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Page:Dostoïevski - L’Éternel Mari, trad. Nina Halpérine-Kaminsky, 1896.djvu/156

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du matin, Veltchaninov, au moment où il sortait d’un cabaret qu’on lui avait indiqué, se trouva nez à nez avec lui.

Pavel Pavlovitch était complètement ivre ; deux femmes l’entraînaient vers le cabaret ; l’une des femmes le soutenait par le bras ; un grand gaillard les suivait de près, criant à tue-tête, et faisant à Pavel Pavlovitch de furieuses menaces. Il hurlait, entre autres choses, « qu’il l’avait exploité, et qu’il avait empoisonné sa vie… ». Il s’agissait vraisemblablement d’argent. Les femmes avaient une peur terrible, et se hâtaient tant qu’elles pouvaient. Lorsqu’il aperçut Veltchaninov, Pavel Pavlovitch se jeta sur lui, les mains tendues, et cria, comme si on l’égorgeait !

— Frère, au secours !

Le gaillard qui les suivait n’eut pas plus tôt vu la silhouette redoutable de Veltchaninov, qu’il disparut en un clin d’œil. Pavel Pavlovitch, tout fier de sa victoire, lui montrait le poing, poussait des cris de triomphe ; mais Veltchaninov l’empoigna violemment par les épaules, et, sans savoir lui-même pourquoi, se mit à le secouer, de toute la force de ses bras, de telle façon que l’autre claquait des dents. Pavel Pavlovitch cessa aussitôt de crier, et le regarda avec une stupéfaction imbécile d’ivrogne. Velt-