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CHAPITRE XV

La Figure du Christ

Une étude de la pensée religieuse de Leconte de Lisle qui ne ferait pas une place particulière à la poignante préoccupation que, d’un bout à l’autre de sa vie, il témoigna pour la personnalité du Christ, tel qu’il l’apercevait au travers des Évangiles, serait assurément incomplète. En effet, si le poète de la Bête écarlate a parfois malmené l’institution chrétienne, il a toujours parlé, avec le respect le plus profond, de son fondateur : il a fait, entre le christianisme et Jésus-Christ une distinction absolue.

Tout ce qui touche à la figure du Nazaréen l’émeut : même « l’enfant », qui, ailleurs dans l’œuvre de Leconte de Lisle, ne tient aucune place, est chanté par lui avec une grâce qui n’a pas été dépassée, dès qu’il est question du petit Jésus, dans les langes. Certes, le mystère de la nuit de Noël continuait de remuer, dans l’âme du poète, des émotions anciennes, longtemps après qu’il avait établi son incrédulité :


« J’ai vu luire un rayon éblouissant, un seul !
Et c’était, entre l’âne et le bœuf à leur crèche,
Un Enfant nouveau-né sur de la paille fraîche !