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de cannes, de saules, & d’autres arbres, qui font, au rapport de Maundrell, que pendant l’été, on a assez de peine à voir l’eau de cette riviere.

Le pere Hardouin dérive son nom de l’hébreu Jor-Edon, qui veut dire fleuve de Délices ; & c’est à sa source que plusieurs mettent le paradis terrestre ; cependant Josephe assure que toute la plaine qu’il arrose est deserte, extrêmement aride pendant l’été, & que l’air en est mal sain à cause de l’excessive chaleur.

Quoi qu’il en soit, il n’y a point de fleuve, si je puis en parler ainsi, plus célebre dans les livres sacrés : on sait par cœur les miracles qui s’opérerent dans le Jourdain, lorsqu’il se partagea pour laisser un passage libre aux Hébreux sous la conduite de Josué, chap. ij. vers. 13. & suivans ; lorsqu’Elie & Elisée le passerent en marchant sur les eaux, IV. liv. des Rois, c. xj. v. 8. & 14. lorsqu’Elisée fit marcher le fer de la coignée qui étoit tombée dans le Jourdain, IV. liv. des Rois, c. vj. v. 6. & 71. Enfin, lorsque le Sauveur du monde fut baptisé dans le même fleuve, que le ciel s’ouvrit, & que le Saint-Esprit descendit sur lui, Mathieu, ch. iij. v. 16.

Cette derniere circonstance du batême de J. C. a donné aux Chrétiens une grande vénération pour cette petite riviere ; aussi c’étoit anciennement une dévotion commune de se faire baptiser dans le Jourdain, ou du-moins de s’y baigner, comme font encore tous les pélerins qui parcourent la Palestine. Voyez Gange. (D. J.)

JOURNAL, s. m. (Gram. Littérat. Commerce, &c.) memoire de ce qui se fait, de ce qui se passe chaque jour.

Journal, en termes de Commerce, est un certain livre ou registre, dont les Marchands se servent pour écrire jour par jour toutes les affaires de leur commerce à mesure qu’elles se présentent. Voyez Maniere de tenir les livres de compte.


On donne aujourd’hui le nom de journal à certains ouvrages qui contiennent le détail de ce qui se passe journellement en Europe. Voyez Gazette.

Journal, (Littérature.) ou ouvrage périodique, qui contient les extraits des livres nouvellement imprimés, avec un détail des découvertes que l’on fait tous les jours dans les Arts & dans les Sciences.

Le premier journal de cette espece qui ait paru en France, est celui qu’on appelle le Journal des Savans, qui a été inventé pour le soulagement de ceux qui sont ou trop occupés ou trop paresseux pour lire les livres entiers. C’est un moyen de satisfaire sa curiosité, & de devenir savant à peu de frais. Comme ce dessein a paru très-commode & très-utile, il a été imité dans la plûpart des autres pays sous une infinité de titres différens.

De ce nombre sont les Acta eruditorum de Leipsic, les Nouvelles de la république des Lettres de M. Bayle, la Bihliotheque universelle, choisie, & ancienne, & moderne de M. le Clerc, les Memoires de Trévoux, &c. En 1692, Juncker a publié en latin un Traité historique des journaux des Savans, publiés en divers endroits de l’Europe jusqu’à présent. Wolfius, Struvius, Morhoff, Fabricius, ont fait à-peu-près la même chose.

