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Page:Dodge Stahl - Les Patins d argent.djvu/51

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« C’est ce que nous ne saurons jamais, Hans. Je l’ai montrée bien des fois au père, mais il ne fait pas de différence entre elle et une pomme de terre. Lorsqu’il est rentré pour souper, ce soir terrible, il m’a donné cette montre et m’a recommandé d’en avoir grand soin, jusqu’au jour où il me la redemanderait. Au moment où il ouvrait la bouche pour m’en dire davantage, Broom Kletterboost est accouru en criant que la digue était en danger. Ah ! les eaux ont été terribles pendant cette semaine sainte ! Mon pauvre homme, hélas, saisit ses outils et courut en hâte. À partir de ce moment là, je ne l’ai plus revu dans son bon sens. On le ramena presque mort à minuit. La fièvre s’en alla avec le temps, mais l’hébétement, jamais ! Au contraire, cela empira de jour en jour. Nous ne saurons jamais la vérité. »

Hans connaissait tout cela ; il avait plus d’une fois vu sa mère, aux jours où le besoin se faisait cruellement sentir, sortir la montre de sa cachette, presque résolue à la vendre. Mais elle avait toujours résisté à la tentation.

« Non, Hans, disait-elle, il faudra que nous soyons plus près que cela de mourir de faim pour manquer de parole au père ! »

Une scène de ce genre traversa alors l’esprit du fils. Ayant soupiré profondément et lancé à Gretel, à travers la table, une boulette, il dit :

« Ah ! mère, vous avez bien fait de la garder. Plus d’une à votre place l’aurait échangée depuis longtemps contre de l’or.

— Honte sur celles-là, alors ! s’écria la bonne femme avec indignation. Quant à moi, je ne le ferai pas. Et puis les gens sont si durs que s’ils voyaient jamais dans nos mains une chose d’une telle valeur, même si nous racontions tout, ils pourraient soupçonner le père de… »

Hans rougit de colère.