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ties de l’homme ont des propriétés particulieres. Voyez les différens articles de ce Dictionnaire.

Il n’y en a aucune qui ne contribue à la beauté ou à la laideur, & qui n’ait quelque mouvement agréable ou difforme dans la passion. Voyez Honte, Colere, Fureur, Amour, &c.

Ce sont celles du visage qui donnent ce que nous appellons la physionomie.

Toutes concourent par leurs proportions à la plus grande facilité des fonctions du corps ; mais il faut bien distinguer l’état de nature, de l’état de société. Dans l’état de nature, l’homme qui exécuteroit avec le plus d’aisance toutes les fonctions animales, seroit sans contredit le mieux fait ; & réciproquement le mieux fait exécuteroit le plus aisément toutes les fonctions animales ; mais il n’en est pas ainsi dans l’état de société. Chaque art, chaque manœuvre, chaque action, exige des dispositions particulieres de membres, ou que la nature donne quelquefois, ou qui s’acquierent par l’habitude, mais toûjours aux dépens des proportions les plus régulieres & les plus belles. Il n’y a pas jusqu’au danseur, qui forcé de soûtenir tout le poids de son corps sur la pointe de son pié, n’eût à la longue cette partie défigurée aux yeux du statuaire, qui ne se proposeroit que de représenter un homme bien fait, & non un danseur. Voyez Proportion.

La grace qui n’est que le rapport de certaines parties du corps, soit en repos, soit en mouvement, considerées relativement aux circonstances d’une action, ne s’obtient souvent aussi que par des habitudes, dont le dérangement des proportions est encore un effet nécessaire. Voyez Grace.

D’où il s’ensuit que l’homme de la nature, celui qu’elle se seroit complu à former de la maniere la plus parfaite, n’excelleroit peut-être en rien ; & que l’imitateur de la nature en doit altérer toutes les proportions, selon l’état de la société dans lequel il le transporte. S’il en veut faire un crocheteur, il en affaissera les cuisses sur les jambes ; il fortifiera celles-ci ; il étendra les épaules, il courbera le dos ; & ainsi des autres conditions.

Par un travers aussi inexplicable que singulier, les hommes se défigurent en cent manieres bisarres ; les uns s’applatissent le front, d’autres s’allongent la tête ; ici on s’écrase le nez, là on se perce les oreilles. On violente la nature avec tant d’opiniâtreté, qu’on parvient enfin à la subjuguer, & qu’elle fait passer la difformité des peres aux enfans, comme d’elle-même. L’habitude de se remplir les narines de poussiere est si générale parmi nous, que je ne doute guere que si elle subsiste encore pendant quelques siecles, nos descendans ne naissent tous avec de gros nés difformes & évasés. Mais que ne doit-il pas arriver à l’espece humaine parmi nous, par le vice de l’habillement, & par les maladies auxquelles nos mœurs dépravées nous exposent ?

La tête de l’homme est à l’extérieur & à l’intérieur d’une forme différente de celle de la tête de tous les autres animaux ; le singe a moins de cerveau.

L’homme a le cou moins gros à proportion que les quadrupedes, mais la poitrine plus large ; il n’y a que le singe & lui qui ayent des clavicules.

Les femmes ont plus de mamelles que les hommes ; mais l’organisation de ces parties est la même dans l’un & l’autre sexe ; celles de l’homme peuvent aussi former du lait, & il y en a des exemples.

Le nombril qui est apparent dans l’homme, est presque obliteré dans les animaux ; le singe est le seul qui ait des bras & des mains comme nous ; les fesses qui sont les parties les plus inférieures du tronc n’appartiennent qu’à l’espece humaine.

L’homme est le seul qui se soûtienne dans une situation droite & perpendiculaire.

Le pié de l’homme differe aussi de celui de quelque animal que ce soit ; le pié du singe est presque une main.

L’homme a moins d’ongle que les autres animaux ; c’est par des observations continuées pendant long-tems sur la forme intérieure de l’homme, que l’on est convenu des proportions qu’il falloit garder dans la Peinture, la Sculpture, & le Dessein. Voyez l’article Proportion.

Dans l’enfance, les parties supérieures de l’homme sont plus grandes que les inférieures.

A tout âge, la femme a la partie antérieure de la poitrine plus élevée que nous ; en sorte que la capacité formée par les côtes a plus d’épaisseur en elles & moins de largeur. Les hanches de la femme sont aussi plus grosses ; c’est à ce caractere qu’on distingue son squelette de celui de l’homme.

La hauteur totale du corps humain varie assez considérablement ; la grande taille pour les hommes, est depuis cinq piés quatre ou cinq pouces, jusqu’à cinq piés huit ou neuf pouces. La taille médiocre depuis cinq piés ou cinq piés un pouce, jusqu’à cinq piés quatre pouces ; & la petite taille est au-dessous de cinq piés. Les femmes ont en général deux ou trois pouces de moins ; il y a des especes d’hommes qui n’ont que depuis quatre piés, jusqu’à quatre piés & demi ; tels sont les Lapons.

L’homme relativement à son volume est plus fort qu’aucun animal ; il peut devancer le cheval par sa vîtesse ; il le fatigue par la continuité de la marche ; les chaters d’Ispahan font trente-six lieues en quatorze ou quinze heures.

La femme n’est pas à beaucoup près aussi vigoureuse que l’homme.

Tout change dans la nature, tout s’altere, tout périt. Lorsque le corps a acquis son étendue en hauteur & en largeur, il augmente en épaisseur ; voilà le premier point de son dépérissement ; elle commence au moment où la graisse se forme, à trente-cinq ou quarante ans. Voyez Graisse. Alors les membranes deviennent cartilagineuses, les cartilages osseux, les os plus solides, & les fibres plus dures ; la peau se seche, les rides se forment, les cheveux blanchissent, les dents tombent, le visage se déforme, & le corps s’incline vers la terre à laquelle il doit retourner.

Les premieres nuances de cet état se font appercevoir avant quarante ans ; elles augmentent par degrés assez lents jusqu’à soixante, par degrés plus rapides jusqu’à soixante & dix. Alors commence la vieillesse qui va toûjours en augmentant ; la caducité suit, & la mort termine ordinairement avant l’âge de quatre-vingt-dix ou cent ans, la vieillesse & la vie.

Les femmes en général vieillissent plus que les hommes ; passé un certain âge leur durée s’assûre ; il en est de même des hommes nés foibles ; la durée totale de la vie peut se mesurer par le tems de l’accroissement. L’homme qui est trente ans à croître, vit quatre-vingt-dix ou cent ans. Le chien qui ne croît que pendant deux ou trois ans, ne vit aussi que dix ou douze ans.

Il est parlé dans les Transactions philosophiques, de deux hommes, dont l’un a vécu cent soixante-cinq ans, & l’autre cent quarante-quatre.

Il y a plus de vieillards dans les lieux élevés que dans les lieux bas ; mais en général l’homme qui ne meurt pas par intempérie ou par accident, vit partout quatre-vingt-dix ou cent ans.

La mort est aussi naturelle que la vie ; il ne faut pas la craindre, si l’on a assez bien vécu pour n’en pas redouter les suites.

Mais il importe en une infinité de circonstances de savoir la probabilité qu’on a de vivre un cer-