Page:Dodge Stahl - Les Patins d argent.djvu/127

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mère ! qu’elle est patiente ! Elle vaut bien mieux que moi, elle ne montre pas comme moi le vain regret de cette grosse somme, si étrangement disparue le jour de la chute de mon père, et jamais, même par un regard, elle ne le reproche à celui qui a perdu la raison. Ah ! si le père pouvait seulement ouvrir les yeux pendant un instant et nous dire enfin où sont passés les florins d’autrefois, tout le reste me serait égal. – Égal ? Oh ! non, tout ne peut m’être égal tant que le père est en danger. Je ne veux pas que le pauvre père meure et qu’il devienne tout froid comme la pauvre petite sœur d’Annie Bowman.

Et pliant les genoux et joignant les mains :

« Oh ! mon Dieu ! faites que le pauvre père ne meure pas ! »

Combien de temps dura sa fervente prière ? C’est ce que la pauvre enfant aurait eu de la peine à dire. Elle se surprit guettant attentivement une petite flamme qui apparaissait par intervalles au fond du foyer que, sans ces apparitions, on aurait pu croire éteint. Elle ne chauffait guère, la petite flamme, mais elle était la preuve qu’au cœur même de la tourbe sombre existait encore un foyer incandescent. Il lui sembla que cette petite flamme attestait que la flamme de la vie n’était pas éteinte non plus dans le corps inerte de son père.

Elle se leva sans bruit, remplit de tourbe un vase de terre, l’alluma et le posa près du lit pour « empêcher le père de mourir tout à fait, » pour éloigner de lui le froid suprême.

La chambre s’était éclairée du côté du lit. Gretel sentit quelque soulagement à contempler ces traits fatigués, adoucis par les lueurs fugitives de cette chaude braise. Son esprit assoupi se porta vaguement vers d’autres objets.

Elle se mit à compter les carreaux des vitres ; presque