Page:Dormienne - Les Caprices du sexe.djvu/20

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En effet, elle n’ignorait pas que l’acte amoureux comporte la pénétration du sexe féminin par la verge mâle. Le plaisir en résulte. Or, il apparaît évident que la bouche peut substituer la gaine d’entre jambes. En ce cas la femme ne doit sans doute rien éprouver et agit avec désintéressement. Il s’agit simplement de réjouir un partenaire. Un pareil scrupule l’étonnait cependant chez des manants, car les paysans n’étaient ni délicats, ni, sans doute, vraiment voluptueux.

Néanmoins, une femme tient toujours à prouver qu’elle surpasse ses consœurs. Ainsi voit-on couramment des amoureuses, encore chastes de cœur et de corps, se livrer, avec la passion même des plus débauchées, à des actes vils ou douloureux et que seul expliquerait l’amour le plus incandescent. La lutte des sexes doit se lire comme un effort de chacun pour faire croire à l’autre qu’il apporte ce que l’amour peut imaginer de plus parfait. Le mâle, que sa force physique trahit le plus souvent, se voyant incapable d’emplir le vase sans fond de la volupté féminine, a fait défendre le plaisir à la femme par la bienséance, pour le cas où la morale serait insuffisante. Mais la femme cherche justement à donner à son compagnon une qualité de bonheur dépassant celle que lui procurerait toute autre amoureuse. Et c’est pourquoi les pratiques sexuelles les plus anormales sont le fait de celles qui n’aiment point. L’imagination et l’orgueil leur inspirent ce que le désir seul n’inventerait jamais.

Ces idées ne se formulaient pas avec précision dans l’esprit de la jeune Louise de Bescé. Elle les pressentait parce qu’elle savait raisonner.

Soudain Louise, dans la nuit devenue totale, entendit non loin d’elle des paroles légères. Elle s’arrêta. Les chuchotements continuaient. Elle s’approcha doucement de ces bruits, prise par la curiosité.