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Page:Dodge Stahl - Les Patins d argent.djvu/132

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que ce ne fût pas l’heure du service religieux, quelqu’un jouait de l’orgue. Des sons d’une puissance extraordinaire s’en élancèrent comme pour venir au-devant des jeunes gens. Ces sons semblaient les soulever et les entraîner dans les profondeurs sombres de l’église.

Ils grossirent et s’enflèrent de plus en plus, et finirent par ressembler au bruit d’une tempête puissante ou à celui de la mer en fureur se ruant sur une plage. On entendit résonner une cloche au milieu du tumulte ; une autre lui répondit, puis une troisième, et la tempête s’apaisa comme pour écouter. Les cloches s’enhardirent, elles résonnaient haut et clair. Des sons plus profonds s’y joignirent, formant un concert solennel. Ding ! Dong ! ding ! dong ! La tempête redoubla de furie, faisant rouler un tonnerre lointain. Les jeunes gens se regardaient, mais n’osaient parler. Cela devenait sérieux. Qu’était-ce ? Qu’entendait-on ? Qui donc poussait ce cri terrible et harmonieux ? Était-ce un homme ou n’était-ce pas plutôt un démon enfermé dans cette prison de cuivre, et suppliant qu’on lui rendît la liberté ? C’était la « vox humana. »

À la fin, une réponse lui fut donnée, douce, tendre, affectueuse comme le chant d’une mère. La tempête se tut ; des oiseaux invisibles emplirent l’air d’harmonies joyeuses et extatiques. Il semblait à Peter et à Ben que c’était le chant des anges. Oubliant leur fatigue, ils s’envolaient avec la musique, n’éprouvant d’autre désir que celui d’écouter éternellement ces sons divins. Peter van Holp se sentit tout à coup tiré par la manche et une voix impatiente lui dit :

« Combien de temps allez-vous rester ici ? Il est temps de partir.

— Chut ! fit tout bas Peter, à demi réveillé seulement.

— Allons, allons, capitaine, arrivez, » dit Karl en tirant de nouveau sur la manche de Peter.