Page:Dodge Stahl - Les Patins d argent.djvu/114

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Une fois encore il me rejeta. Cependant les jupes de notre mère étaient en feu ; à tout prix il fallait la sauver. Je ne me rappelle plus rien à partir de ce moment, sinon qu’après une lutte avec le père, je me retrouvai étendu sur le sol.

« Je ne me rendais pas compte de ce qui s’était passé. Il me semblait que notre mère était tout en flammes ! Et tout le temps j’entendais ce rire cruel de mon malheureux père ! Il tenait toujours la mère tout contre les charbons ardents. La pauvre femme priait, oui, elle priait, elle sentait bien que c’en était fait d’elle, et recommandait son âme à Dieu. Heureusement Gretel rentra tout à coup. Ah ! quel esprit ! et comme elle connaissait notre malade ! Elle se précipita sur le buffet, remplit un bol de la soupe qu’il aimait et le posa à terre. Alors, mynheer, le père abandonna la mère et se glissa vers le bol, comme un petit enfant. Dieu merci, la mère n’avait qu’une partie de ses vêtements brûlée. Elle n’était pas atteinte gravement. Elle se releva sans faire entendre une plainte, et alors avec quelle bonté, quelle tendresse elle soigna et veilla le reste de la nuit celui qui avait failli être son bourreau ! Il finit par s’endormir, mais il avait une fièvre ardente et tenait sa main pressée sur son front, comme s’il y avait ressenti une grande douleur. Ah ! mynheer, je n’avais pas l’intention de vous raconter tout cela. C’est un chagrin que j’aurais dû garder pour moi. Il me reste à vous dire que tout le monde sait bien que, si le père n’était pas malade, il ne ferait pas de mal à une mouche. Il ne faut penser aucun mal de lui pour cela. »

Ce récit de Hans avait tellement ému Peter, le malheur qui pesait sur les Brinker était si grand, qu’il sentait bien que les meilleures paroles auraient été impuissantes à consoler le pauvre Hans. Aussi n’avait-il trouvé rien à lui répondre. Mais sa main amie s’était posée sur son épaule et la pressait affectueusement.