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Page:Dodge Stahl - Les Patins d argent.djvu/161

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entendre, la glace en trembla. Jacob Poot, vaincu, s’était abattu comme un jeune taureau sous le coup mortel. Les voiles blanches tournaient et s’inclinaient vaguement devant ses yeux à demi éteints, la vie semblait l’avoir abandonné. Telle une baleine à bout de force vient s’échouer sur un écueil ; tel le pauvre Poot apparut tout à coup à ses compagnons, gisant sur la plaine glacée.

Ben et Peter s’élancèrent vivement.

« Jacob ! Jacob ! crièrent-ils. »

Jacob ne les entendait plus.

Lambert, Ludwig, Karl lui-même accoururent. Ce ne fut pas sans peine que leurs efforts combinés parvinrent à le relever à demi. De rouge qu’il était un instant auparavant, il était devenu instantanément pâle comme un mort ; sa figure était de marbre. L’expression de bonté qui lui était si habituelle l’avait abandonnée.

La foule s’amassa. Peter déboutonna le pardessus du pauvre garçon, desserra ses fourrures, frotta ses tempes avec de la neige ; Ben, en garçon pratique, lui souffla dans la bouche demeurée entr’ouverte.

« Pour Dieu ! éloignez-vous, bonnes gens, s’écria Peter, notre ami a surtout besoin d’air.

— Ne le laissez pas assis. Couchez-le tout de son long, dit une femme du milieu de la foule.

— Faites-le tenir debout, cria une autre.

— Frictionnez-lui la poitrine, disait un pêcheur, et rudement, bouchonnez-le, étrillez-le.

— Entonnez-lui du vin, grommela un énorme individu qui conduisait un traîneau,

— Oui, oui, donnez-lui du vin ! cria-t-on de tous côtés. »

Ludwig et Lambert firent écho.

« Du vin ! du vin ! Qui a du vin ? »

Le plus endormi de tous les fermiers hollandais farfouilla