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CHAPITRE XVIII

La Conception de l’Art

La principale préoccupation des artistes, peintres, sculpteurs, prosateurs, et poètes, qui, dans la deuxième moitié du XIXe siècle, ont travaillé à rendre, à l’Art, la dignité et le goût de la vérité a été de le dégager des conventions parasites qui était en train de l’étouffer.

Un effet ordinaire des admirations, d’abord naturelles, puis exagérées, puis dangereuses, que ressentent, pour des œuvres parfaites, les successeurs immédiats d’une période classique, c’est que, beaucoup d’artistes, épris des modèles qui sont offerts à leurs yeux, renoncent à atteindre la beauté en observant eux-mêmes, directement et toutes palpitantes, la nature et la vie, pour s’épuiser à imiter ces chefs-d’œuvre de l’art dans lesquels la nature et la vie n’ont fait que se refléter.

Le résultat fâcheux de ces imitations « d’après l’art » ne se fait point attendre : l’œuvre qui n’a pas eu de contact avec ce qui est vivant, s’affadit. Son contour devient conventionnel. Il existe, à la fin, des moules tout faits que le premier venu, après un peu d’étude, remplit avec la plus