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d’heureux prognostics pour le cours de l’année. Voy. Janual, & Januales.

Ce même jour tous les artistes & artisans ébauchoient la matiere de leurs ouvrages, dans l’opinion que pour avoir une année favorable, il falloit la commencer par le travail. C’est, dit Ovide, le dieu Janus qui le prescrivit en ces termes :

Tempora commisi nascentia rebus agendis,
Totus ab auspicio, ne foret annus iners.

Cette idée étoit bien plus raisonnable que celle des anciens chrétiens, qui jeûnoient le premier de Janvier pour se distinguer des Romains, parce que ceux-ci se régaloient le soir en l’honneur de Janus.

Les consuls désignés prenoient possession ce jour-là de leur dignité, depuis le consulat de Quintus Fulvius Nobilior, & de Titus Annius Luscus, l’an de la fondation de Rome 601. Ils montoient au capitole accompagnés d’une grande foule de peuple, tous habillés de neuf, & là au milieu des parfums, ils immoloient à Jupiter Capitolin deux taureaux blancs, qui n’avoient pas été mis sous le joug.

Les flamines faisoient des vœux pendant ce sacrifice pour la prospérité de l’empire & pour le salut de l’empereur, après lui avoir prêté le serment de fidélité. Ces vœux & ce serment étoient faits pareillement par tous les autres magistrats. Tacite nous dit dans ses annales, liv. XVI. qu’on fit un crime à Thrasea d’avoir manqué de se trouver au serment & aux vœux de la magistrature, pour le salut de l’empereur. Ovide vous dira plus distinctement toutes ces cérémonies.

Dans ce même jour les Romains se souhaitoient une heureuse année, & prenoient garde de laisser échapper quelque propos qui fût de mauvais augure. Enfin les amis avoient soin d’envoyer des présens à leurs amis, qu’on appelloit strenæ, des étrennes. Voyez Etrennes.

Parcourons maintenant les autres jours de ce mois, & ses diverses fêtes.

Le second jour étoit estimé malheureux pour la guerre, & appellé par cette raison dies ater, jour funeste.

Le troisieme & le quatrieme étoient jours comitiaux.

Le cinquieme jour des nones étoit jour plaidoyable.

Le sixieme passoit pour malheureux.

Le septieme on célébroit la venue d’Isis chez les Romains.

Le huitieme étoit jour d’assemblée.

Le neuvieme des ides de ce mois, on fêtoit les agonales en l’honneur de Janus.

Le dixieme étoit un jour mi-parti, marqué ainsi dans l’ancien calendrier, E. N.

L’onzieme, ou le iij. des ides, arrivoient les carmentales pour honorer la déesse Carmenta, mere d’Evandre. Voyez Carmentales. On célébroit ce même jour la dédicace du temple de Juturne dans le champ de Mars.

Le douzieme étoit jour d’assemblée, quelquefois on y faisoit la fête des compitales ou des carrefours.

Le treizieme jour des ides, consacré à Jupiter, se marquoit dans le calendrier par ces deux lettres, N. P.

Nefastus primâ parte diei, pour dire qu’il étoit seulement fête le matin ; on sacrifioit au souverain des dieux une brebis appellée ovis idulis.

Le quatorzieme semblable au dixieme, étoit coupé moitié fête, moitié jour ouvrier.

Le quinzieme on solemnisoit pour la seconde fois les carmentales, nommées par cette raison carmentalia secunda.

Au seizieme arrivoit la dédicace de ce grand & superbe temple de la Concorde, qui fut voué & dédié

par Camille, & que Livia Drusilla décora de plusieurs statues, & d’un autel magnifique.

