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& un cheval qui s’attrape : celui qui s’entre-taille, se frappe toûjours au même lieu ; il y a communément entamure ou plaie, & le poil s’y montre toûjours hérissé : celui qui s’attrape, s’atteint au contraire & se heurte en différens endroits ; & comme la partie contuse n’est pas toûjours la même, le heurt n’y fait pas d’impression visible & apparente. Selon le plus ou le moins de sensibilité dans la partie sur laquelle a porté le coup, l’animal boîte le pas qui suit, & ne boîte plus après en avoir cheminé quelques autres. Quand il est las, il bronche en s’attrapant ; il tombe même, si son allure est pressée, ou s’il galope, Ce défaut doit faire rejetter un cheval ; il est d’autant plus essentiel, qu’il est comme impossible d’y remédier. Il provient de l’action des jambes qui se croisent sans cesse ; & il est certain que si la bonne école n’a pû rien opérer, il n’est produit que par une grande foiblesse, contre laquelle tous les secours de l’art seront toûjours impuissans.

Il n’en est pas ainsi de l’entre-taillure ; on peut y obvier par la voie de la ferrure, soit que l’animal s’entre-taille d’un pié, de deux, ou de tous les quatre ensemble. Voyez Ferrure. (e)

ENTRE-COURS, s. m. (Jurisp.) étoit anciennement une société contractée entre deux seigneurs, au moyen de laquelle les sujets d’un seigneur, qui alloient demeurer ou se marier dans la terre d’un autre seigneur, devenoient eux & leurs enfans sujets de ce dernier seigneur. C’est ainsi que le terme d’entre-cours est entendu dans quelques anciennes chartres, dont le glossaire de Ducange fait mention au mot inter-cursus : à quoi se rapporte encore le chap. 45 des coûtumes de Beauvoisis, par Beaumanoir.

Il arrivoit souvent par-là qu’un roturier qui étoit franc dans un lieu, devenoit serf dans un autre, parce qu’en transférant son domicile dans un lieu où les sujets du seigneur étoient serfs, & y demeurant par an & jour, le seigneur du lieu en acquéroit la saisine, & l’homme franc devenoit de même condition que les autres sujets serfs. Pour parer à cet inconvénient, quelques seigneurs faisoient entr’eux des sociétés par rapport à leurs sujets, suivant lesquelles les sujets de l’un pouvoient librement & sans danger de perdre leur franchise, aller demeurer dans la seigneurie de l’autre seigneur, & même s’y marier avec une personne serve ou sujete de ce seigneur. Ces sociétés furent aussi nommées entre cours, & le droit qui en résultoit en faveur des sujets, fut appellé droit d’entre-cours.

Au moyen de cet entre-cours, l’homme franc ou bourgeois qui passoit d’une seigneurie dans une autre, devenoit bien l’homme ou sujet du dernier seigneur, mais il conservoit sa franchise.

Il y avoit un pareil entre-cours entre les comtes de Champagne & les comtes de Bar, comme il se voit dans les articles 78 & 79 de la coûtume de Vitry.

Le premier de ces articles porte que par l’entre-cours gardé & observé entre les pays de Champagne & Barrois, quand aucun homme ou femme né du Barrois, vient demeurer au bailliage de Vitry, il est acquis de ce même fait au roi, & lui doit sa jurée, comme les autres hommes & femmes de jurée demeurans audit bailliage ; que le roi est en possession & saisine de la lever ainsi sur eux ; & que quand tels hommes ou femmes nés en Barrois, & demeurans au bailliage de Vitry, vont de vie à trépas sans héritier légitime demeurant avec eux audit pays, & qui soit regnicole à l’heure de leur trépas, le roi représente l’héritier absent, leur succede, & prend leurs biens au moyen dudit entre-cours.