Les memoires & l’histoire de l’académie des Sciences, celle de l’académie des Belles-Lettres, les Ephemerides, ou Miscellanea naturæ curiosorum, les Saggi di naturali esperienze fatte nel academia del cimento ; les acta philo-exoticorum naturæ & artis, qui ont paru depuis Mars 1686, jusqu’en Avril 1687, & qui sont une histoire de l’académie de Brescia ; les Miscellanea Berolinensia, qui sont en latin l’histoire de l’académie royale des Sciences & Belles-Lettres de Prusse, qui est en françois. Les commentaires de l’académie impériale de Petersbourg ; les memoires

de l’institut de Bologne ; les acta litteraria Sueciæ, qui se font à Upsal depuis 1720 ; les memoires de l’académie royale de Stockholm, commencés en 1740 ; les commentarii societatis regiæ Gottingensis, commencés en 1750 ; les acta Erfordiensia ; les acta Helvetica ; les acta Norimbergica ; les Transactions philosophiques de la société de Londres ; les actes de la société d’Edimbourg ; les essais de la société de Dublin, & autres ouvrages semblables, ne sont point des journaux, dans lesquels on rende compte des ouvrages nouveaux ; mais ce sont des collections de memoires faits par les savans qui composent ces différentes sociétés savantes.

On donne communément la gloire de l’invention des journaux à Photius ; sa bibliotheque n’est pourtant pas tout-à fait ce que sont nos journaux, ni son plan le même. Ce sont des abregés & des extraits des livres qu’il avoit lûs pendant son ambassade en Perse.

M. de Salo commença le premier le journal des Savans à Paris en 1665, sous le nom de sieur d’Hedouville ; mais sa mort survenue quelque tems après, interrompit cet ouvrage. L’abbé Gallois le reprit au commencement de 1666, & le céda en 1674 à l’Abbé de la Roque, qui le continua pendant huit à neuf ans, & qui eut pour successeur M. Cousin, qui le fit jusqu’en 1702, que M. l’abbé Bignon institua une nouvelle compagnie, à qui il donna le soin de continuer ce journal. On lui donna en même tems une nouvelle forme, & on l’augmenta. Cette compagnie subsiste encore ; & c’est aujourd’hui M. de Malesherbes qui en a l’inspection. Le journal des Savans n’est donc plus d’un seul auteur, plusieurs personnes y travaillent.

Depuis ce tems il a paru de tems à autres différens journaux françois ; tels sont les Memoires & conférences sur les Sciences & les Arts, par M. Denys, pendant les années 1672, 1673, & 1674 ; les nouvelles découvertes sur toutes les parties de la Medecine par M. de Blegny, en 1679 ; le journal de Medecine commencé en 1684, & quelques autres semblables, qui ont été discontinués aussi-tôt que commencés ; celui-ci vient de reprendre depuis quelque tems ; M. Roux med. est celui qui le continue à présent.

Les Nouvelles de la république des Lettres, que M. Bayle commença en 1684, & que M. de la Roque & quelques autres amis de M. Bayle, & M. Bernard ont continué depuis Février 1687, qu’une maladie obligea M. Bayle de les quitter, jusqu’en 1689. Après une interruption de neuf à dix ans, M. Bernard les reprit au commencement de 1699, & les continua jusqu’en 1710. L’histoire des ouvrages des Savans, par M. Basnage, commença en 1686, & finit en 1710. La Bibibliotheque universelle & historique de M. le Clerc, a été continuée jusqu’en 1693, & contient 25 volumes ; la Bibliotheque choisie du même auteur commença en 1703. Le Mercure de France, est un de nos plus anciens journaux ; il s’est continué par différentes mains jusqu’à présent : il en est de même du journal de Verdun.

Les Memoires pour l’histoire des Sciences & des beaux Arts, appellés communement Journal de Trévoux, du lieu où ils s’imprimoient autrefois, ont commencé en 1701. C’étoient les R R. P P. Jesuites qui composoient ce journal, qui se continue à présent par des particuliers, gens de Lettres.

On a fait & on fait encore plusieurs journaux françois dans les pays étrangers ; tels sont la bibliotheque raisonnée, la bibliotheque germanique continuée sous le titre de nouvelle bibliotheque germanique, par M. Formey. Il y a eu de plus en françois le journal littéraire, commencé à la Haie en 1713 ; le Mercure historique & politique, qui se continue jusqu’à ce jour. On imprime aussi en Hollande un journal dans le-