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état ; & les substances alimentaires qu’on donne ensuite à l’animal, les y confirment. Quant au marasme, que quelques écrivains présentent comme un signe assûré & non équivoque de la faim-vale, on peut leur objecter que la maigreur des chevaux qui en ont été atteints, est telle que celle que nous reprochons à ceux que nous disons être étroits de boyau, & qui ont ordinairement trop de feu & trop de vivacité. Il est vrai que si les accidens dont il s’agit étoient répetés & fréquens, ils appauvriroient la masse, & rendroient les sucs regénérans acres & incapables de nourrir, & donneroient enfin lieu à l’atrophie ; mais il est facile de les prévenir en ménageant l’animal, en ne l’outrant point par des travaux forcés, & en le maintenant dans toute sa vigueur par des alimens capables de réparer les pertes continuelles qu’il peut faire. (e)

Faim, (la) Mythol. divinité des poëtes du Paganisme, à laquelle on ne s’adressoit que pour l’éloigner ; & c’étoit-là la conduite qu’on tenoit sagement avec les divinités malfaisantes. Les Poëtes plaçent la faim à la porte de l’enfer, de même que les maladies, les chagrins, les soins rongeans, l’indigence & autres maux, dont ils ont fait autant de divinités.

Les Lacédémoniens avoient à Chalcioëque, dans le temple de Minerve, un tableau de la faim, dont la vûe seule étoit effrayante. Elle étoit représentée dans ce temple sous la figure d’une femme have, pâle, abattue, d’une maigreur effroyable, ayant les tempes creuses, la peau du front seche & retirée ; les yeux éteints, enfoncés dans la tête ; les joues plombées, les levres livides ; enfin les bras & les mains décharnées, liées derriere le dos. Quel triste tableau ! Il devroit être dans le palais de tous les despotes, pour leur mettre sans cesse sous les yeux le spectacle du malheureux état de leurs peuples ; & dans le sallon des Apicius, qui, insensibles à la misere d’autrui, dévorent en un repas la nourriture de cent familles. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

FAINE, s. f. (Jardinage.) est le fruit d’un arbre appellé hêtre, que l’on mange, & qui a le goût d’une noisette : dans les famines on en fait du pain. (K)

FAINOCANTRATON, s. m. (Hist. nat.) espece de lésard de l’île de Madagascar, qui est d’une grandeur médiocre. Il s’attache si fortement aux arbres, qu’on croiroit qu’il y est collé. Il tient toûjours sa gueule ouverte, afin d’attraper des mouches & autres insectes dont il se nourrit. Les habitans du pays en ont grande peur, parce qu’on prétend qu’il saute au cou de ceux qui en approchent, & s’y applique si fortement, qu’on a beaucoup de peine à s’en débarrasser. Hubner, dictionn. univ.

* FAIRE, v. act. (Gramm.) Excepté les auxiliaires être & avoir, il n’y a peut-être aucun autre verbe dont l’usage soit plus étendu dans notre langue que celui du verbe faire. Etre désigne l’existence & l’état ; avoir, la possession ; & faire, l’action. Nous n’entrerons point dans la multitude infinie des applications de ce mot ; on les trouvera aux actions auxquelles elles se rapportent.

Faire, verbe qui, dans le Commerce, a différentes acceptions, déterminées par les divers termes qu’on y joint, & dont voici les principales.

Faire prix d’une chose ; c’est convenir entre le vendeur & l’acheteur, de la somme pour laquelle le premier la livrera a l’autre.

Faire trop chere une marchandise ; c’est la priser au-delà de sa valeur.

Faire pour un autre ; c’est être son commissionnaire, vendre pour lui.

Faire bon pour quelqu’un ; c’est être sa caution, promettre de payer pour lui.

Faire bon, signifie aussi tenir compte à quelqu’un

d’une somme à l’acquit d’un autre. J’ai ordre de M. N. de vous faire bon de 3000 liv. c’est-à-dire de vous payer pour lui 3000 liv.

Faire les deniers bons ; c’est s’engager à suppléer de son argent ce qui peut manquer à une somme promise.

Faire faillite, banqueroute, cession de biens. Voyez Faillite, Banqueroute, Cession.

Faire un trou à la lune ; c’est s’évader clandestinement pour ne pas payer ses dettes, ou être en état de traiter plus sûrement avec ses créanciers en mettant sa personne à couvert.

Faire de l’argent ; c’est recueillir de l’argent de ses débiteurs, ou en ramasser par la vente de ses marchandises, fonds, meubles, &c. pour acquitter ses billets, promesses, lettres de change, ou autres dettes.

Faire des huiles, faire des beurres, faire des eaux-de-vie, signifie fabriquer de ces sortes de marchandises ; il signifie aussi, parmi les Négocians, faire emplette de ces marchandises, en acheter par soi-même ou par ses commissionnaires & correspondans. Je compte faire cette année cent barriques d’eau-de-vie à Cognac.

Faire fond sur quelqu’un, sur sa bourse ; c’est avoir confiance qu’un ami, un parent vous aidera de son crédit ou de son argent.

Faire un fonds ; c’est rassembler de l’argent & le destiner à quelque grosse entreprise.

Faire une bonne maison, faire ses affaires ; c’est s’enrichir par son commerce.

Faire queue ; c’est demeurer reliquataire, & ne pas faire l’entier payement de la somme qu’on devoit acquitter.

Faire traite, se dit en Canada du commerce que font les François des castors & autres pelleteries, que les Sauvages leur apportent dans leurs maisons ; ce qui est fort différent d’aller en traite, ou porter aux Sauvages jusque dans leurs habitations les marchandises qu’on veut échanger avec eux. Voyez Traite.

On se sert aussi de ce terme pour signifier l’achat qu’on fait des Negres sur les côtes de Guinée, & qu’on transporte en Amérique. Voyez Negres & Assiente. Cet article est tiré du Dictionn. de Comm. (G)

Faire le Nord, le Sud, l’Est, ou l’Ouest, (Marine.) c’est naviger, faire route, ou courir au nord, au sud, à l’est, &c.

Ce mot faire est appliqué à beaucoup d’usages particuliers dans la Marine, dont il faut faire connoître les principaux.

Faire canal ; c’est traverser une étendue de mer pour passer d’une terre à une autre : ce terme s’applique plûtôt aux galeres qu’aux vaisseaux.

Faire vent arriere ; c’est prendre vent en poupe.

Faire route ; c’est courir, naviger, ou cingler sur la mer.

Faire voile ; c’est partir & cingler pour un endroit.

Faire petites voiles ; c’est ne porter qu’une partie de ses voiles.

Faire plus de voiles ; c’est déferler & déployer plus de voiles qu’on n’en avoit.

Faire servir les voiles ; c’est mettre le vent dedans & les empêcher de pliasser.

Faire force de voiles ; c’est porter autant de voiles qu’il est possible pour faire plus de diligence, soit pour chasser quelque vaisseau, ou pour éviter d’être joint si l’on étoit chassé.

Faire un bord ou une bordée ; c’est pousser la bordée soit à bas-bord, soit à tribord. Voyez Bord & Bordée.

Faire la paransane ; c’est se préparer à faire route en mettant les ancres, les voiles, & les manœuvres