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toute la partie ; & l’on peut, sans la remuer, réitérer les pansemens autant qu’il est nécessaire ; Guillemeau en est l’inventeur : mais Jacques de Marque, qui a écrit depuis ce savant chirurgien, digne éleve du grand Paré, a encore perfectionné ce bandage, tant dans son usage que dans sa construction.

Chaque compresse donne six chefs ; ce qui ne convient, dit-il, qu’aux fractures qui sont au milieu d’un membre ; & dans ce cas, on peut arrêter les chefs supérieurs & inférieurs, se contentant de lever à chaque pansement les chefs du milieu, pour découvrir la plaie. Si la fracture étoit proche de l’articulation, il suffiroit que chaque piece de linge fût fendue de chaque côté pour faire quatre chefs ; à-moins qu’en se servant du bandage avec des compresses à six chefs, on n’attachât les chefs supérieurs ou inférieurs, au-dessus ou au-dessous de l’articulation : c’est-à-dire, qu’en se servant du bandage à dix-huit chefs pour une fracture avec plaie à la partie inférieure de la cuisse, les six chefs inférieurs seroient employés au-dessous du genou ; ou les six chefs supérieurs au-dessus du genou, dans l’application qu’on feroit de ce bandage pour une fracture compliquée à la partie supérieure de la jambe ; ce qui me paroîtroit fort utile. M. Petit décrit le pansement & l’appareil des fractures compliquées, de la maniere suivante. On mettra sur la plaie couverte des plumaceaux, une compresse en quatre doubles, pour empêcher que les matieres purulentes ne gâtent le reste de l’appareil ; puis deux compresses longuettes assez épaisses, une de chaque côté : & au lieu du bandage à dix-huit chefs cousus ensemble, on peut appliquer plusieurs bouts de bande séparés, lesquels feront le même effet que le bandage ordinaire, & auront l’avantage de pouvoir être changés séparément, suivant le besoin. Pour maintenir ce bandage, on peut se servir des gouttieres de fer blanc, liées avec trois laqs ou rubans de fil : on mettra ensuite le membre dans la situation convenable.

M. Petit a corrigé les fanons pour les fractures compliquées de plaie à la partie postérieure du membre ; il faisoit envelopper les torches de paille dans deux morceaux de toile séparés, de façon qu’elle manquât dans l’endroit de la plaie. Cet intervalle peut contribuer à la facilité des pansemens, puisqu’on peut, à l’aide de ces fanons, soûlever le membre & panser la plaie, après qu’on l’a mise à découvert des compresses.

Dans les fractures compliquées de la cuisse, M. Petit recommande que le premier matelas soit partagé en plusieurs pieces qui puissent s’ajuster ensemble, & se séparer au besoin. Une grande piece s’étend depuis le milieu des fesses jusqu’au chevet : le reste est partagé en quatre, deux de chaque côté. L’une, du côte malade, doit commencer où finit la premiere, & s’étendre quatre travers de doigt au-dessous de la fracture : l’autre piece du même côté, commence où finit celle-ci, & s’étend jusqu’au pié du lit. Les deux autres pieces du matelas sur lequel appuie le côté sain, seront partagées de même, à la différence qu’elles soient plus larges ; le lit étant partagé de maniere qu’un tiers de sa largeur seulement fournit les portions qui soûtiennent le côté malade. Chacune de ces quatre portions de matelas est enveloppée de toile ; ce qui sert de drap, sans en avoir l’inconvénient, & sans pouvoir former de plis capables d’incommoder : on peut aussi changer facilement ces toiles, pour raison de propreté. La partie supérieure du matelas, recouverte d’une alaise ou petit drap, n’a aucune communication avec les pieces inférieures.

Voici les commodités qu’on tire de ces différentes pieces de matelas détachées. Quand on veut donner le bassin au malade, on ôte la piece du milieu, qui est du côté sain. Une partie de la cuisse & de la fesse

portent alors à faux ; & l’espace qu’occcupoit la portion de matelas ôtée, fait place au bassin qu’on présente au malade, & qu’on retire aisément lorsqu’il a été à la selle. Pour pouvoir remettre aisément cette portion du matelas, il faut y avoir fait coudre deux sangles étroites, ou deux rubans tire-bottes, qui passent sous la pareille portion de matelas du côté malade. Ces sangles sont tirées par quelqu’un, de maniere à ne point changer de place, ni remuer la portion du matelas sur laquelle appuie la cuisse fracturée. Le malade pourra aussi recevoir facilement un lavement, si l’on ôte les deux portions inférieures qui soûtiennent le côté sain.

Pour panser le blessé, on tire la piece du matelas qui est dessous la fracture ; & l’on a la liberté de passer les mains de tous côtés pour lever l’appareil, & le rappliquer, sans risque d’ébranler la fracture.

A l’égard de la fracture compliquée de la jambe, M. Petit a imaginé un moyen particulier dont nous avons donné la description au mot Boîte. Cette boîte a une planchette qui soûtient la plante du pié, & qui empêche le poids des couvertures sur la jambe fracturée. Dans les fractures simples, on est obligé de mettre une semelle de bois garnie de linge pour servir de point d’appui à la plante du pié. Un ruban de fil embrasse cette semelle, & y est fixé par son milieu. Les deux chefs se croisent sur le coup-de-pié, & sont attachés aux fanons par des épingles. On jette ensuite ces rubans alternativement de côté & d’autre, en les croisant également pour former des losanges jusqu’au haut de la partie. On les fixe aux fanons par des épingles, avant que de faire les renversés, pour passer les chefs d’un côté à l’autre. On met la partie sur un oreiller mollet, de façon que le talon n’appuie point ; sans quoi, il y surviendroit inflammation & gangrene.

Au moyen de l’archet ou arceau, qui est une espece de demi-cercle, ou demi-caisse de tambour, on fait un logement à la jambe & au pié, qui les met à l’abri du poids du drap & des couvertures du lit, Pl. IV. fig. 2. En hyver, pour entretenir la chaleur du pié, on est obligé de le garnir de serviettes & autres linges chauds, pour suppléer au défaut de l’application des couvertures.

Après avoir mis la partie en situation, il faut s’attacher à remplir la troisieme indication de la cure des fractures ; laquelle consiste à prévenir les accidens, & à les combattre, s’ils surviennent. Dans les fractures simples, il suffit de faire quelques saignées pour procurer la résolution du sang épanché dans l’intérieur aux environs des bouts de l’os cassé. On fait des fomentations résolutives & spiritueuses, & l’on fait observer un régime convenable pendant quelques jours. Les fractures compliquées exigent des attentions plus suivies & diversifiées, suivant les circonstances. Voyez l’article Chirurgie.

Au mot Flabellation, nous avons démontré la nécessité d’empêcher le prurit, en donnant de l’air à la partie blessée.

On doit continuer l’appareil sur les parties fracturées, jusqu’à la parfaite consolidation des pieces osseuses : elle se fait plûtôt ou plûtard, suivant la nature différentielle de chaque os. Il y a des précautions à prendre pour mouvoir la partie dans ses articulations ; de crainte que restant long-tems dans l’inaction, la synovie ne vînt à s’épaissir ; ce qui donneroit lieu à l’anchylose. Voyez Anchylose. (Y)

Fracture, (Manege & Maréchallerie.) solution de continuité des os & même des cartilages, faite par un corps extérieur contondant, très-différente de la plaie faite à l’os par un instrument tranchant ou piquant, ainsi que de la luxation, qui n’est véritablement qu’une solution de contiguité.

Les os peuvent être fracturés dans tous les sens possibles.