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tiers dans les gros ouvrages : leur tête a la forme de champignon ; on en voit aux portes cocheres & à celles des granges. Clous à Sellier, ils sont plus petits que les clous de Cordonnier ; & ces ouvriers les employent à cloüer les cuirs sur les bois des carrosses, berlines, & autres voitures. Clous à Serrurier, ils sont depuis quatre jusqu’à huit livres au millier ; ils ont la tête en pointe de diamant ; ils sont faits comme les clous legers, mais ils pesent plus : on les appelle aussi clous communs ; les clous communs pesent le double des clous legers ; & les clous à Serrurier, le double des communs. Clous à soulier, ils servent aux Cordonniers pour ferrer les gros souliers des paysans, des porteurs-de-chaise, &c. il y en a qui pesent depuis deux livres jusqu’à quatre livres au millier, ce sont les plus legers ; les lourds sont ou à deux têtes, ou à caboche. Clous à soufflets, ce sont de très gros clous à tête large, dont on se sert pour cloüer les soufflets des forgerons. Clous sans tête ou pointes ; il y en a de legers ou à la somme, & de lourds ou au poids : les premiers sont depuis trois livres jusqu’à cinq livres au millier ; les autres sont de six livres au millier : ils servent à ferrer les fiches, croisées, & guichets d’armoires. Clous à trois têtes, ils servent aux Cordonniers pour monter les talons des souliers : ils ont deux à trois pouces de long ; la tête en est plate, elle a quatre à cinq lignes de hauteur, elle est divisée en trois par deux rainures ; ces rainures servent à recevoir les tranchans de la tenaille, à les arrêter, & à faciliter l’extraction du clou. Voy. Soulier. Les Cordonniers ont d’autres clous de la même forme, mais moins forts. Voilà les sortes de clous les plus connues ; ce ne sont pas les Cloutiers dont il s’agit ici qui les vendent tous : il y en a qui sont fabriqués & vendus par les Cloutiers d’épingles, qui sont des artistes très-distingués des précédens, comme on verra par ce que nous en dirons dans la suite de cet article.

Il y a encore les clous de rue : c’est ainsi que les Maréchaux appellent les pointes que les chevaux se fichent dans le pié, & qui les font boiter.

Les Lapidaires appellent clou, une cheville fichée dans la table du moulin, près de la roüe à travailler où l’on passe le bois & le cadran. Voyez rs, fig. 6. Planc. du Diamantaire : les Marbriers & Sculpteurs, les nœuds ou parties dures qui se rencontrent dans le marbre : les Bas-lissiers, une cheville ou pince de fer dont ils se servent pour faire tourner leurs ensuples, &c.

Des clous d’épingle. Voici quel est l’attelier & quels sont les outils de ce cloutier. Il a une S ; c’est un fil-de-fer ou d’acier auquel on a donné différens contours, formant des espaces circulaires de différens diametres : ces espaces servent à déterminer le calibre & la grosseur des fils employés pour faire les clous d’épingle. Voyez la Planc. I. du Cloutier, fig. 1. Un engin ou dressoir, qu’on voit Planc. II. fig. 15. C’est une planche de chêne ou d’autre bois, sur laquelle on dispose des clous en zigzag, de maniere cependant que ceux de chaque rang soient tous sur une même ligne : les rangs doivent être paralleles, quoique diversement écartés. Pour se former une idée plus juste de cet instrument, il faut imaginer une planche sur laquelle on a tracé des paralleles à des distances inégales les unes des autres : si l’on suppose chaque ligne divisée en parties égales, & qu’en attachant les clous on ait l’attention de ne pas les faire correspondre à la même division sur les deux lignes correspondantes, & qu’on observe ce procedé sur toutes, on aura la planche préparée pour l’usage auquel on la destine. On fixe l’engin à une table ou à un banc, à l’aide de deux boulons garnis de leurs clavettes. Voyez la fig. 20. Une meule ; l’assortissement de la meule est fait de deux forts poteaux

