Page:Dire de l'abbé Sieyès sur la question du Veto royal, à la séance du 7 septembre 1789.djvu/15

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
13

D’abord, la très-grande pluralité de nos Concitoyens n’a ni aſſez d’inſtruction, ni aſſez de loiſir, pour vouloir s’occuper directement des Lois qui doivent gouverner la France ; leur avis eſt donc de ſe nommer des Repréſentans ; & puiſque c’eſt l’avis du grand nombre, les hommes éclairés doivent s’y ſoumettre comme les autres. Quand une ſociété eſt formée, on ſait que l’avis de la pluralité fait Loi pour tous.

Ce raiſonnement qui eſt bon pour les plus petites Municipalités, devient irréſiſtible quand on ſonge qu’il s’agit ici de Lois qui doivent gouverner vingt-ſix millions d’hommes ; car je ſoutiens toujours que la France n’eſt point, ne peut pas être une Démocratie ; elle ne doit point devenir un État fédéral, compoſé d’une multitude de Républiques, unies par un lien politique quelconque. La France eſt & doit être un ſeul tout, ſoumis dans toutes ſes parties à une Légiſlation, & à une Adminiſtration communes. Puiſqu’il eſt évident que cinq à ſix millions de Citoyens actifs, répartis ſur plus de vingt-cinq mille lieues quarrées, ne peuvent point s’aſſembler ; il eſt certain qu’ils ne peuvent aſpirer qu’à une Légiſlature par repréſentation. Donc les Citoyens qui ſe nomment des Repréſentans, renoncent & doivent renoncer à faire eux-mêmes, immédiatement la Loi : donc ils n’ont