Page:Dostoïevski - L’Éternel Mari, trad. Nina Halpérine-Kaminsky, 1896.djvu/255

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si parfaite netteté, avec un tel air de réalité, que par moments il lui venait des doutes : « Est-ce bien vraiment une hallucination que tout cela ? Que me veulent-ils donc, ces gens, mon Dieu ! Mais… si tout cela n’est pas du délire, comment est-il possible que ces cris ne réveillent pas Pavel Pavlovitch ? Car enfin il dort, il est là, sur le divan ! »

À la fin, il arriva ce qui était arrivé dans l’autre rêve : tous refluèrent vers la porte et se ruèrent dans l’escalier, et furent rejetés dans la chambre par une nouvelle foule qui montait. Les nouveaux arrivants portaient quelque chose, quelque chose de grand et de lourd ; on entendait résonner dans l’escalier les pas pesants des porteurs ; des rumeurs montaient, des voix hors d’haleine. Dans la chambre, tous crièrent : « On l’apporte : on l’apporte ! » Les yeux étincelèrent et se braquèrent, menaçants, sur Veltchaninov ; et violemment, du geste, on lui désigna l’escalier. Déjà, il ne doutait plus que tout cela fût, non pas une hallucination, mais une réalité ; il se haussa sur la pointe des pieds pour apercevoir plus vite, par-dessus les têtes, ce qu’on apportait. Son cœur battait, battait, battait, et soudain, exactement comme dans l’autre rêve,