Page:Dorgelès - Les Croix de bois.djvu/314

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le major examinait rapidement les blessés, dont un infirmier éclairait les plaies avec une lanterne. Sur le parquet tramaient des pansements souillés, des tampons d’ouate. Une grande cuvette débordait d’eau rougie.

— Un autre, disait le major, en s’épongeant le front de son bras nu.

Et le suivant s’asseyait, tendant son bras bandé ou écartant sa veste. Plié sur une table de bois blanc, un soldat affairé remplissait les fiches, que les évacués attachaient eux-mêmes à leur capote, comme une carte de pesage.

Dans une pièce voisine, on entendait crier un grand blessé.

— N’est-ce pas qu’on me couchera dans un lit, monsieur le major ?… Oh ! que je voudrais y être… Un lit avec des draps, hein, monsieur le major… Est-ce que la voiture viendra bientôt ?… Vite, faites-la venir.

Le major déchira la chemise de Sulphart pour regarder sa blessure.

— Cela ne coule plus… On te lavera là-bas… Donne la main, à présent.

Sulphart ne put s’empêcher de crier, quand on défit son pansement collé.

— Ce n’est rien, belle blessure, lui dit le major… Seulement, il va falloir te couper deux doigts.

— Tant pis, lui répondit le rouquin, je ne suis pas pianiste.



— J’ai mal… oh ! que j’ai mal…

Gilbert répétait ces mots à mi-voix, comme s’il avait