Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 9.djvu/236

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’une petite ville ou bourg, habité par quelques turcs & grecs ; c’étoit une des trois villes que le roi de Perse donna à Thémistocle pour son entretien : Magnésie étoit pour son pain, Mynus pour sa viande, & Lampsaque pour son vin. Elle a conservé sur les collines qui l’environnent quelques vignes, dont les raisins & les vins, en très-petites quantité, sont excellens.

Whéler se trouvant à Lampsaco, y vit encore dans un jardin deux belles inscriptions antiques ; la premiere étoit une dédicace d’une statue à Julia Augusta, remplie des titres de Vésta, & de nouvelle Cérès. L’érection de cette statue fut faite aux dépens de Dionisius, fils d’Apollonitimus, sacrificateur de l’empereur, intendant de la distribution des couronnes, & trésorier du sénat pour la seconde fois : l’autre inscription étoit la base d’une statue dressée en l’honneur d’un certain Cyrus, fils d’Apollonius, médecin de la ville, & érigée par la communauté, à cause des bienfaits qu’elle en avoit reçus. (D. J.)

LAMPTÉRIES, (Littér.) λαμπτήρια, fête qui se faisoit à Palènes pendant la nuit, en l’honneur de Bacchus, & à la clarté des lampes.

Pausanias nous apprend que cette fête étoit placée immédiatement après la vendange, & qu’elle consistoit en une grande illumination nocturne, & en profusions de vin qu’on versoit aux passans.

Dès les premiers siecles du christianisme, on usa d’illuminations, non-seulement pour les réjouissances prophanes, mais pour celles qui tenoient à la religion ; c’est ainsi qu’on les employoit aux cérémonies du baptême des princes, comme un symbole de la vie de lumiere dans laquelle ils alloient entrer par la foi.

L’illumination de la chandeleur, dont le nom a tant de conformité avec les lamptéries des Grecs, peut être attribuée, dans son institution, à une condescendence des papes, pour s’accommoder à la portée des néophytes qui étoient mêlés avec les Gentils, & leur rendre la privation des spectacles moins sensible. J’aimerois donc mieux dire que le christianisme a tout sanctifié, qu’il a heureusement changé les lustrations des payens en purifications chrétiennes, que de soutenir que nos fêtes n’ont point d’analogie avec celles du paganisme, ou me persuader que leur ressemblance est un effet du hasard. (D. J.)

LANCASHIRE, (Géog.) ou la province de Lancastre, en latin Lancastria, province maritime d’Angleterre, au diocèse de Chester, le long de la mer d’Irlande qui la borne au couchant. Les provinces de Cumberland & de Westmorland, la terminent au nord & au nord-est ; Yorckshire au levant, & Cheshire au midi. Elle a 170 milles de circuit, contient environ 11 cent 50 mille arpens, & 40 mille 202 maisons. L’air y est fort bon, les habitans robustes, & les femmes très-belles. Les rivieres de cette province sont le Mersey, la Ribble & le Long ; ses deux lacs sont le Winder & le Merton. Le Winder a dix milles de longueur sur quatre de large, & c’est le plus grand lac qu’il y ait en Angleterre. Les anciens habitans de ce comté étoient les Brigantes.

Cette province est du nombre de celles qu’on nomme Palatines, & elle a donné à plusieurs princes du sang le titre de ducs de Lancastre. Ses villes principales ou bourgs, sont Lancastre capitale, Clitero, Leverpool, Preston, Wigan, Newton, Manchester.

Entre les gens de lettres que cette province a produits, je ne citerai que le chevalier Henri Brotherton, l’évêque Fleetwood & Guillaume Vitaker.

On doit au premier des observations & des expériences curieuses, publiées dans les Transact. philos. Juin 1697. n°. 177. sur la maniere dont croissent les

arbres, & sur les moyens de faciliter cet accroissement.

Fleetwood mort évêque d’Ely en 1723, âgé de 67 ans, a illustré son nom par des ouvrages où regne une profonde connoissance de la Théologie & des antiquités sacrées.

Vitaker décédé en 1545, à l’âge de 45 ans, est de tous les antagonistes du cardinal Bellarmin, celui qui l’a réfuté avec le plus d’érudition & de succès.

Les curieux de l’histoire naturelle de la province de Lancastre, doivent se procurer l’ouvrage de Leigh, intitulé Leigh’s (Charles) A natural History of Lancashire, Chelshre, and the Peak in Derbishire. Oxoniæ, 1700, in-fol. C’est un bien bon livre. (D. J.)

LANCASTRE ; (Géog.) le Mediolanum des anciens, selon Cambden, ville à marché d’Angleterre, capitale du Lancashire ; elle a donné le titre de duc à plusieurs princes du sang d’Angleterre, fameux dans l’histoire par leurs querelles avec la maison d’Yorck. Elle est sur le Lon, à 5 milles de la mer d’Irlande, & à 187 N. O. de Londres. Long. 14. 35. lat. 54. (D. J.)

LANCE, s. f. (Art milit.) arme offensive que portoient les anciens cavaliers, en forme d’une demi-pique.

La lance est composée de trois parties, qui sont la fleche ou le manche, les aîles, & le dard ou la pointe. Pline attribue l’invention des lances aux Etésiens. Varron & Aulugelle disent que le mot de lance est espagnol, d’où quelques auteurs concluent que les Italiens s’étoient servis de cette arme à l’imitation des Espagnols.

Diodore de Sicile fait dériver ce mot du gaulois, & Festus du grec λόγχη, qui a la même signification.

La lance fut long-tems l’arme propre des chevaliers & des gendarmes. Il n’étoit permis qu’aux personnes de condition libre de la porter dans les armées ; elle est appellée dans le latin lancea ; mais elle est aussi très-souvent signifiée par le mot hasta. C’est dans cette signification que Guillaume le Breton la prend en parlant des armes propres des gentilshommes,

Ut famuli quorum est gladio pugnare & hastis.

On les faisoit d’ordinaire de bois de frêne, parce qu’il est roide & moins cassant. Les piques de notre tems étoient de même bois par la même raison. Dans l’énumération des armes qu’on donne à Géoffroi, duc de Normandie, que j’ai tirée de Jean, moine de Marmoutiers ; il est dit qu’entre autres armes, on lui mit en main une lance de bois de frêne, armée d’un fer de Poitou ; & Guillaume le Breton, en parlant du combat de Guillaume des Barres contre Richard d’Angleterre auprès de Mantes, dit en style poétique, que leurs boucliers furent percés par le frêne, c’est-à-dire par leurs lances de bois de frêne :

Utraque per clipeos ad corpora fraxinus ibat.

Le passage d’un autre auteur nous apprend la même chose, & en même tems que ces lances étoient fort longues. « Les lances des François, dit-il, étoient de bois de frêne, avoient un fer fort aigu, & étoient comme de longues perches ». Hastæ fraxineæ in manibus eorum ferro acutissimo præfixæ sunt, quasi grandes perticæ. Mais depuis on les fit plus grosses & plus courtes, & je crois que ce changement se fit un peu avant Philippe de Valois, que la mode vint que les chevaliers & la gendarmerie combatissent à pié, même dans les batailles & les combats réglés.

Dans ces occasions-là même, lorsqu’ils se mettoient à pié, ils accourcissoient encore leurs lances, en les coupant par le bout du manche. Cela s’appelloit retailler les lances. C’est ce que témoigne