Page:Dieulafoy - La Perse, la Chaldée et la Susiane.djvu/164

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à toit pointu dont les formes rappellent l’Atabeg Koumbaz de Narchivan. Cette enclave remonte sans doute au temps des Guiznévides, ainsi que l’indique le travail fait pour raccorder les diverses parties du monument et souder entre elles les maçonneries anciennes et nouvelles. Toutes les faïences à reflets métalliques du mihrab, du lambris et du tombeau ont été posées bien après la construction du deuxième imamzzaddè, et l’on a dû, afin de les placer, détruire une partie de la décoration primitive. Cette constatation est du plus haut intérêt, car elle détermine d’une manière positive l’époque exacte à laquelle furent produits en Perse les plus beaux reflets métalliques. Si je m’en rapporte aux renseignements pris à Téhéran et à notre impression personnelle, il n’est pas possible d’obtenir des émaux plus purs et plus brillants que ceux de l’imamzaddè Yava.

Les faïences à reflets métalliques peuvent se diviser en trois classes : les premières sont à peine jaunes ; celles de la seconde catégorie ont la teinte du laiton ; les dernières, plus foncées, ont la couleur du cuivre rouge. Pour qu’une plaque soit vraiment belle, il faut que le reflet soit de couleur uniforme et franchement métallisé ; lorsque la cuisson n’est pas complète, les oxydes ne se réduisent pas et la brique reste pâle ; quand, au contraire, l’intensité du feu a été trop vive, l’émail est brûlé, la brique devient brune et terne. Aussi de tous les reflets ceux qui se rapprochent des deux extrêmes, tout en restant métalliques, sont les plus estimés. La teinte la plus claire paraît même la plus prisée des Persans.

La réunion de toutes ces qualités dans les étoiles, les croix ou les membres d’architecture composant le lambris, le sarcophage et le mihrab, donne une inappréciable valeur artistique aux carreaux et aux frises de Véramine, qui l’emportent comme coloris et comme émail sur les

Mirhab a Véramine


faïences hispano-mauresques et sur les faïences italiennes ainsi qu’un original sur une copie. Les revêtements de la salle du tombeau ont été posés après la chute de la dynastie des Seljoucides et sont, par conséquent, contemporains de la domination des Atabegs de l’Azerbeïdjan, ou des premiers Mogols, maîtres de la Perse dès le milieu du treizième siècle.

19 juin. — L’intérêt spécial qui s’attache aux monuments de la contrée est dû aux remarquables spécimens de l’architecture persane groupés autour du village. On peut étudier ici, dans toutes ses manifestations, l’histoire de l’art monumental au Moyen Age, c’est-à-dire depuis l’avènement de la dynastie des Seljoucides jusqu’à la chute des Mogols. Il n’est pas jusqu’à la petite tour décapitée, à laquelle est joint un délicieux modèle de mihrab encadré d’une inscription en faïence bleu turquoise gravée sur un fond de terre cuite, qui ne serve de transition toute naturelle entre les monuments mogols et ceux qui