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Comme les bordages & les préceintes de l’avant vont se terminer sur l’étrave, on y fait une rablure pour les recevoir. Voyez, Planche IV. de Marine, fig. 1. n°. 3. la situation de l’étrave.

On a coûtume de piéter l’étrave, c’est-à-dire qu’on la divise en piés suivant une ligne perpendiculaire. Ces divisions sont très-commodes dans l’armement, pour connoître le tirant d’eau des vaisseaux à l’avant.

La largeur de l’étrave est égale à la largeur de la quille par le bas ; son épaisseur en cet endroit est aussi égale à l’épaisseur de la quille, mais elle augmente en-haut de quatre lignes & demie par pouce de largeur.

Pour avoir la hauteur de l’étrave, plusieurs constructeurs prennent un quart de la longueur de la quille, ou un peu moins ; d’autres un dixieme ou un douzieme de la longueur totale du vaisseau.

Il vaut mieux établir la hauteur de l’étrave en additionnant la hauteur du creux, le relevement du premier pont en-avant, la distance du premier au second pont, de planche en planche, l’épaisseur du bordage du second pont, la distance du second au troisieme pont, l’épaisseur du bordage du troisieme pont, la tonture du barrot du troisieme pont à l’endroit du coltis, & deux fois la hauteur du feuillet des sabords de la troisieme batterie.

Il est clair que, comme l’étrave doit s’étendre de toute la hauteur du vaisseau, la somme des différentes hauteurs que nous venons de marquer, doit donner celle de l’étrave ; mais ces hauteurs ne sont point les mêmes pour les vaisseaux de différent rang, & chaque constructeur les peut changer suivant ses différentes vûes. Mais en suivant la méthode ci-dessus, il sera aisé de l’appliquer à tous vaisseaux de différentes grandeurs : voici cependant un exemple pour la rendre plus sensible sur un vaisseau de cent dix pieces de canon.

La hauteur du creux est de 23 piés 9 pouc.   lig.
Le relevement du premier pont à l’avant est 2 7
La hauteur du premier au second pont doit être de 6 9
L’épaisseur du bordage du second pont, 4
La hauteur du second au troisieme pont, de 6 8
Epaisseur des bordages du troisieme pont, 3
La tonture du barrot du troisieme pont à l’endroit du coltis, peut avoir environ 8
Enfin deux fois la hauteur du feuillet des sabords de la troisieme batterie, 3 2

En additionnant toutes ces sommes, la hauteur de l’étrave réduite à la perpendiculaire sera de 41 piés 9 pouc. 7 lig.

Il est bon d’observer que pour les frégates qui n’ont qu’un pont, il faut additionner le creux, le relevement du pont en-avant, la hauteur du château d’avant, de planche en planche, l’épaisseur du bordage de ce château, & le bouge du barrot du château à l’endroit du coltis ; ce qui donnera la hauteur de l’étrave pour ces sortes de bâtimens.

A l’égard de l’échantillon de cette piece, c’est-à-dire sa grosseur, on la regle sur la grandeur du vaisseau.

Dans un vaisseau de 176 piés de long, elle a d’épaisseur sur le droit un pié cinq pouces, & de largeur sur le tour un pié neuf pouces.

Dans un vaisseau de 150 piés de long, elle a d’épaisseur sur le droit 1 pié 2 pouces 5 lignes, & de largeur sur le tour un pié six pouces huit lignes.

Dans un vaisseau de 96 piés de long, son épaisseur dix pouces, sa largeur un pié deux pouces six lignes.

La proportion entre ces trois grandeurs est aisée à trouver. (Z)

ETRAYERS, (Jurispr.) suivant des extraits des registres de la chambre des comptes, dont Bacquet fait mention en son traité du droit d’aubaine, chap. jv. sont les biens demeurés des aubains & épaves (c’est-à-dire étrangers venus de fort loin) qui sont demeurans dans le royaume, & vont de vie à trépas sans hoirs naturels de leur corps nés dans le royaume.

Ces mêmes extraits portent qu’étrayers sont pareillement les biens des bâtards qui vont de vie à trépas sans hoirs naturels de leur corps, & que tels biens appartiennent au roi. Voyez ci après Etrejures, qui a quelque rapport à étrayer. (A)

ÊTRE, s. m. (Métaph.) notion la plus générale de toutes, qui renferme non-seulement tout ce qui est, a été, ou sera, mais encore tout ce que l’on conçoit comme possible. On peut donc définir l’être ce à quoi l’existence ne répugne pas. Un arbre qui porte fleurs & fruits dans un jardin est un être ; mais un arbre caché dans le noyau ou dans le pepin n’en est pas moins un, en ce qu’il n’implique point qu’il vienne au même état. Il en est de même du triangle tracé sur le papier, ou seulement conçu dans l’imagination.

Pour arriver à la notion de l’être, il suffit donc de supposer unies des choses qui ne sont point en contradiction entre elles, pourvû que ces choses ne soient point déterminées par d’autres, ou qu’elles ne se determinent point réciproquement. C’est ce qu’on appelle l’essence par laquelle l’être est possible. Voyez Essence, Attribut, Mode.

Être feint, c’est un être auquel nous supposons que l’existence ne répugne pas, quoiqu’elle lui répugne en effet. Cela arrive, par exemple, lorsque notre imagination combine des parties qui semblent s’ajuster, mais dont le tout ne pourroit néanmoins subsister. Un peintre peut joindre une tête d’homme à un corps de cheval, & à des piés de bouc ; mais un peu d’attention à la disproportion des organes, montre que leur assemblage ne produiroit pas un être vivant. Cependant comme on ne sauroit absolument démontrer l’impossibilité de ces êtres, on les laisse dans la classe des êtres ; & il faut les nommer êtres feints.

Être imaginaire, c’est une espece de représentation qu’on se fait de choses purement abstraites, & qui n’ont aucune existence réelle, ni même possible. L’idée de l’espace & du tems sont ordinairement de ce genre. Les infiniment petits des Mathématiciens sont des êtres purement imaginaires, qui ne laissent pas d’avoir une extreme utilité dans l’art d’inventer. Une telle notion imaginaire met à la place du vrai une espece d’être, qui le représente dans la recherche de la vérité : c’est un jetton dans le calcul, auquel il faut bien prendre garde de ne pas donner une valeur intrinseque, ou une existence réelle. Voy. Différentiel, Infini, &c.

Être externe, c’est celui qui a une relation quelconque avec un être donné.

Être singulier, voyez Individu.

Être universel, c’est celui qui n’a pas toutes ses déterminations, mais qui ne contient que celles qui sont communes à un certain nombre d’individus ou d’especes. Il y a des degrés d’universalité qui vont en augmentant à mesure qu’on diminue le nombre des déterminations, & qui vont en diminuant quand les déterminations se multiplient. Les êtres universaux