L’article suivant porte que pareillement si quelqu’un du comté de Champagne va demeurer au duché de Bar, il est acquis au seigneur duc, au moyen dudit entre-cours ; que s’il y décede, ses enfans nés

avec lui audit pays & duché au jour de son trépas, ne succedent en ses biens assis & situés audit bailliage, mais qu’ils appartiennent au roi par droit d’attrayere, qui représente lesdits enfans absens ; mais s’il y avoit des héritiers prochains, demeurans au bailliage de Vermandois, tels héritiers lui succéderoient.

Les seigneurs dérogeoient aussi au droit de mainmorte, par rapport au mariage de leurs serfs ; & par les traités d’entre-cours qu’ils faisoient entr’eux à ce sujet, le serf de l’un pouvoit librement, & sans peine de for-mariage, se marier avec une personne serve d’un autre seigneur. Voyez le glossaire de Lauriere, au mot entre-cours.

On trouve des exemples de ces entre-cours, tant par rapport au domicile que pour les mariages, dans l’histoire de Verdun, aux preuves, pag. 13 & 14.

Le droit d’entre-cours est quelquefois appellé parcours, quoique ce dernier terme s’applique plus ordinairement aux conventions qui ont trait à la réciprocité du pâturage entre deux seigneuries. Voyez Parcours. (A)

ENTRE DUERO-E-MINHO, (Géog. mod.) c’est une des provinces du Portugal ; elle a environ dix-huit lieues de longueur sur autant de largeur. Brague en est la capitale.

ENTRE-DEUX, s. m. (Drap.) il se dit de quelques endroits d’une étoffe, où elle n’a pas été tondue assez ras. On ne répare ce défaut qu’en y repassant la force.

ENTRÉE, s. f. (Grammaire.) se dit généralement au simple, de toute ouverture qui conduit du dehors d’un lieu au-dedans de ce lieu. Ce mot se prend au figuré, pour le commencement, le début.

Entrée, se dit, en Astronomie, du moment auquel le Soleil ou la Lune commence à parcourir un des signes du zodiaque. Ainsi on dit l’entrée du Soleil ou de la Lune dans le Bélier, dans le Taureau, &c. Voyez Signe, Soleil, &c.

On se sert aussi du mot entrée dans ces phrases : l’entrée de la Lune dans l’ombre, dans la pénombre, &c. Voyez Eclipse. (O)

Entrées, s. f. pl. (Hist. anc.) privilége accordé à des particuliers d’être admis auprès des rois & des princes, dans certains tems & à certaines heures.

La coûtume des rois, des princes, & des grands seigneurs, de distinguer leurs courtisans & les personnes qui leur sont attachées par les différentes entrées qu’ils leur donnent chez eux, est une coûtume sort ancienne. Séneque, dans son livre IV. des bienfaits, chap. xxjv. nous instruit que C. Gracchus & Livius Drusus, tribuns du peuple, en furent les auteurs à Rome. « Parmi nous, dit-il, Gracchus & après lui Livius Drusus, ont commencé à séparer la foule de leurs amis & de leurs courtisans, en recevant les uns en particulier, les autres avec plusieurs, & les autres avec tout le monde ».

Les premiers étoient appellés propiores, ou primi amici, ou primæ admissionis ; les amis de la premiere entrée : les seconds, secundi amici, ou secundæ admissionis ; les amis de la seconde : & les derniers, inferiores amici, ou ultimæ admissionis ; les amis qui n’avoient que les dernieres entrées.

Cet usage qui avoit été long-tems interrompu, & qui ne subsistoit point à la cour d’Auguste, fut rétabli par Tibere, qui, comme Suétone nous l’apprend, partagea sa cour en ces trois classes, & appella la derniere la classe des Grecs ; parce que les Grecs étoient des gens dont on faisoit alors peu de cas, & qui n’entroient que les derniers chez cet empereur.

La coûtume dont je parle se perdit encore après Tibere ; elle fut renouvellée par d’autres empereurs, & elle prit enfin de si fortes racines sous Constantin, qu’elle s’est toûjours conservée depuis, & qu’il n’y a