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panorama de Sultanieh


CHAPITRE V

Arrivée à Zendjan. — Les Babys. — Le camp de Tébersy. — Révolte religieuse. — Siège de Zendjan. — Supplice des révoltés. — Une famille baby. — L’armée persane. — Sultanieh. — Tombeau de chah Khoda Bendeh. — Les tcharvadars. — Exercice illégal de la médecine.

29 avril. — Zendjan, capitale de la province de Khamseh, est situé sur un plateau dominant une belle plaine qu’arrose un affluent du Kisilousou, et doit à son altitude élevée une température très agréable en été, mais par cela même rigoureuse en hiver. Cette ville, qui se glorifie, peut-être à tort, d’avoir donné naissance à Ardechir-Rabegan, le premier prince de la dynastie sassanide, fut en partie détruite par Tamerlan, peu après la ruine de Sultanieh, et perdit pendant cette période un de ses monuments les plus remarquables, le tombeau du cheikh Abou Féridje. Des désastres plus récents, conséquence de la révolte des Babys, ont fait oublier l’invasion tartare, mais ont illustré à jamais la vaillante population de la cité.

En 1843 arrivait à Chiraz un homme d’une grande valeur intellectuelle, Mirza Ali Mohammed ; le nouveau venu prétendait descendre du Prophète par Houssein, fils d’Ali, bien qu’il n’appartînt pas aux quatre grandes familles qui, seules, peuvent se targuer, sur des preuves même discutables, d’une si sainte origine. Il revenait dans sa ville natale, après avoir accompli le pèlerinage de la Mecque et visité la mosquée de Koufa, « où le diable l’avait tenté et où il s’était détaché de la loi orthodoxe ». Il se mit immédiatement à parler en public ; comme tous les réformateurs, il s’éleva avec violence contre la dépravation générale, le relâchement des mœurs, la rapacité des fonctionnaires, l’ignorance des mollahs, et montra dans ses premiers discours une tendance à ramener la Perse à une morale empruntée aux religions guèbre, juive et chrétienne. Dès le début de son apostolat, Mirza Ali Mohammed abandonna son nom pour adopter le titre de Bab ( « porte » par laquelle on arrive à la connaissance de Dieu) et fut bientôt entouré de prosélytes nombreux, les Babys, qu’enthousiasmait sa chaude éloquence. Le nouveau prophète accordait à ses disciples une liberté d’action et une indépendance inconnues aux musulmans : « Il n’avait pas reçu mission, disait-il, de modifier la science de la nature divine, mais il était envoyé afin de