Depuis le seize jusqu’au premier Février, étoient des jours comitiaux, ou d’assemblée, si vous en exceptez le dix-sept, où l’on donnoit les jeux palatins ; le vingt-quatre, où l’on célébroit les féries sémentines pour les semailles ; le vingt-sept, où l’on fêtoit la dédicace du temple de Castor & de Pollux à l’étang de Juturna, sœur de Turnus, le vingt-neuvieme, où se donnoient les équiries, equiria, c’est-à-dire les jeux de courses de chevaux dans le champ de Mars ; & finalement le trentieme, qui étoit la fête de la paix, où l’on sacrifioit une victime blanche, & où l’on brûloit quantité d’encens.

Dans ce mois de Janvier, que les Grecs appelloient Γαμηλιὼν, ils solemnisoient la fête des gamélies, en l’honneur de Junon, fête instituée par Cécrops, au dire de Favorin. Voyez Gamélies.

Les Joniens célébroient aussi dans ce mois, les lénées. Voyez Lénées. Et les Egyptiens fétoient la sortie d’Isis de Phénicie.

Si l’on vouloit des preuves de tout ceci, ou de plus grands détails encore, on pourroit consulter Ovide dans ses fastes, Varron, Festus, Hospinien de origine festorum, Meursius, Pitiscus, Danet, & les antiquités greq. & romaines. Le soleil entre dans ce mois au signe du verseau. (D. J.)

JANVILLE, (Géog.) petite ville de France dans la haute Beauce, élection d’Orléans, à une lieue de Toury ; quelques-uns écrivent Genville, d’autres Yenville. Long. 19. 40. lat. 48. 16. (D. J.)

JANUS Temple de, (Hist. rom. Médaill. Littér.) temple que Janus avoit à Rome, & qui avoit été bâti par Romulus ; Numa son successeur lui donna des portes, que l’on n’ouvroit qu’en tems de guerre, & que l’on tenoit fermées pendant la paix. De là cette inscription que l’on voit au revers de plusieurs médailles de Néron, avec le temple de Janus ; pace terrâ marique partâ, Janum clausit ; & cette inscription trouvée à Mérida en Espagne : Imp. Cæsar. Divi F. Augustus, Pont. Max. Cos XI. Tribunic. Pot. X. Imp. VIII, Orbe, mari & terra pacato, templo Jani clauso, &c. De-là les surnoms de Patuleius, & de Clusius, comme qui diroit l’ouvert, & le fermé.

Il paroît par le plus grand nombre des inscriptions, que ce temple se nommoit tout court Janus ; Janum clausit. Horace l’appelle Janum Quirini, c’est-à-dire Janum Romuli, ce qui ne pouvoit pas s’appliquer aux autres temples que Janus avoit à Rome, & dont nous parlerons tout à l’heure.

On remarque que ce temple ne fut fermé que deux fois depuis la fondation de Rome, jusqu’au regne d’Auguste, & huit fois pendant tout le cours de la royauté, de la république & de l’empire. La premiere fois qu’on le ferma, fut sous le regne de Numa, l’instituteur de cette cérémonie ; la seconde fois, à la fin de la premiere guerre punique, l’an 519 de Rome ; la troisieme fois, après la bataille d’Actium, qui rendit Auguste le maître du monde, l’an 725 de Rome ; la quatrieme fois, cinq ans après, au retour de la guerre des Cantabres en Espagne, l’an 730 ; la cinquieme fois, sous le regne du même empereur, l’an 744 de Rome, environ cinq ans avant la naissance de Jesus-Christ ; & la paix générale qui régnoit alors dans l’empire romain, dura douze ans ; la sixieme fois, sous Néron, l’an 811 ; la septieme fois, sous Vespasien, l’an 824 ; la huitieme fois enfin, sous Gordien le jeune, à peu-près vers l’an 994 de Rome.

Il n’est pas bien sûr que les premiers empereurs chrétiens aient observé cette cérémonie. Il est vral qu’Ammian Marcellin dans son hist. liv. XVI. ch. x. semble dire positivement, que Constance II. après ses victoires, vint à Rome l’an 1105 de sa fondation, & ferma le temple de Janus, concluso Jani templo,