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Oui : b-oüi-s, l-oüi-s, en prose ; ce dernier mot est de deux syllabes en vers ; oüi, ita.

Oüi, ce sont ces plaisirs & ces pleurs que j’envie.
Oüi, je t’acheterai le praticien françois. Racine.

Ouin : bara-g-oüin, ba-b-oüin.

Ue : statue éq-ue-stre, ca-s-ue-l, an-ue-l, éc-ue-le, r-ue-le, tr-ue-le, sur-tout en prose.

Ui : l-ui, ét-ui, n-uit, br-uit, fr-uit, h-uit, l-ui-re, je s-uis, un s-ui-s-se.

Uin : Al-c-uin théologien célebre du tems de Charlemagne. Q-uin-quagésime, prononcez quin comme en latin ; & de même Q-uin ti-l-ien, le mois de J-uin. On entend l’u & l’i nasal.

Je ne parle point de Caën, Laon, paon, Jean, &c. parce qu’on n’entend plus aujourd’hui qu’une voyelle nasale en ces mots-là, Can, pan, Jan, &c.

Enfin il faut observer qu’il y a des combinaisons de voyelles qui sont diphthongues en prose & dans la conversation, & que nos poëtes font de deux syllabes.

Un de nos traducteurs a dit en vers,

Voudrois-tu bien chanter pour moi, cher Licidas,
Quelqu’air si-ci-li-en. Longepierre ?

On dit si-ci-lien en trois syllabes dans le discours ordinaire. Voici d’autres exemples.

La foi, ce nœud sacré, ce li-en pré-ci-eux.

Brebeuf.

Il est juste, grand roi, qu’un meurtri-er périsse.

Corneille.

Allez, vous devri-ez mourir de pure honte. Mol.

Vous perdri-ez le tems en discours superflus.

Fontenelle.

Cette fiere raison dont on fait tant de bruit,
Contre les passi-ons n’est pas un sûr remede.

Deshoulieres

Non, je ne hais rien tant que les contorsi-ons
De tous ces grands faiseurs de protestati-ons.

Moliere.

La plûpart des mots en ion & ions sont diphthongues en prose. Voyez les divers traités que nous avons de la versification françoise.

Au reste, qu’il y ait en notre langue plus ou moins de diphthongues que je n’en ai marqué, cela est fort indifférent, pourvû qu’on les prononce bien. Il est utile, dit Quintilien, de faire ces observations ; César, dit-il, Cicéron, & d’autres grands hommes, les ont faites ; mais il ne faut les faire qu’en passant. Marcus Tullius orator, artis hujus diligentissimus fuit, & in filio ut in epistolis apparet. . . . . Non obstant hæ disciplinæ per illas euntibus, sed circa illas hærentibus. Quint. instit. orat. lib. I. cap. vij. in fine. (F)

* DIPLETHRUM, s. m. (Hist. anc.) mesure des champs à l’usage des Grecs ; c’étoit le double du plethrum. Le plethrum étoit de 125 piés quarrés, & par conséquent le diplethrum du double.

DIPLOÉ, s. m. terme d’Anatomie, substance spongieuse & qui sépare les deux tables du crane, & forment avec elles le crane. Voyez Crane.

La substance du diploé étant spongieuse, s’imbibe aisément du sang, & se trouve partagée en une infinité de petites cellules de différentes grandeurs, qui reçoivent les petites branches des arteres de la dure-mere, & donnent issue aux petites veines qui vont se rendre dans ses sinus. Chambers. (L)

DIPLOIS, s. m. (Hist. anc.) c’est un mot grec qui signifie un habit double ou un manteau double. On dit que les anciens ne doubloient pas leurs habits, & qu’ils appelloient diplois ou habits doubles ceux qui étoient si vastes, qu’on pouvoit les replier & les remettre doubles : tels étoient les manteaux des philosophes cyniques ; ils les replioient autour d’eux

pour ne se pas découvrir entierement à nud, parce qu’ils n’avoient point de tuniques par-dessous. Horace parlant de Diogene le cynique, liv. I. ép. 17. dit, contra quem duplici panno patientia velat.