fixés au plancher & dans la terre ; on y en-arbre la roüe de maniere qu’elle puisse tourner librement : cette roüe communique à la meule par une corde qui passe dans une gorge creusée sur sa circonférence, de-là dans une poulie adaptée à l’axe de la meule. La meule est d’acier trempé, elle a depuis trois jusqu’à cinq pouces de diametre, sur deux à trois d’épaisseur ; sa circonférence est taillée en lime. Cette meule & ses dépendances sont portées sur deux petits tourillons de cuivre ou de fer, placés dans deux petits montans ou poupées pratiquées à une base circulaire, qui est fixée fortement sur un bâti composé de deux tretaux & de quelques planches qu’on y attache ; sur cette base, on ajuste une espece de caisse appellée tabernacle. Voyez Planche II. fig. 11. & 12. A, est la partie antérieure supérieure du tabernacle : on voit au milieu un petit chassis de bois garni d’un verre posé d’une maniere inclinée ; il sert à empêcher les étincelles de feu qui s’échappent continuellement de la meule, de frapper les yeux de celui qui affile. La meule & tout son équipage se voyent fig. 11. & 12. on les voit seulement de face avec le banc qui sert de base, dans la fig. 12. Un banc à couper, qu’on a représenté en entier fig. 13. il est composé d’un fort banc & d’une grosse cisaille ; à un des longs & à un des petits côtés, il y a de hautes planches qui servent à retenir les morceaux de fil-de-fer, à mesure qu’on les coupe ; partout ailleurs il y a des rebords, excepté en un endroit qui sert à tirer les pointes : il faut que cet instrument soit disposé de maniere à fatiguer le moins qu’il est possible le coupeur. Un étau ; il est de figure ordinaire : on le voit Plan. II. fig. 14. Un mordant, qu’on voit figure 16. c’est un composé de deux morceaux de fer, dont les têtes sont acérées : ces morceaux circulaires sont assemblés à charniere, & leur mouvement est libre ; on a pratiqué à la tête de chaque branche & en-dehors, une retraite dont l’usage est de retenir le mordant toûjours dans la même situation, lors même qu’on l’ouvre pour en faire sortir la pointe dont on vient de faire la tête. A la partie supérieure & intérieure de la tête du mordant, il y a de petites cannelures propres à recevoir la pointe ; elles sont faites de maniere que l’entrée en est plus large que le bas : ces cannelures se renouvellent à l’aide du poinçon qu’on voit fig. 17. 18. Pour abreger le travail de l’ouvrier, qui seroit contraint d’écarter les deux branches du mordant à chaque tête qu’il voudroit faire, on a placé entre elles un V d’acier dont les extrémités recourbées portent perpendiculairement contre les faces intérieures du mordant ; on met sous le mordant une calote de chapeau, pour recevoir les clous à mesure qu’il en tombe. Voyez, figure 14. le mordant, l’étau, la calote, & le clou prêt à être frappé. Un vannoir, c’est un grand bassin de bois fort plat, qu’on voit Planche I. fig. 7. dans lequel on agite les pointes de laiton ou de fer pour les rendre claires. Un poinçon à étamper (Voyez Pl. II. fig. 21.) ; il est petit & quarré : on a pratiqué à sa base un trou fait en calote. Cela bien compris, il ne sera pas difficile d’entendre la maniere de fabriquer le clou d’épingle.

On appelle clou d’épingle, un petit morceau de fil-de-fer ou de laiton, aiguisé en pointe par un bout, & refoulé par l’autre bout. Il y en a de différentes grosseurs & longueurs. La premiere opération consiste à esser : esser le fil, c’est le présenter à un des espaces circulaires de l’S, pour connoître s’il est du calibre qu’on souhaite. Après l’avoir essé, on le dresse : pour le dresser, on le force à passer à-travers les rangs de pointes de l’engin ; cette manœuvre lui ôte toutes ses petites courbures. Quand il est dressé, on le coupe de la longueur de quinze à dix-huit pouces ; on se sert pour cela de la cisoire, fixée sur