Page:Dodge Stahl - Les Patins d argent.djvu/344

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Brinker insista pour faire accepter à ses visiteurs une tasse de thé bouillant.

Pendant qu’ils causaient avec son mari, elle dit tout bas à Gretel que les yeux du fils du docteur et ceux de Hans ne se ressemblaient pas du tout assurément et que ceux de Hans étaient cent fois plus beaux. Gretel était bien de cet avis-là ; cependant elle trouvait que le fils du docteur était fort bien à sa façon. Pourtant, au premier abord, elle avait été très-désappointée. Elle s’attendait à une figure tragique telle que celles qu’Annie Bowman lui avait dépeintes pour les avoir vues décrites dans les livres. Et ce jeune homme abandonné, et que le désespoir d’avoir commis un meurtre avait réduit à fuir son père et sa patrie, était fait comme un autre. Il était là, assis tranquillement près du feu, d’un air aussi agréable et aussi naturel que le premier venu.

Sa voix avait bien tremblé un peu lorsqu’il avait adressé la parole à Raff Brinker, et il avait répondu à son regard par un sourire encore empreint d’embarras et de tristesse. Mais il ne ressemblait pas, malgré cela, aux héros du livre d’Annie. Il n’avait pas une seule fois levé les bras au ciel, ce qui n’eût pas été de trop, étant donné les circonstances que devait lui rappeler la vue de Raff Brinker. À coup sûr, et tout bien considéré, Gretel trouvait cela insuffisant. Quant à Raff, il se sentait complètement satisfait. Il s’était, enfin acquitté de son message ; le docteur, par suite, était rentré en possession de son fils ; ce fils était là, sain et sauf, et, en somme, le pauvre garçon n’avait rien fait de mal, sinon qu’il avait pu croire que son père pouvait le renier pour un malheur involontaire. Il est vrai que le gracieux adolescent était devenu un homme, déjà un peu gros. Raff, sans s’en rendre compte, avait espéré serrer dans les siennes la main juvénile d’autrefois – mais n’était-il pas bien changé, lui aussi, malgré tout ce que