Page:Dorat - Œuvres diverses, Neuchatel, 1775.djvu/78

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Son œil étinceloit du feu de la gaîté ;
Mais, rempli de l’objet qu’il avoit à nous peindre,
Sous un flegme éloquent il savoit la contraindre ;
Au plaisir qu’il donnoit il savoit se borner,
Et sans montrer le sien, le laissoit soupçonner.
Ainsi qu’un jour nouveau suit le jour qui s’efface,
Lorsqu’un talent s’éclipse, un autre le remplace.
Poisson, qui si long-tems amusa tout Paris,
Descendoit dans la tombe, escorté par les ris.
Préville vient, paroît, il ranime la scene ;
Et Momus aisément fait oublier Silene.
Préville !… ennuis, fuyez ; fuyez, soucis affreux ;
Son nom est un signal pour rallier les jeux.
Les muses m’ont appris qu’une douce démence,
Qu’un rire universel a fêté sa naissance.
Mille silphes légers, soulevant le rideau,
Se jouoient et dansoient autour de son berceau.
Il reçut le grelot des mains de la folie ;
En bégayant encore, il vola vers Thalie.
Pour lui seul la nature est sans déguisement,
Comme la jeune amante aux yeux de son amant.
Acteur ingénieux, je te dois cet hommage :
Ainsi que nos plaisirs, ces vers sont ton ouvrage.
Que du lierre immortel ton front soit décoré ;
Qui fait rire son siecle, en doit être adoré.
Pour les rôles d’amans si l’instinct vous décide,