Page:Dieulafoy - La Perse, la Chaldée et la Susiane.djvu/240

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importantes, qu’en cas de conversion le baptême arménien est considéré comme valable. Pour les mêmes raisons, les ecclésiastiques disposés à rentrer dans le giron de l’Église romaine n’ont pas à recevoir de nouveau les ordres et sont considérés comme des prêtres suspendus auxquels leur évêque rend les droits sacerdotaux.

Après avoir fait honneur à une collation préparée à notre intention, nous accompagnons le prélat à la chapelle de l’évêché ; il veut lui-même nous en faire admirer la splendeur.

Elle est construite en forme de croix grecque et surmontée d’une haute coupole éclairée à sa hase par huit fenêtres. Les trumeaux placés entre ces ouvertures sont peints à fresque et ornés de médaillons qui se détachent sur un fond bleu rehaussé d’arabesques d’or du plus brillant effet. Les murailles sont couvertes de tableaux bibliques, œuvres de moines italiens ; bien que toutes ces compositions soient traitées avec un mérite inégal, on est frappé, en entrant dans le sanctuaire, de leur chaude coloration, en parfaite harmonie avec les bleus des voûtes, les ors de la coupole et les beaux émaux à fond jaune qui lambrissent la nef. Trois tableaux remarquables sont placés derrière le maître autel : ils reposent sur un revêtement de faïence blanc laiteux, décoré d’anges aux ailes violacées ; ces séraphins tiennent des palmes vertes qui forment autour d’eux d’élégantes volutes.

Pas une pas une brisure ne dépare l’intérieur de cet édifice : le temps, ce redoutable ennemi de tous les monuments orientaux, n’a laissé dans celui-ci d’autre trace de son passage que cette patine harmonieuse dont il dore toutes les œuvres d’art.

Evêque arménien de Djoulfa

« Mon peuple est fier de la splendeur de son église, me dit l’évêque, et j’attribue en partie a la conservation de ce sanctuaire les pieux sentiments qui rattachent les Arméniens à cette terre de Perse où ils ont tant souffert. Je suis heureux d’être commis à la garde de ce temple, qui atteste le zèle pieux d’une colonie autrefois si puissante. »


Après nous avoir fait visiter le trésor, riche surtout en inventaires des objets dont on a dépouillé l’évêché, l’épiscopos nous remet aux mains du sacristain et nous engage à monter sur la terrasse placée autour de la coupole. De ce point élevé nous pourrons apprécier l’importance de la cité et compter plus de vingt monastères, en partie détruits. À part les chapelles de l’évêché et du couvent catholique, deux églises seulement sont rendues au culte ; on aperçoit sur la gauche la coupole de la cathédrale et, plus loin, un second édifice, auquel est annexée une maison de retraite pour les vieilles femmes.

« Quel est donc le bruit de crécelle qui depuis quelques instants s’élève jusqu’à nous ?

— On sonne l’office des Sœurs de Sainte-Catherine, répond mon guide.

— Le singulier carillon !