelle ; puis on retourne le paquet sur l’autre bout en frappant comme la premiere fois ; & l’on continue ainsi jusqu’à ce que les petits tuyaux soient pleins : on peut, si l’on veut, y introduire de tems en tems une baguette de bois, un gros fil-de-fer pour bourrer un peu la composition ; ce qui fait mieux ondoyer ces especes de petits serpenteaux. Voyez les Feux d’artifice de Frezier.

CHEVELUS, (les) Géog. mod. l’on nomme ainsi une nation sauvage de l’Amérique méridionale, qui habite au nord du fleuve des Amazones ; elle est très belliqueuse, & laisse croître ses cheveux jusqu’à la ceinture.

CHEVER, v. n. (Jurisp.) dans la coûtume de Reims, art. 373. c’est faire une entreprise, ou empiéter sur la chaussée d’une ville, sur un chemin, ou sur un héritage. M. de Lauriere croit que ce mot vient du Latin capere (A)

Chever, v. act. a deux acceptions chez les Joüailliers ; il se dit de l’action de polir une pierre concave sur une roue convexe : il se dit de l’action de pratiquer à la pierre cette concavité, pour diminuer son épaisseur & éclaircir sa couleur.

Chever, en terme d’Orfévre en grosserie, d : Chauderonnier, de Ferblantier, &c. c’est commencer à rendre concave une piece qui n’est que forgée. Voyez Enfoncer.

CHEVESTRAGE, s. m. (Jurisp.) chevestragium seu capistragium, étoit un droit ou coûtume que les écuyers du roi s’étoient arrogé sur le foin que l’on amene à Paris par eau ; ce droit fut abrogé par S. Loüis, par des lettres de l’an 1256. Voyez Lauriere en son glossaire au mot chevestrage. (A)

CHEVESTRE, s. m. (Charp.) c’est un assemblage de charpenterie qui sert à terminer la largeur des cheminées & autres passages qu’on observe dans les planchers ; les soliveaux y sont soûtenus en s’emmanchant à tenons mordans, ou renforts. Voyez pl. du Charpentier, fig. 18. n°. 14.

Les Serruriers donnent le même nom à une barre de fer soit quarrée, soit plate, soit droite, soit coudée par les deux bouts, ou par un bout seulement qui sert, selon le besoin, à soûtenir les bouts de solives dans les endroits où on les a rognées pour donner passage aux cheminées. Voyez dans nos Planches de la serrurerie des bâtimens, un chevestre.

Chevestre, vieux mot qui signifioit le licol d’un cheval ; s’enchevestrer se dit encore. Voyez s’Enchevestrer.

CHEVET, s. m. on donne ce mot à la partie supérieure d’un lit ; celle où l’on place l’oreiller & le traversin ; la partie opposée s’appelle le pié du lit : on a transporté ce nom à d’autres choses.

Chevet, (Jurisp.) est un droit que quelques seigneurs exigeoient autrefois des nouveaux mariés dans l’étendue de leur seigneurie. La plûpart de ces droits que la force & la licence avoient introduits, ont été abolis dans la suite comme contraires à l’honnêteté & à la bienséance, ou convertis en argent. Il y a encore un droit de chevet dû par les nouveaux mariés dans certaines compagnies. Ce droit autrefois consistoit en un festin qui se donnoit à toute la compagnie ; présentement il est presque par-tout converti en une somme d’argent qui se partage entre tous les confreres du nouveau marié. Les officiers de la chambre des comptes & les conseillers au Châtelet payent en se mariant un droit de chevet. (A)

Chevet, terme d’Architecture : chevet d’église est la partie qui termine le chœur d’une église, le plus souvent de figure ronde, du Latin absis ; c’est ce que les anciens appelloient rond point. (P)

Chevet ou Coussinet, (Fortificat.) est une maniere de petit coin de mire qui sert à lever un mortier. Il se met entre l’affut & le ventre du mortier. Voyez Mortier. (Q)

* CHEVEUX, s. m. petit filament oblong qui part des pores de la peau de la tête, & qui la couvre toute entiere, à l’exception des parties de la face & des oreilles. On donne le nom de poil aux filamens pareils qui couvrent toute la peau d’un grand nombre d’animaux, & aux filamens pareils & plus courts qui couvrent quelques parties du corps humain. Voyez l’article Poil.

Les anciens ont prétendu que ces filamens étoient une espece d’excremens, qu’ils n’étoient nourris que par des matieres grossieres & destinées à l’expulsion ; & conséquemment qu’ils n’étoient point parties du corps animé. Quand on leur demandoit de quelle espece étoient ces excrémens, ils répondoient que c’étoient des parties fuligineuses du sang, qui poussées par la chaleur du corps vers sa superficie, s’y condensoient en passant par les pores. Ils croyoient donner de l’existence & de la clarté à leurs parties fuligineuses, en alléguant des expériences qui, quand elles auroient été toutes vraies, n’en auroient pas eu plus de connexion avec leur mauvaise physiologie ; savoir que les cheveux coupés reviennent très promptement, soit dans les enfans qui ne commencent qu’à végeter, soit dans les vieillards qui sont prêts à s’éteindre ; que chez les étiques les cheveux croissent, tandis que le reste du corps dépérit ; qu’ils reviennent & croissent aux corps morts ; & qu’ils ne se nourrissent & ne croissent point comme les autres parties du corps par intussusception ; c’est-à-dire, par un suc reçû au-dedans d’eux ; mais par juxtaposition, les parties qui se forment poussant en avant celles qui sont formées.

M. Mariotte ayant examiné la végétation des cheveux, crut en effet trouver qu’elle ne ressembloit point à celle des plantes qui poussent leur seve entre leurs fibres & leurs écorces, jusqu’aux extrémités de leurs branches, mais comme les ongles où les parties anciennes avancent devant les nouvelles ; car quand on teint ce qui reste sur la tête de cheveux, après qu’on les a récemment coupés, ce qui étoit près de la peau est d’une couleur différente du reste. Cet académicien paroît s’accorder en cela mieux avec les anciens physiologistes, qu’avec la vérité.

Les cheveux sont composés de cinq ou six fibres enfermées dans une guaine assez ordinairement cylindrique, quelquefois ovale ou à pans ; ce qui s’apperçoit au microscope, même à la vûe simple ; quand les cheveux se fendent, c’est que la guaine s’ouvre, & que les fibres s’écartent.

Les fibres & le tuyau sont transparens ; & cette multiplicité de fibres transparentes doit faire à l’égard des rayons, l’effet d’un verre à facettes : aussi