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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 9.djvu/771

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pas les mœurs, mais qu’il en prenoit le caractere & celui du gouvernement.

La premiere opération à faire pour remettre le luxe dans l’ordre & pour rétablir l’équilibre des richesses, c’est le soulagement des campagnes. Un prince de nos jours a fait, selon moi, une très-grande faute en défendant aux laboureurs de son pays de s’établir dans les villes ; ce n’est qu’en leur rendant leur état agréable qu’il est permis de le leur rendre nécessaire, & alors on peut sans conséquence charger de quelques impôts le superflu des artisans du luxe qui reflueront dans les campagnes.

Ce ne doit être que peu-à-peu & seulement en forçant les hommes en place à s’occuper des devoirs qui les appellent dans les provinces, que vous devez diminuer le nombre des habitans de la capitale.

S’il faut séparer les riches, il faut diviser les richesses ; mais je ne propose point des lois agraires, un nouveau partage des biens, des moyens violens ; qu’il n’y ait plus de privileges exclusifs pour certaines manufactures & certains genres de commerce ; que la finance soit moins lucrative ; que les charges, les bénéfices soient moins entassés sur les mêmes têtes ; que l’oisiveté soit punie par la honte ou par la privation des emplois ; & sans attaquer le luxe en lui-même, sans même trop gêner les riches, vous verrez insensiblement les richesses se diviser & augmenter, le luxe augmenter & se diviser comme elles, & tout rentrera dans l’ordre. Je sens que la plûpart des vérités renfermées dans cet article, devroient être traitées avec plus d’étendue ; mais j’ai resserré tout, parce que je fais un article & non pas un livre : je prie les lecteurs de se dépouiller également des préjugés de Sparte & de ceux de Sybaris ; & dans l’application qu’ils pourroient faire à leur siecle ou à leur nation de quelques traits répandus dans cet ouvrage, je les prie de vouloir bien, ainsi que moi, voir leur nation & leur siecle, sans des préventions trop ou trop peu favorables, & sans enthousiasme, comme sans humeur.

LUXEMBOURG, le duché de, (Géog.) l’une des 17 provinces des Pays-bas, entre l’évêché de Liége, l’électeur de Treves, la Lorraine, & la Champagne. Elle appartient pour la majeure partie à la maison d’Autriche, & pour l’autre à la France, par le traité des Pyrénées : Thionville est la capitale du Luxembourg françois. Il est du gouvernement militaire de Metz & de Verdun, & pour la justice du parlement de Metz.

Le comté de Luxembourg fut érigé en duché par l’empereur Charles IV, dont le regne a commencé en 1346. On a trouvé dans cette province bien des vestiges d’antiquités romaines, simulachres de faux-dieux, médailles, & inscriptions. Le pere Wiltheim avoit préparé sur ces monumens un ouvrage dont on a desiré la publication, mais qui n’a point vû le jour.

Luxembourg, (Géog.) anciennement Lutzelbourg, en latin moderne Luxemburgum, Lutzelburgum, ville des Pays-bas autrichiens, capitale du duché de même nom. Elle a été fondée par le comte Sigefroi, avant l’an 1000 ; car ce n’étoit qu’un château en 936.

Elle fut prise par les François en 1542, & 1543. Ils la bloquerent en 1682, & la bombarderent en 1683 : Louis XIV. la prit en 1684, & en augmenta tellement les fortifications, qu’elle est devenue une des plus fortes places de l’Europe. Elle fut rendue à l’Espagne en 1697, par le traité de Ryswick. Les François en prirent de nouveau possession en 1701 ; mais elle fut cédée à la maison d’Autriche par la paix d’Utrecht. Elle est divisée en ville haute, & en ville

basse, par la riviere d’Else ; la haute ou ancienne ville est sur une hauteur presque environnée de rochers ; la neuve ou basse est dans la plaine, à 10 lieues S. O. de Treves, 40 S. O. de Mayence, 15 N. O. de Metz, 65 N. E. de Paris. Long. 23. 42. lat. 49. 40.

LUXEU, ou LUXEUIL, Luxovium, (Géog.) petite ville de France en Franche-Comté, au pié d’une célebre abbaye de même nom, à laquelle elle doit son origine ; elle est au pié du mont de Vosge, à six lieues de Vezoul. Long. 24. 4. lat. 47. 40.

LUXIM, ou LIXIM, Luximum, (Géog.) petite ville de la principauté de Platzbourg, à 4 lieues de Saverne. Long. 26. 2. lat. 48. 49. (D. J.)

LUXURE, s. f. (Morale.) ce terme comprend dans son acception toutes les actions qui sont suggérées par la passion immodérée des hommes pour les femmes, ou des femmes pour les hommes. Dans la religion chrétienne, la luxure est un des sept péchés capitaux.

LUZIN, s. m. (Marine.) espece de menu cordage qui sert à faire des enfléchures.

L Y

LY, (Hist. mod.) mesure usitée parmi les Chinois, qui fait 240 pas géométriques ; il faut dix ly pour faire un pic ou une lieue de la Chine.

LYÆUS, (Littér.) surnom de Bacchus chez les Latins, qui signifie la même chose que celui de liber ; car si liber vient de liberare, délivrer, Lyæus vient du grec λύειν, détacher, quia vinum curis mentem liberat & solvit, parce que le vin nous délivre des chagrins. Pausanias appelle Bacchus Lysius, qui est encore la même chose que Lyæus. (D. J.)

LYCANTHROPE, ou LOUP-GAROU, (Divin.) homme transformé en loup par un pouvoir magique, ou qui par maladie a les inclinations & le caractere féroce d’un loup.

Nous donnons cette définition conformément aux idées des Démonographes, qui admettent de deux sortes de lycanthropes ou de loups-garoux. Ceux de la premiere espece sont, disent-ils, ceux que le diable couvre d’une peau de loup, & qu’il fait errer par les villes & les campagnes en poussant des hurlemens affreux & commettant des ravages. Ils ne les transforment pas proprement en loups, ajoutent-ils, mais ils leur en donnent seulement une forme fantastique, ou il transporte leurs corps quelque part, & substitue dans les endroits qu’ils ont coutume d’habiter & de fréquenter, une figure de loup. L’existence de ces sortes d’êtres n’est prouvée que par des histoires qui ne sont rien moins qu’avérées.

Les loups-garoux de la seconde espece sont des hommes atrabilaires, qui s’imaginent être devenus loups par une maladie que les Medecins nomment en grec λυκαωνια, & λυκανθροπια, mot composé de λυκος, loup, & ἄνθρωπος, homme, Delrio, lib. II.

Voici comme le pere Malebranche explique comment un homme s’imagine qu’il est loup-garou : « un homme, dit-il, par un effort déreglé de son imagination, tombe dans cette folie qu’il se croit devenir loup toutes les nuits. Ce déreglement de son esprit ne manque pas à le disposer à faire toutes les actions que font les loups, ou qu’il a oui dire qu’ils faisoient. Il sort donc à minuit de sa maison, il court les rues, il se jette sur quelque enfant s’il en rencontre, il le mord & le maltraite, & le peuple stupide & superstitieux s’imagine qu’en effet ce fanatique devient loup, parce que ce malheureux le croit lui-même, & qu’il l’a dit en secret à quelques personnes qui n’ont pû s’en taire.