Le psalmiste prie Dieu de confondre ceux qui le déchiroient par leur médisance, & de les couvrir de honte comme d’un habit doublé : operiantur sicut diploide confusione suâ. Mais l’hébreu meil signifie proprement un manteau ou habit de dessus. Baruch a aussi employé le terme diplois, ch. v. vers. 2. mais comme nous ne l’avons pas en hébreu, nous ne pouvons dire ce qu’il a voulu marquer par ce mot. Calmet, dict. de la bible. (G)

DIPLOME & DIPLOMATIQUE. Les diplomes sont des actes émanés ordinairement de l’autorité des rois, & quelquefois de personnes d’un grade inférieur. Diplomata sunt privilegia & fundationes imperatorum, regum, ducum, comitum, &c. AntoniusMatth. notation. ad Egmundan. chronic. cap. xvij. Ce seroit ce qu’on pourroit aujourd’hui nommer des lettres patentes. Si ce terme vient du grec, comme on l’en soupçonne, il signifieroit le duplicata ou la copie double d’un acte ; peut-être parce qu’il s’en gardoit un exemplaire ou des minutes, ainsi qu’il se fait depuis long-tems, soit dans les lettres des princes, soit dans presque tous les actes qui se passent entre particuliers chez les notaires.

Du terme de diplome est sorti celui de diplomatique, qui est la science & l’art de connoître les siecles où les diplomes ont été faits, & qui suggere en même tems les moyens de vérifier la vérité & la fausseté de ceux qui pourroient avoir été altérés, contrefaits, & imités, pour les substituer quelquefois à des titres certains & à de véritables diplomes ; ce qui s’est pratiqué, ou pour réparer la perte qu’on auroit faite des vrais diplomes, ou pour augmenter les graces, droits, priviléges, immunités, que les princes ont accordés à quelques communautés ecclésiastiques ou séculieres.

J’ai dit que la diplomatique étoit la science & l’art de discerner les vrais titres d’avec ceux qui étoient ou faux ou supposés : par-là on voit qu’elle renferme quelque partie de science, par l’usage qu’on doit faire dans ce discernement de la connoissance exacte de la chronologie qui étoit différemment pratiquée chez les différentes nations. Ainsi l’ancienne chronologie d’Espagne n’étoit pas la même que la nôtre ; & celle des Grecs & des Orientaux en est encore plus éloignée ; mais celle d’Italie l’est beaucoup moins. Cette partie est essentielle, parce qu’il est quelquefois arrivé de mettre dans ces sortes d’actes falsifiés une chronologie qui n’étoit pas encore en usage parmi nous. Une autre portion de science qui entre dans le discernement des diplomes, est la connoissance des mœurs & du style diplomatique de chaque siecle ; ce qui demande beaucoup de recherches & de réflexions. L’art y entre aussi pour quelque chose ; il consiste à savoir distinguer les écritures des divers tems & des différentes nations ; l’encre dont on s’est servi ; les parchemins & autres matieres qu’on y employoit ; les sceaux aussi-bien que la maniere de signer & d’expédier tous ces actes : voilà ce qui concourt à l’usage de la diplomatique.

On donne aussi aux diplomes le nom de titres & de chartes : comme titres, ils servoient & servent encore pour appuyer des droits légitimes, ou pour se maintenir dans la possession de certains priviléges, graces, & immunités : on les a nommés chartes, à cause de la matiere sur laquelle ils étoient écrits, qui de tout tems a été appellée par les Grecs χάρτης ou χάρτον, & par les Latins même de la pure latinité charta, & quelquefois membrana. Cicéron ne s’est pas moins servi de ces deux termes que du mot diploma.