Page:Dostoïevski - Carnet d’un inconnu 1906.djvu/345

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— Oh ! ne m’érigez pas de monuments ! gémissait Foma. Je n’ai que faire de vos monuments ! Je ne convoite de monument que celui que vous pourriez m’ériger dans vos cœurs !

— Foma ! interrompit mon oncle, en voilà assez ; calme-toi ! Il ne s’agit pas de monuments. Écoute-moi… Vois-tu, Foma, je comprends que, tantôt, tu pouvais brûler d’une noble flamme en me faisant des reproches. Mais tu avais dépassé la limite qu’eût dû te montrer ta vertu ; Foma, tu t’es trompé, je te le jure !

— Non, mais finirez-vous ? piaula de nouveau la Pérépélitzina. Voulez-vous donc profiter que ce pauvre homme est entre vos mains pour le tuer ?

La générale et toute sa suite s’émurent et toutes ces mains gesticulèrent pour imposer silence à mon oncle.

— Taisez-vous vous-même, Anna Nilovna, je sais ce que je dis ! répondit mon oncle avec fermeté. Cette affaire est sacrée ; il s’agit d’honneur et de justice ! Foma, tu es un homme raisonnable ; tu dois immédiatement demander pardon à la noble fille que tu as injustement outragée.

— Que dites-vous ? Quelle jeune fille ai-je outragée ? s’informa Foma en promenant ses regards étonnés sur l’assistance, comme s’il eût perdu