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Page:Donop - Commandement et obeissance, 2e edition 1909.djvu/95

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Il faut prendre garde qu’en agissant comme on le fait, on risque de transformer, peu à peu, l’armée nationale, qu’on a appelée la grande muette, à cause du calme qu’elle sait conserver au milieu du désordre général, et du silence qu’elle garde, parce que sa pensée va, constante, bien au delà des misères qui l’entourent, en une armée de prétoriens, de mamelucks et de janissaires.

Le Français, si jaloux jadis de ses droits, supportera-t-il cela ?

Consentira-t-il à entretenir, de ses deniers, des gaillards armés prêts à fondre, sur un signe d’un agent quelconque du pouvoir, sur ceux ou celles qui n’auraient pas à cœur de se soumettre humblement à toutes ses fantaisies ? Conservera-t-il son insouciance habituelle vis-à-vis de ce danger toujours menaçant ? Restera-t-il dans cet état dégradant des peuples diminués ? S’enfoncera-t-il dans les hontes de la barbarie ? Ou bien, un jour de juste colère, ne se soulèvera-t-il pas, pour châtier ceux qui l’auront frappé, et chasser ceux qui auront lâché sur leur propre nation le fléau déshonorant d’une soldatesque déchaînée ?

On pourrait se demander aussi si, fidèles aux enseignements de l’histoire, ces guerriers mécontents un jour de la modicité de leur solde ou de leur inaction improductive, ne s’aviseraient pas de procéder à l’égard de leurs maîtres parcimonieux