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blies plusieurs lames de plomb, posées de champ de la hauteur de quatre pouces. Ces lames forment plusieurs circonvallations, & la machine entiere s’appelle exhalatoire. La destination de l’exhalatoire est d’évaporer quelques parties de l’eau douce, en profitant de la chaleur qui sort par les tranchées ou cheminées de la grande poesle, & de dégourdir l’eau avant qu’elle tombe dans la grande chaudiere.

EXHAUSSEMENT, s. m. (Architect.) c’est une hauteur ou une élevation ajoûtée sur la derniere plinte d’un mur de face, pour rendre l’étage en galetas plus logeable. On dit aussi qu’une voûte, qu’un plancher, &c. a tant d’exhaussement. (P)

EXHAUSTION, s. f. terme de Mathématiques. La méthode d’exhaustion est une maniere de prouver l’égalité de deux grandeurs, en faisant voir que leur différence est plus petite qu’aucune grandeur assignable ; & en employant, pour le démontrer, la réduction à l’absurde.

Ce n’est pourtant pas parce que l’on y réduit à l’absurde, que l’on a donné à cette méthode le nom de méthode d’exhaustion : mais comme l’on s’en sert pour démontrer qu’il existe un rapport d’égalité entre deux grandeurs, lorsqu’on ne peut pas le prouver directement, on se restraint à faire voir qu’en supposant l’une plus grande ou plus petite que l’autre, on tombe dans une absurdité évidente : afin d’y parvenir, on permet à ceux qui nient l’égalité supposée, de déterminer une différence à volonté ; & on leur démontre que la différence qui existeroit entre ces grandeurs (en cas qu’il y en eût) seroit plus petite que la différence assignée ; & qu’ainsi cette différence ayant pû être supposée d’une petitesse qui, pour ainsi dire, épuisât toute grandeur assignable, c’est une nécessité de convenir que la différence entre ces grandeurs s’évanoüit véritablement. Or c’est cette petitesse indicible, inassignable, & qui épuise toute grandeur quelconque, qui a fait donner à la méthode présente le nom de méthode d’exhaustion, du mot latin exhaustio, épuisement.

La méthode d’exhaustion est fort en usage chez les anciens géometres, comme Euclide, Archimede, &c. Elle est fondée sur ce théorème du dixieme livre d’Euclide, que des quantités sont égales lorsque leur différence est plus petite qu’aucune grandeur assignable ; car si elles étoient inégales, leur différence pourroit être assignée ; ce qui est contre l’hypothèse.

C’est d’après ce principe qu’on démontre que, si un polygone régulier d’une infinité de côtés est inscrit ou circonscrit à un cercle, l’espace qui constitue la différence entre le cercle & le polygone s’épuisera & diminuera par degrés ; de sorte que le cercle deviendra égal au polygone. Voyez Quadrature, Polygone, &c. Voyez aussi Limite, Infini, &c. (E)

Le calcul différentiel n’est autre chose que la méthode d’exhaustion des anciens, réduite à une analyse simple & commode ; c’est la méthode de déterminer analytiquement les limites des rapports ; la métaphysique de cette méthode est expliquée très-clairement au mot Différentiel.

EXHÉRÉDATION, s. f. (Jurispr.) est une disposition, par laquelle on exclut entierement de sa succession ou de sa légitime en tout ou en partie, celui auquel, sans cette disposition, les biens auroient appartenu comme héritier, en vertu de la loi ou de la coûtume, & qui devoit du moins y avoir sa légitime.

Prononcer contre quelqu’un l’exhérédation, c’est exheredem facere, c’est le deshériter. Ce terme deshériter signifie néanmoins quelquefois déposséder ; & deshéritance n’est point synonyme d’exhérédation, il signifie seulement dessaisine ou dépossession.

Pour ce qui est du terme d’exhérédation, on le prend quelquefois pour la disposition qui ôte l’hoirie, quelquefois aussi pour l’effet de cette disposition, c’est-à-dire la privation des biens que souffre l’héritier.

Dans les pays de droit écrit, tous ceux qui ont droit de légitime doivent être institués héritiers, du moins pour leur légitime, ou être deshérités nommément, à peine de nullité du testament ; de sorte que dans ces pays l’exhérédation est tout-à-la-fois une peine pour ceux contre qui elle est prononcée, & une formalité nécessaire pour la validité du testament, qui doit être mise à la place de l’institution, lorsque le testateur n’institue pas ceux qui ont droit de légitime.

En pays coûtumier où l’institution d’héritier n’est pas nécessaire, même par rapport à ceux qui ont droit de légitime, l’exhérédation n’est considérée que comme une peine.

La disposition qui frappe quelqu’un d’exhérédation est réputée si terrible, qu’on la compare à un coup de foudre : c’est en ce sens que l’on dit, lancer le foudre de l’exhérédation ; ce qui convient principalement lorsque le coup part d’un pere justement irrité contre son enfant, & qui le deshérite pour le punir.

L’exhérédation la plus ordinaire est celle que les pere & mere prononcent contre leurs enfans & autres descendans ; elle peut cependant aussi avoir lieu en certains pays contre les ascendans, & contre les collatéraux, lorsqu’ils ont droit de légitime, soit de droit ou statutaire.

Mais une disposition qui prive simplement l’héritier de biens qu’il auroit recueillis, si le défunt n’en eût pas disposé autrement, n’est point une exhérédation proprement dite.

Il y a une quatrieme classe de personnes sujettes à une espece d’exhérédation, qui sont les vassaux ; comme on l’expliquera en son rang.

Toutes ces différentes sortes d’exhérédations sont expresses ou tacites.

Il y a aussi l’exhérédation officieuse.

Suivant le droit romain, l’exhérédation ne pouvoit être faite que par testament, & non par un codicile ; ce qui s’observoit ainsi en pays de droit écrit : au lieu qu’en pays coûtumier il a toûjours été libre d’exhéréder par toutes sortes d’actes de derniere volonté. Mais présentement, suivant les articles 15 & 16 de l’ordonnance des testamens, qui admettent les testamens olographes entre enfans & descendans, dans les pays de droit écrit ; il s’ensuit que l’exhérédation des enfans peut être faite par un tel testament, qui n’est, à proprement parler, qu’un codicile.

On va expliquer dans les subdivisions suivantes, ce qui est propre à chaque espece d’exhérédation. (A)

Exhérédation des Ascendans : dans les pays où les ascendans ont droit de légitime dans la succession de leurs enfans ou autres descendans, comme en pays de droit écrit & dans quelques coûtumes, ils peuvent être deshérités pour certaines causes par leurs enfans ou autres descendans, de la succession desquels il s’agit.

Quoique cette exhérédation ne soit permise aux enfans, que dans le cas où les ascendans ont grandement démérité de leur part, on doit moins en ces cas la considérer comme une peine prononcée de la part des enfans, que comme une simple privation de biens dont les ascendans se sont rendus indignes ; car il ne convient jamais aux enfans de faire aucune disposition dans la vûe de punir leurs pere & mere ; c’est un soin dont ils ne sont point chargés : ils doivent toûjours les respecter, & se contenter de disposer de leurs biens, suivant que la loi le leur permet.

Le droit ancien du digeste & du code, n’admettoit aucune cause pour laquelle il fût permis au fils d’exhéréder son pere.