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couronne, d’où suit un délabrement dans le pié, un desséchement, une difformité dans le sabot, qui rendent le plus souvent, comme nous l’avons dit, l’animal inutile.

Si au contraire on suit les regles de l’art à l’égard du clou de rue, on panse la plaie toutes les 24 heures ; mais en ôtant l’appareil, il arrive dans la partie déchirée par la dessolure une hémorrhagie qui dérobe au Maréchal l’état de la plaie, & l’empêche d’en observer les accidens & les progrès ; l’inflammation redouble par les nouvelles secousses & compressions que reçoivent les parties affectées, la sole surmonte par l’inégalité des compressions, la plaie s’irrite, la fievre survient, les liqueurs s’aigrissent, enfin à chaque pansement l’on aggrave la maladie au lieu de la modérer. Il s’ensuit qu’on ne peut traiter la plaie du clou de rue comme elle doit l’être, sans manquer à ce qu’exige le traitement de la dessolure, ou qu’on ne peut traiter la dessolure comme elle doit l’être, sans manquer à ce qu’exige le traitement du clou de rue, ce qui démontre le danger d’une méthode qui complique deux maladies dont les pansemens sont incompatibles.

Cure du clou de rue simple. Le clou de rue est plus ou moins difficile à guérir, selon la partie que cette blessure a affectée : il y en a de superficielles qui n’intéressent que la substance des chairs, soit à la fourchette, soit à la sole ; quoiqu’elles fournissent beaucoup de sang, elles se guérissent facilement en y procurant une prompte réunion par le secours de quelques huiles, baumes, onguens, vulnéraires, tels que nous les avons indiqués dans le traitement des encloüeures simples, & même en y fondant du suif, de la cire à cacheter, ou de l’huile boüillante, ou quelque liqueur spiritueuse, & le plus souvent elles se guérissent d’elles-mêmes sans aucun médicament : c’est de cette facilité de guérison, que beaucoup de gens se croyent en possession d’un remede spécifique à cet accident ; dans tous les cas ils le croyent merveilleux, & le soûtiennent tel avec d’autan. plus de confiance qu’ils l’ont vû éprouver ou qu’ils l’ont éprouvé eux-mêmes avec succès ; ils ne sont pas obligés de savoir que l’accident que ce remede a guéri, se seroit guéri sans remede.

Cure pour le clou de rue grave & compliqué. 1°. Le jour qu’on a fait l’extraction du corps étranger, on doit déferrer le pié boiteux, le bien parer, amincir la sole, fondre dans le trou de la piquûre (sans y faire aucune incision) quelques médicamens propres à prévenir ou calmer les accidens qui doivent suivre le genre de blessure, & mettre une emmiellure dans le pié, après avoir rattaché le fer. 2°. Deux ou trois jours après que l’accident est arrivé, tems auquel la suppuration est établie, on doit faire une ouverture à l’endroit du clou de rue, & enlever simplement de la corne (sans faire venir du sang) une partie proportionnée à la gravité du mal ; cette ouverture doit être faite & conduite avec beaucoup d’adresse & d’intelligence pour éviter les accidens qu’un instrument mal conduit, ou des remedes mal appliqués, peuvent causer dans une partie aussi délicate & aussi composée, & c’est de quoi mille exemples nous ont appris à ne pas nous rendre garants. Les remedes que l’on peut employer avec le plus de fruit au traitement du clou de rue compliqué, sont l’huile rouge de terebenthine dulcifiée, que l’on doit faire un peu chauffer, le baume du Pérou ou de Copahu, l’un ou l’autre de ces médicamens mêlé avec de l’huile, des jaunes d’œufs ; on trempe dans l’un de ces remedes des plumaceaux mollement faits, que l’on introduit dans l’ouverture ; on met une éclisse par-dessus pour contenir l’appareil, un défensif autour du sabot, comme nous l’avons indiqué dans le traitement des encloüeures ; l’on doit tenir la plaie ou-

verte tant qu’elle ne présente point d’indication à la

réunion ; répéter ce pansement chaque jour, & changer de médicamens selon le cas : par exemple, s’il y a quelque partie à exfolier, on doit se servir des exfoliatifs, les uns propres à exfolier les os, & les autres le tendon (voyez Exfoliatif). On ne doit pas négliger la saignée, plus ou moins répétée, suivant les circonstances ; enfin lorsque la plaie est en voie de guérison, que les grands accidens sont calmés, on doit éloigner le pansement, pour éviter les impressions de l’air.

Telle est cette méthode, aussi simple qu’elle est peu dangereuse ; nous observons en finissant, que nous n’employons point au clou de rue compliqué, non plus qu’à l’encloüeure grave, les digestifs, les suppuratifs, ni la teinture de myrrhe, ni celle d’aloès, ni tous ces baumes & onguens vulnéraires, que tant de praticiens appliquent à cette blessure avec si peu de fruit & avec un danger certain. Toutes les fois que le clou de rue a piqué ou contus le tendon, l’aponévrose, le périoste, ou enfin quelque cordon de nerf, ces sortes de médicamens qui contiennent des sels âcres, ne manquent pas d’augmenter la douleur, l’inflammation, & les autres accidens qui accompagnent ces lésions, & font souvent une maladie incurable, d’un accident qu’un traitement doux & simple auroit guéri en peu de jours. Cet article nous a été fourni par M. Genson.

* ENCLUME, s. f. instrument commun à presque tous les ouvriers qui employent les métaux ; on y distingue plusieurs parties dont nous ferons mention. Il faut la considerer en général comme une masse plus ou moins considérable de fer aciéré, sur laquelle on travaille au marteau différens ouvrages en fer, en acier, en or, en argent, en cuivre, &c. Il y a des enclumes de toutes grosseurs. Il y en a de coulées ; il y en a de forgées. Voyez dans nos planches l’attelier & les différentes manœuvres d’un forgeur d’enclumes.

Pour forger une enclume, on commence par avoir une masse de fer telle qu’on la voit en a ; cette masse s’appelle mise. On voit vignette de la planche en aa, la forge à forger les mises. La figure premiere représente un enfant qui fait aller le soufflet.

On a une barre b qu’on appelle ringale, on soude cette barre à la mise, comme on le voit en c : par ce moyen, on a une espece de poignée ou de queue à l’aide de laquelle on meut l’ouvrage commodément. On voit en ed, deux mises avec leurs ringales soudées ensemble ; & en f, un corps d’enclume formé de quatre mises.

Comme les parties dont on forme un corps d’enclume, sont des masses de fer considérables qu’on auroit de la peine à remuer, soit à la forge, soit sur l’enclume ; pour se soulager dans ce travail, les ouvriers se servent d’un long instrument de bois, au bout duquel est une barre de fer arrêtée ; c’est si l’on veut la queue d’une mise. On voit dans la vignette fig. 2 & 3, la forge & l’enclume à forger les corps ; un des forgerons est assis sur la jauge, & meut la masse qui est à la forge, par le poids de son corps & l’action de ses jambes ; un autre forgeron travaille cette masse en attisant le feu ; d’autres font aller les soufflets avec leurs piés. On voit autour de la forge & de l’enclume, m, n, o, p, q, x, les marteaux à forger & la tranche ; rr, est un étang où l’on trempe les enclumes.

Lorsque l’enclume ne s’acheve pas dans l’endroit où le corps ou billot s’est forgé, on prend ce billot, on le met à la forge, on le fait chauffer ; & on le prépare à recevoir les autres parties qui forment l’enclume, en le refoulant par les deux bouts ; & s’il a conservé assez de chaleur, en y pratiquant quatre trous quarrés, un au milieu de chaque bout, & un