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Page:Discours sur les révolutions de la surface du globe, et sur les changemens qu'elles ont produits dans le règne animal.djvu/86

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mèdes que l’on pourrait appliquer aux dévastations qu’occasionent les crues du Pô, il a constaté que cette rivière, depuis l’époque où

    ment Vadis, Padus ou Podincus, qui avait sur sa rive gauche, au point de diramation de ces bouches, la ville de Trigopolis, dont la position doit être peu éloignée de celle de Ferrare. Sept lacs renfermés dans le Delta prenaient le nom de Septem Maria, et Hatria est quelquefois appelée Urbs Septem Marium.
    En remontant le rivage du côté du nord, à partir d’Hatria, on trouvait l’embouchure principale de l’Athesis, appelée aussi Fossa Philistina, puis l’AEstuarium Altini, mer intérieure, séparée de la grande par une ligne d’îlots, au milieu de laquelle se trouvait un petit archipel d’autres îlots, appelé Rialtum ; c’est sur ce petit archipel qu’est maintenant située Venise : l’AEstuarium Altini est la lagune de Venise qui ne communique plus avec la mer que par cinq passes, les îlots ayant été réunis pour former une digue continue.
    A l’est des lagunes et au nord de la ville d’Este se trouvent les monts Euganéens, formant, au milieu d’une vaste plaine d’alluvions, un groupe isolé et remarquable de pitons, dans les environs duquel on place le lieu de la fameuse chute de Phaéton. Quelques auteurs prétendent que des masses énormes de matières enflammées, lancées par des explosions volcaniques dans les bouches de l’Éridan, ont donné lieu à cette fable. Il est bien vrai qu’on trouve aux environs de Padoue et de Vérone beaucoup de produits volcaniques.
    Les renseignemens que j’ai recueillis sur le gisement de la côte de l’Adriatique aux bouches du Pô, commencent au douzième siècle à avoir quelque précision : à cette époque toutes les eaux du Pô coulaient au sud de Ferrare dans le Pô di Volano et le Pô di Primaro, diramations qui embrassaient l’espace occupé par la lagune de Commachio. Les deux bouches dans lesquelles le Pô a ensuite fait une irruption au nord de Ferrare, se nommaient, l’une, fiume di Corbola, ou di Longola, ou del Mazorno ; l’autre, fiume Toi. La première, qui était la plus septentrionale, recevait près de la mer le Tartaro ou canal Bianco : la seconde était grossie à Ariano par une dérivation du Pô, appelée fiume Goro.
    Le rivage de la mer était dirigé sensiblement du sud au nord, à une distance de dix ou onze mille mètres du méridien d’Adria ; il passait au point où se trouve maintenant l’angle occidental de l’enceinte de la Mesola ; et Loreo, au nord de la Mesola, n’en était distant que d’environ deux cents mètres.
    Vers le milieu du douzième siècle les grandes eaux du Pô passèrent au travers des digues qui les soutenaient du côté de leur rive gauche, près de la petite ville de Ficarolo, située à dix-neuf mille mètres au nord-ouest de Ferrare, se répandirent dans la partie septentrionale du territoire de Ferrare et dans la polésine de Rovigo, et coulèrent dans les deux canaux ci-dessus mentionnés de Mazorno et de Toi. Il paraît bien constaté que le travail des hommes a beaucoup contribué à cette diversion des eaux du Pô : les historiens qui ont parlé de ce fait remarquable, ne diffèrent entre eux que par quelques détails. La tendance du fleuve à suivre les nouvelles routes qu’on lui avait tracées, devenant de jour en jour plus énergique, ses deux branches du Volano et du Primaro s’appauvrirent rapidement, et furent, en moins d’un siècle, réduites à peu près à l’état où elles sont aujourd’hui. Le régime du fleuve s’établissait entre l’embouchure de l’Adige et le point appelé aujourd’hui Porto di Goro ; les deux canaux dont il s’était d’abord emparé étant devenus insufisans,