Page:Dodge Stahl - Les Patins d argent.djvu/238

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Le cocher fit un signe de tête mystérieux.

« Ouist ! siffla Janzoon en se rapprochant encore. Le vieux Brinker mort, hein ? »

Le cocher se sentit gonflé d’importance et garda un silence gros de nouvelles.

« Parlez un peu, vieille pelote ; je retournerais à la maison, là-bas, et je vous rapporterais un bon chignon de pain d’épice, si je croyais que vous pouvez ouvrir la bouche. »

La « vieille pelote » appartenait au genre humain. De longues heures d’attente l’avaient affamé comme un loup. À cette insinuation de Janzoon il donna des signes de faiblesse.

« C’est bien, mon vieux, continua son tentateur, dépêchons-nous. Quelles nouvelles ? Le vieux Brinker mort, hein ?

— Non, guéri ! Recouvré ses sens, » dit le cocher en lançant ces mots un à un comme des balles.

Et comme des balles (parlant au figuré) elles frappèrent Janzoon. Il sauta en l’air, comme si on l’avait fusillé.

« Goede Gunst ! C’est pas possible ! »

Il aperçut au même moment un groupe d’écoliers à quelque distance. Oubliant cocher, pain d’épice, tout, excepté la nouvelle étonnante, il courut vers eux.

Il en résulta que, avant le coucher du soleil, on sut dans tout le pays environnant que le docteur Boekman, passant par hasard auprès de la cabane de « l’idiot, » avait administré à Brinker une dose énorme de médecine aussi noire que de l’encre ; que six hommes avaient été obligés de le tenir pendant qu’on la lui entonnait. L’idiot avait immédiatement sauté sur ses jambes, en pleine possession de toutes ses facultés, et cela si brusquement que le docteur avait roulé par terre. L’ex-malade s’était enfin assis et avait adressé la parole à tout le monde, ni plus ni moins